Le cinéaste Arnaud Desplechin expliquait un jour, dans une formule très humble, qu’il ne pouvait différencier le populaire de l’intimisme. Que cette échelle de goût menait fatalement à une impasse. En musique, c’est pareil : ne jamais séparer l’érudition des uns du primitivisme des autres, accepter le soyeux comme la pire des déflagrations. Pourquoi aime-t-on aussi chèrement les Stooges, les Pistols ou les Dead Boys ? Pourquoi ces groupes, au fond, entretiennent des correspondances discrètes avec les Smiths ou les Pale Fountains ?
Dans le cas de Marilyn Manson (comme dans celui de Rammstein ou même Nine Inch Nails), la route fut bien longue avant d’en saisir une beauté secrète, une raison qui justifierait cette pesanteur, ce metal hargneux et stupidement basique. Sans doute nous fallait-il mieux comprendre le goût des contrastes, apprendre que le pur défouloir analphabète pouvait équivaloir à la jolie musique instruite. Mort des hiérarchies. Anarchie !
Le nouveau single de Marilyn Manson (gracieusement nommé We Know Where You Fucking Live), dans une éternelle tradition goth-hardcore-indus, n’apporte rien d’essentiel à la musique du groupe, mais on se laisse prendre. C’est du basique, du lourd, du contestable, sauf qu’il y a une âme, une raison de sonner ainsi et pas autrement.
Facile d’imaginer que le prochain Marilyn (Heaven Upside Down, chez Loma Vista Recording / Caroline International), le 06 octobre, emboutira nos oreilles jusqu’à l’épouvantable – voire jusqu’au rejet catégorique lors des premières écoutes. Avant d’y saisir une petite musique du cœur et d’y revenir ?