Outfit / Slowness
[Memphis Industries / La Baleine]

Outfit - SlownessDe l’art de se saborder avant de se sublimer tel le Phoenix.

En 2013, Performance (Double Denim Records), le premier album d’Outfit séduisait par sa puissance mélodique, son inventivité, son ingéniosité à métaboliser une chanson tortueuse en tube pop intelligent. Ceux qui étaient alors passés à côté de cette Performance n’avaient pas compris pourquoi en fin d’année cet album figurait en tête des disques qui avaient le plus visités notre platine. Des mois après, on en démord pourtant pas : cet album est à la fois évident et suffisamment malicieux pour ne pas souffrir de l’usure du temps. Un disque éminemment contemporain et qui, contrairement à beaucoup d’autres, pourra encore s’apprécier dans longtemps.

Mais tout ceci est le passé. Après une belle tournée, les cinq membres d’Outfit se sont éparpillés loin de leur Liverpool natal. Et cette dispersion géographique semble beaucoup avoir affecté ses deux têtes pensantes (le chanteur Andrew PM Hunt et le claviériste Thomas Gorton). C’est ce qui doit en grande partie expliquer que Slowness est aussi différent de son prédécesseur.

Et pour tout dire, après la prometteuse introduction que constitue New Air (avec son clavier syncopé et une montée organique digne des Doves), on cherche pendant longtemps la magie qui opérait autrefois. Les compositions ne respectent jamais les canons pop, il n’y a pas trace d’un refrain à fredonner et Outfit nous lâche plus d’une fois à l’instant où on s’apprête à faire le grand saut avec eux. Des promesses, un souffle d’espoir vivace, mais qui exacerbent une frustration tenace aux premières écoutes. Il faut donc faire son deuil du groupe flamboyant d’hier pour enfin commencer à comprendre où le groupe tourmenté d’aujourd’hui veut nous emmener. Probablement, le Cheval de Troie pour pénétrer au cœur de cet album se trouve-t-il paradoxalement en dernière position, avec le final démoniaque Swam Out qui commence comme une bluette mid-tempo avant de se muer en odyssée mélancolique : cette entrée de batterie au bout de quatre minutes cueille à chaque écoute et les montées progressives échappent aux lois de la pesanteur. Cet album publié pour le compte du label Memphis Industries se révèle ainsi à petites touches, car outre la flatteuse production (assurée par le groupe lui-même), chaque chanson recèle une multitude de motifs mélodiques qui, combinées entre eux, déploient un assez large éventail émotionnel. On apprécie ainsi l’accidenté Genderless lorsqu’une guitare furibarde tente de prendre le dessus sur une rythmique électronique avant de se faire complètement étouffée. Ou encore la pointe de gimmicks baléariques façon The Embassy (Framed) avant une montée soft-rock qui montre l’influence de The Simple Minds (de la bonne époque). Voix de tête, rythmique virevoltante et break astucieux, Smart Thing lorgne du côté de Metronomy sans l’air d’y toucher. Ou de Phoenix.

Alors que de prime abord, on a bien cru qu’Outfit s’était consumé sur place, on se rend compte que Slowness est de ces disques longs en bouche et autrement bien plus racé et subtil que bien des albums plus aguicheurs.

Tracklist
01. New Air
02. Slowness
03. Smart Thing
04. Boy
05. Happy Birthday
06. Wind or Vertigo
07. Genderless
08. Framed
09. On the Water, on the Way
10. Cold Light Home
11. Swam Out
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