The Jesus and Mary Chain / Damage and Joy
[Artificial Plastic Records]

6.5 Note de l'auteur
6.5

The Jesus and Mary Chain - Damage and JoyFan psychocandien, sois rassuré : ton groupe écossais fétiche ne s’est pas transformé en adepte de la bossa nova. Dix-neuf ans après leur dernier fait d’armes (Munki, disque moyen), les frères Reid, avec Damage and Joy (Artificial Plastic Records), reprennent l’histoire comme si rien n’avait depuis changé. Il suffit de trois accords, en ouverture d’Amputation (typiquement JMC, cet intitulé), pour que 2017 ressemble à 1988 (année Sidewalking, « un classique » disait William Reid – il n’avait pas tord) : spleen patraque, guitares fuzz, voix d’outre-tombe…

Les albums de reformation n’étant généralement qu’un prétexte pour payer les impôts, on craint le syndrome Pixies : application bougonneuse d’une vieille recette, mirage du passé, ancienne jeunesse exigeant la clémence proustienne. L’auditeur est fin prêt à maudire un peu plus l’époque contemporaine. Quand soudainement, en deuxième position, War on Peace oblige à tendre l’oreille : un peu Teenage Lust sur les bords (mais en soft), le titre ravive un souvenir assez galvanisant. Déjà pas mal, se dit-on : inversement à la plupart de nos groupes fétiches 80’s dont le comeback n’incite qu’à saupoudrer leurs nouvelles compositions de mort aux rats, les Jesus and Mary Chain, au moins, provoquent encore une émotion, une petite palpitation du cœur. Est-ce néanmoins suffisant pour s’enquiller l’intégralité d’un album ? Plutôt oui.

Damage and Joy est un disque surprenant (surprenant, dans le sens où nous n’attendions rien d’un retour des Jesus and Mary Chain). Car si les Jesus font ici du Chain, la musique n’est pas du tout forcée, mécanique, arthritique. Le plaisir des retrouvailles entre Jim et William s’entend : le (sound of) speed de All Things Pass, les paroles tarées de Presidici, les accords  lancinants de Always Sad… Différents points qui pardonnent l’aspect parfois best of de l’ensemble.

L’album rejoindra certainement la poussière au bout de cinq écoutes, mais la belle énergie déployée par les frères Reid, une fois n’est pas coutume, justifie en partie cette insistance à refuser la pierre tombale.

Du coup, la nostalgie peut décamper. Cette dernière est de toute façon obsolète – sinon, nous aurions défendu les derniers Pixies, Ride ou Stone Roses. Seul importe, bien plus que la qualité des chansons, l’enthousiasme consistant à remettre la machine en route. Et à l’instar hier des Bunnymen et des Go-Betweens, les frères Reid semblent aujourd’hui prendre un sacré panard à l’idée d’extirper du grenier leur formule culte : larsens, surf rock, fausses désillusions, cuir et cambouis…

Un bémol, cependant : l’aspect parfois trop lisse de la production, qui canalise le boucan et rend les Jesus bien plus présentables qu’à l’accoutumée. C’est aussi pourquoi Damage and Joy risque de ne jamais dépasser le plaisir d’un soir : les stridences manquent un peu trop vite à l’appel.

The Jesus And Mary Chain – Amputation

Tracklist
01. Amputation
02. War On Peace
03. All Things Pass
04. Always Sad
05. Song For A Secret
06. The Two Of Us
07. Los Feliz (Blues and Greens)
08. Mood Rider
09. Presidici (Et Chapaquiditch)
10. Get On Home
11. Facing Up To The Facts
12. Simian Split
13. Black And Blues
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