On avait injustement perdu de vue le rappeur pop Cutter le Seul depuis 2021 et son album Merder en Beauté, porté par son génial single Disparaître. A mi-chemin entre Fuzati et Oxmo Puccino (et il y a de la route), le jeune homme est pourtant un électron libre particulièrement intéressant du hip-hop français, ni trash, ni variétoche, il trimballe sa lose de pièces en pièces en assumant son manque de succès et une nature qu’on qualifiera pour faire simple de… critique et dépressive.
C’est donc avec plaisir qu’on le retrouve ces jours-ci avec un nouvel EP, ELVI pt.1, plus hip-hop que ses précédentes livraisons, au son dépouillé et souvent assez primitif, mais néanmoins astucieux et formidablement travaillé (Vernon Subutex 3). Les textes sont sombres, précis, désabusés et déclinés d’une voix « à la j’en ai marre de vivre » qu’on adore. Entre clin d’oeil appuyé à Virginie Despentes donc, référence au lingchi, le supplice de démembrement chinois…. (Lingchi), ou le terrifiant soliloque de Rien Dire, aux échos vocaux proches d’un Orelsan au fond du fond de la dépression, Cutter Le Seul s’offre aussi quelques belles collaborations et notamment un excellent Nik le Suxxé, en partage avec Stick qui sert ici un couplet mémorable. « J’ai toujours rêvé d’être un serial killer…. », chante Cutter… ce qui dit assez bien où il en est de sa carrière radieuse.
Le EP est une parfaite expression de lose au pluriel, de rêves brisés et de frustration. C’est le bréviaire idéal pour s’auto-déprécier et accompagner une descente aux enfers.