C’est la nuit, la vieille mustang noire déglinguée fonce à toute berzingue sur une rocade berlinoise. A l’intérieur, une musique électronique typée vintage et minimale transperce les haut-parleurs et mon copilote m’annonce froidement « j’incube ». C’est l’image à laquelle je pense quand j’entends le dernier album de Blackmail, sorti deux ans tout juste après le premier disque, Bones, qui avait beaucoup séduit par ici.
C’est donc déjà le retour du trio composé de Stéphane Bodin et François Marché, deux anciens membres de Prototypes et Bosco, et de Sylvain Levene, chanteur échappé de This Is Pop et Beatmark.
Dès l’introduction et le titre qui donne son nom au disque Dur Au Mal (Yuk-Fü Records), on sait immédiatement qu’on est en présence d’un disque différent du précédent : le ton s’est durci, le propos est plus tendu et radical. Il en est de même pour les sons et les instruments choisis pour colorer les huit titres : on sent que la cohérence entre les chansons est aussi due au nombre limité d’outils choisis pour l’illustrer.
Au premier rang, la distorsion et c’est sans doute ce qui fait le charme premier de cet album. Chaque instrument semble saturé ou amplifié pour aboutir à une matière différente du son originel. Le choix de la distorsion peut d’ailleurs rappeler l’usage qui en est fait sur le dernier album des Chemical Brothers (le gimmick sur Weekend Facile en étant le meilleur exemple). On pense aussi à Underworld (période premier album) pour la froideur de l’ensemble et les sons Korg bien claquants.
A mesure que le disque avance, on réalise que malgré la présence unique de machines (aucune guitare, aucune batterie acoustique), on est en présence d’un vrai disque de rock. Du rock mutant parfois même inspiré par des styles qui n’ont plus trop droit de cité de nos jours (le rockab’ de Elle Est Cool et son final bien flippant, qui se rapproche quasiment des travaux d’Electronicat, en son temps). On cherche d’ailleurs des frères d’arme français à Blackmail actuellement, sans en trouver aucun, le dernier venant en tête étant Colder, il y a quelques années.
Côté voix, les propos scandés du chanteur se présentent comme un mix parfait entre l’élocution insolente de Daniel Darc et l’assurance glaciale d’Alan Véga. Quand vient le titre Mes Amis, on pense même à des accointances avec Jimi Tenor, dans ses moments les plus noirs.
34 minutes plus tard (que c’est agréable un album court qui va droit au but, sans délayer), le disque s’achève sur un titre plus apaisé, désabusé où le groupe lui-même semble épuisé.
Dur Au Mal peut-être, mais il arrive bien toujours un moment où le corps nous dit stop. Pour mieux repartir la prochaine fois !
la chronique donne envie d’écouter l’album…cool.
Il faut écouter l’album 🙂