Arcade Fire / Everything Now
[Columbia / Sony]

1 Note de l'auteur
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Arcade Fire - Everything NowArcade Fire a toujours été un jeune groupe de vieux pour les vieux. Dès Funeral, tout ce que le rock comporte de pire se trouvait en jachère : l’emphase, le petit côté christique, les guitares solidement peignées, le chant hyper concerné. Les patriotiques U2 (ou le Simple Minds boursouflé de Once Upon a Time) avec deux décennies de retard.

L’époque, semble-t-il, ressent la nécessité d’acclamer ce genre de groupes puisque les américano-canadiens reçoivent, as usual, un traitement de faveur disproportionné – par ceux-là même qui, en 87, trouvaient lourdingue Joshua Tree. Et tous les moyens sont bons pour défendre Arcade Fire ! Dans le cas de ce dernier album (mélange ABBAcadabrant entre disco, funk, reggae et électro), le critique concerné parle de noirceur sous-jacente, d’un disque connecté au social. Pratiques, les arguments : quand tu ne sais pas trop quoi penser d’un album destiné à casser la baraque, et que tu souhaites néanmoins rester dans le coup, tu noies le poisson en balançant des hypothèses grabataires, faciles, datées. Comme Everything Now, du reste…

Arcade Fire est aussi un groupe à sujets. Chaque chanson se doit de posséder un sens (explicite). C’est grand-père qui annone des clichés sur l’époque contemporaine, ou le mec de Facebook qui a toujours un truc à dire sur l’actualité – surtout quand il n’a rien à en dire. Je sais rien mais je dirai tout : en 73, Pierre Richard écrivait déjà la chronique de ce cinquième Arcade Fire.

Le problème, avec Everything Now, est que le fond cherche désespérément à donner une logique, une structure, à une musique qui part en vrille. Comme U2 avec Pop, il y a ici l’idée du renouvellement, de l’adieu (évidemment provisoire) au rock. Et, dans ces cas-là, l’électro est toujours le meilleur alibi, le gage de crédibilité. Sauf que l’électro selon Arcade Fire n’est qu’un duplicata mécanique de divers groupes (dont les irritants ABBA sur certains titres), un copier / coller comme si de rien n’était. Un très mauvais duplicata : Arcade Fire pioche un peu partout, force les paroles pour justifier la cohérence de ce gloubi-boulga, et n’aboutit qu’à un machin qui radote une histoire connue de tous (Daft Punk, LCD Soundsystem). Au moins, l’incrédulité d’ABBA pouvait faire sourire. La prétention d’Arcade Fire laisse inversement pantois (de honte).

N’importe quelle formation qui sortirait aujourd’hui un disque aussi raté, aussi calculateur dans son approche, se ferait obligatoirement laminée par la presse. Arcade Fire, non. Sans doute car la presse musicale applique dorénavant une politique désuète, celle des auteurs. Or, au ciné comme dans le rock, nous le savons depuis longtemps, chaque objet mérite de se voir ou de s’écouter de façon autonome, extirpé d’un tout, pour ce qu’il est, pour ce qu’il prétend être.

Tracklist
01. Everything_Now (Continued)
02. Everything Now
03. Signs Of Life
04. Creature Comfort
05. Peter Pan
06. Chemistry
07. Infinite Content
08. Infinite_Content
09. Electric Blue
10. Good God Damn
11. Put Your Money On Me
12. We Don’t Deserve Love
13. Everything Now (continued)
Ecouter Arcade Fire - Everything Now

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2 Comments

  1. says: Li-An

    Je n’ai visiblement pas lu les mêmes critiques puisque je n’en ai pas croisé une de vraiment enthousiaste. En même temps, on ne peut guère s’attendre à de l’objectivité chez un chroniqueur qui n’aime pas Abba. Le tout fait un peu « regardez comme je suis jeune, je n’aime pas le dernier Arcade Fire ». Dommage, dommage (en plus, je n’ai pas de goût particulier pour Arcade)…

    1. says: Jean Thooris

      Merci Li-An pour votre commentaire. Vous parlez d’objectivité. Le rôle du chroniqueur, bien modeste soit-il, n’est-il pas, inversement, de faire preuve de subjectivité ? Car sinon, toutes les voix se ressemblent et tombent dans un détestable consensus mollasson. De même, faire jeune, dites-vous ?! Si seulement je pouvais me le permettre !

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