Viet Cong a beau revêtir aujourd’hui l’identité Preoccupations, cela ne change pas grand-chose à sa musique : il s’agit toujours d’un post-punk flippé, lourd et menaçant. Matt Flegel et Mike Wallace, depuis le Public Strain de Women (un disque qui respirait déjà la joie de vivre), ne sont pas enclins au sourire complice, à une décontraction source de légère brise. Du moins en surface.
D’où la question : en quoi Preoccupations se différencie-t-il des 358 albums post-punk édités au cours des six derniers mois ?
Preoccupations, s’il navigue dans le nocturne et les guitares bazooka, incorpore à sa musique des touches new wave qui décrispent l’atmosphère. Des sons de claviers attractifs, une ligne de basse à la Charlotte Sometimes (Monotony) ou diverses inclinaisons vocales permettent à ces compositions d’échapper au larsen gothique, à la messe incantatoire bercée de fumigènes. Parfois même, comme lors des onze minutes de l’ambitieux Memory, le groupe délaisse The Cure et And Also The Trees pour lorgner vers l’hymne fédérateur tendance U2/ James. Chaque titre détient effectivement une ossature dark, mais l’idée consiste à s’extraire d’une noirceur trop affirmée, à trouver des échappatoires pour que le son n’empiète jamais sur l’importance de la chanson. Car si l’album de Viet Cong digérait la froide colère de Pornography, celui de Preoccupations commence à tendre les bras vers l’axe Let’s Go to Bed / Close to Me. L’heure n’est pas encore au Spring Break, mais au moins cette musique se permet-elle de desserrer les dents.
Beaucoup de formations post-punk contemporaines (Ceremony, TOY) peinent à se renouveler sans afficher explicitement leur volonté de rupture (d’où, souvent, des intentions d’albums plutôt que des albums à part entière). Viet Cong / Preoccupations, lui, conserve un naturel, une logique interne conduisant le groupe, certes par petites enjambées, à peaufiner son inclinaison pop-rock. Une démarche qui rappelle la trajectoire des Psychedelic Furs, de la vindicte underground jusqu’au sommet des charts. En espérant qu’à l’inverse de Richard Butler, Preoccupations évite la concession FM…
02. Monotony
03. Zodiac
04. Memory
05. Degraded
06. Sense
07. Forbidden
08. Stimulation
09. Fever