Straybird deviendra-t-elle la Björk française ?

StraybirdEn voilà une que feu le Ministre du Redressement Productif aurait pu avec fierté aligner sur l’étagère. Laëtitia, la jeune femme qui se cache derrière le groupe Straybird, pourrait bien devenir la Björk française et c’est évidemment tout le mal qu’on lui souhaite. Björk ? Björk ! Comme on y va. C’est évidemment juste une accroche marketing pour tenter de décrire la mini-révolution apportée par Straybird, dont le EP In Transit l’a propulsée en haut de l’affiche dans l’univers feutré et délicat du trip-hop moderne. A vrai dire, si quelqu’un s’en souvenait, on aurait plutôt recherché la filiation de Leïla (Arab), auteur il y a très très longtemps (1998) d’un somptueux Like Weather, dont tous ceux qui ont croisé sa route se souviennent encore.

Straybird est jeune, plutôt jolie, originaire de Bordeaux. La jeune femme officie dans un genre, l’électro organique, qui a pu être incarné en France par la talentueuse (mais soûlante) Emily Loizeau. La recherche d’une voie mêlant voix, électro et astuces instrumentales est la même mais le résultat, chez Straybird, plus discret, délicat et probablement moins démonstratif que chez Loizeau. Avec ce deuxième EP, Straybird inaugure aussi une recherche visuelle symbolisée par la conception d’un clip interactif magnifique accompagnant le morceau Run. Développé avec une agence baptisée Nest, l’objet s’écoute et se joue ici.

Nous étions partis pour y passer une minute ou deux et puis cela nous a pris un bon quart d’heure, avant d’y revenir un peu plus tard. Run propose un parcours interactif passionnant dans une série d’univers futuristes ou carrément romantiques, qui mêlent rêves de grande aventure, de romance et anticipation. Le clip, joueur et cartoony, donne une image assez juste de ce qu’inspire la poésie féminine de Straybird, mélange d’urbanité glacée électro et d’insouciance juvénile. On navigue dans un monde proche d’Avatar mais aussi contemporain et bobo qu’une balade new age chez un IKEA bio. C’est l’horizon musical de Straybird qui s’énonce ainsi en images, complexe, foisonnant (chaque morceau de cet EP renvoie à la nature, à un paysage, un élément organique) et en même temps délicatement sophistiqué. L’électro ruisselle jusqu’à singer la mélodie d’un cours d’eau ou d’un oiseau qui pleure. Les Ipads grésillent comme une harpe et on se prend à rêver de célébrations forestières 3.0 où des nymphes jongleraient avec des hologrammes lingés de près. C’est beau, c’est neutre et cela émeut souvent, comme si la jeune femme se donnait vraiment l’ambition et les moyens d’atteindre ce rêve inaccessible d’une parfaite harmonie entre le digital et l’organique, entre l’urbain et le bucolique. L’univers de Straybird évoque celui de Superpoze en moins heurté et plus accueillant, en plus fluide et sensuel. Ceux qui aiment justement l’affrontement et les heurts resteront probablement étrangers à cette musique.

Le résultat, en tout cas, est jusqu’à présent passionnant et à même d’apporter un réconfort par son immédiateté, sa simplicité et le caractère chaleureux et éminemment sincère de la démarche. Straybird fait partie de ces oiseaux qui sifflent encore lorsque la bise est venue. On lui souhaite de gazouiller longtemps.

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