Le garçon est mystérieux. L’artiste précieux. Thomas Walter est fascinant. Et incroyablement talentueux.
En 2004, il avançait sous la simple lettre T. avec un album sans titre réalisé sur le label ami Herzfeld. Coup de foudre instantané pour ces mélodies célestes bricolées avec pas grand-chose et beaucoup de sensibilité. Dans la continuité, on l’a pisté au sein du Herzfeld Orchestra, chez Buggy et surtout le temps de la collaboration au firmament avec Spide et Vincent Robert où il apparaît sous son identité civile de Thomas Walter (It Will Shine signé Loyola).
On le croise en chemin, au détour de quelques concerts. Mutique, à fleur de peau. Ni à l’aise ni affable dès lors qu’il n’est pas sur scène. Peut être parce qu’il faudrait plus de temps pour qu’il y ait un véritable échange. Mais pas sûr qu’on est eu, hier comme aujourd’hui d’ailleurs, l’envie de déchirer le voile derrière lequel il se réfugie.
En 2008, l’Alsacien franchit un pas significatif sur l’escalier de l’ambition musicale : Bau est un album orchestré, une cathédrale sonique à hauteur d’homme, avec un ensemble de cordes. T. signe avec Rooftop et Modern Love deux compositions que tout descendant de David Bowie (celui encore sensible, pas la baudruche-franfreluche) rêve de composer. Dans un monde qui écouterait son cœur, on ferait apprendre ces chansons dans les écoles.
Et puis le jeune homme disparaît des écrans radars, derrière l’écran de fumée de l’omniprésence numérique. On imagine que la vie l’a rattrapée. Qu’il faut bosser. Faire des plans, construire des édifices. On le croit perdu. On se croit abandonnés. Le temps se distend.
Mais il suffit de voir ce visuel sur lequel Thomas Joseph est de dos, debout devant son piano, comme s’il s’arrêtait là un bref instant pour égrener quelques notes en passant, avant de vaquer aux occupations du quotidien, pour comprendre qu’il n’a jamais cessé de composer.
Il suffit des premières notes de Pianolow pour raviver l’émotion.
Il suffit de laisser filer les 40 minutes du disque pour mesurer l’évolution (au-delà du nouveau changement de patronyme).
Il suffit d’une deuxième écoute pour être certain qu’il y en aura beaucoup d’autres. Exit les guitares et les orchestrations symphoniques.
Effortless : à croire que ce troisième album a été écrit sans peine, sans intention. Ironie ou intention ? Tout est ici si fluide, si évident. Un piano et des synthétiseurs vintage servent de fondation à des mélodies dressées vers le ciel comme des clochers de pierre-dentelle. Le chant qui se love au creux des mélodies fascine comme des vitraux à travers lesquels la lumière donne vie à des saynètes à la fois intimistes et universelles. Thomas Joseph chante comme un ange, mais souvent, il préfère laisser la mélodie en suspens, pour mieux laisser battre le tumulte des émotions. Les chansons s’enchaînent, entre bouleversement et douce euphorie.
On essaie de pointer les mécanismes de cette musique. On cherche avec acharnement à justifier ce qui distinguerait ce chanteur-compositeur-interprète. Mais la vérité, c’est qu’il n’y a rien de bien rationnel dans la magie qui opère.
02. Le Voir
03. Let’s Say It’s Just Because Of You And Me
04. Hi Again
05. Daf
06. Effortless
07. Brooklyn Heights
08. Lac
09. Anna II
10. Slark