C’était quand même un jour redouté par tous, depuis l’aube des temps : ce moment où Johnny allait casser sa pipe. Nous verrons comment la population française, et en particulier les adorateurs obsessionnels de Jean-Philippe Smet, réagiront au cours des prochains jours ; nous verrons si le 06 décembre se transformera en journée de deuil national, ou bien si, à l’instar de la séparation des Smiths, certains ne pourront y survivre (ce que l’on n’espère pas).
Entre Johnny et nous, disons-le, les univers divergeaient. Impossible d’écouter la moindre de ses chansons sans éprouver de l’embarras, impossible de prendre au sérieux l’idolâtrie excessive de son public acharné. Hallyday n’était ni Elvis, ni Bob Dylan, ni Hendrix, et encore moins Neil Young. Pourtant, si l’idolâtrie de beaucoup nous semblait disproportionnée, le rejet radical ne valait guère mieux. Que l’on aime ou pas sa musique (ici, vraiment non), tout le monde éprouvait un respect pour ce vieux baroudeur ayant écumé les décennies françaises sans fléchir, sans perdre de sa notoriété. Et en conservant son public, quoi qu’il fasse, quoi qu’il dise, quoi qu’il chante.
Parfois, la musique devient obsolète face au phénomène. Et Johnny, personne ne pourra nier cela, était une exception française (comme Gainsbourg ou Coluche) : qu’il laisse indifférent ou qu’il provoque des orgasmes, il n’alimentait jamais la haine, la colère ou la moquerie. Johnny était Johnny, un prénom plus qu’un nom. Quelque part, nous trouvions le phénomène aussi intriguant que chaleureux : comment un homme, incapable d’écrire la moindre parole ou une seule note de musique, a-t-il pu représenter la fierté de tout un pays ? Nous laisserons aux sociologues et aux fans Hallyday le soin de répondre à cette question, pour, quand même, reconnaître la rareté d’une telle religiosité (car les fanatiques semblaient vivre au diapason de l’idole des « jeunes »). Cela ne pardonne évidemment pas un répertoire musical franchement encrouté, pour ne pas dire proche de la torture auditive, mais cela ne permet également pas d’ausculter « le phénomène Hallyday ».
Dans le milieu rock qui nous intéresse, Johnny Hallyday restait « l’ennemi », « le chanteur le plus détesté ». Non pas humainement mais musicalement (nuance). Détesté, certes, mais avec tendresse, sans méchanceté. Parfois, des renégats tels que Dominique A. et Miossec venaient foutre le bordel en confessant un amour infaillible pour l’album Hamlet (Christophe ayant poussé l’admiration jusqu’à écrire de nombreuses paroles pour Johnny). Et lorsqu’on écoutait parler Dominique et Christophe, on comprenait que leurs mots ne pactisaient guère avec l’ironie. Ils aimaient sincèrement Johnny. Plus que les Cure et Morrissey ! Pas de quoi nous inciter à banquer un album de Johnny (fallait pas exagérer), mais juste ce qu’il fallait pour nous faire admettre que Johnny, finalement, on l’aimait bien. Comme une présence rassurante. Un organisme qui maintenait la France dans une croyance naïve mais saine, finalement communautaire. Peut-être pas un hasard, ou peut-être un signe, si Johnny se barre au moment où, d’un avis général, l’époque est sombre, très sombre…
À titre personnel, si Johnny chanteur m’a toujours (et me laissera éternellement) de marbre, Hallyday acteur m’a souvent surpris. Le comédien n’a pas toujours rencontré les bons cinéastes, il s’est parfois perdu dans des ratages homériques ou des inconséquences oubliables. D’où une filmographie incomplète, frustrante. Sauf que. Il fallait bien un Godard pour visualiser, affaiblir, transcender, toucher et regarder l’entité Hallyday.
Une seule image de Johnny : Détective de JLG, où Jean-Philippe Smet, sous le regard hyper attentionné de Godard, n’est plus l’idole ou le bouc émissaire du rock, mais un corps fragilisé qui tient debout comme il peut, vaillant, blessé, déjà malade.
Crédit photo : capture d’écran du film Détective.
A gerber votre style précieux et votre exagération.
Comment peut-on parler de torture auditive en parlant de Johnny Hallyday ?
Le pire c’est la fin de votre article « déjà malade », seriez-vous médecin en plus d’être suffisant.
Votre avis, d’ailleurs, intéresse qui?
Un peu de respect s’il vous plaît.
Merci Nachtigall pour votre commentaire, heu, très attentionné. Comme le prouve la virulence de vos mots (à défaut d’argumenter), Johnny possédait son lot de partisans comme de détracteurs. Il est clair que nous appartenons à la seconde catégorie. Mais écrire sur Johnny, n’est-ce pas déjà lui affirmer une affection sincère (et subjective) ? Le mot « malade » renvoyait au regard que posait Godard sur Hallyday dans le film Détective : un corps lourd, blessé, solitaire, comme on disait auparavant « un grand film malade » – mais vous avez sans doute mal lu l’article.
L’avis de M. Thooris m’intéresse. Au même titre que le vôtre. C’est pour cela que je suis ici.
Vous aussi peut-être, quoi que vous en pensiez.
Un peu rude l’article … qui est presque irrespectueux par rapport à un artiste qui a tenu la scène musicale pendant plus de 50 ans !!!
Étonnant d’écrire que cet article est « presque irrespectueux », quand soi-même on perd son sang-froid en publiant un second commentaire peu respectueux (qu’on ne publiera pas), lui.
« Quelque part, nous trouvions le phénomène aussi intriguant que chaleureux : comment un homme, incapable d’écrire la moindre parole ou une seule note de musique, a-t-il pu représenter la fierté de tout un pays ? »
Quelle incroyable lacune de votre part ! Jean-Philippe Smet à composé plus d’une centaine de morceaux (seul ou en duo) et a participé à l’écriture des paroles d’une grosse dizaine de chansons !
De plus, votre remarque sur la « représentation de la fierté » est complètement dénuée de pertinence. Vous déplorez le manque d’argumentation de vos lecteurs alors que vous utilisez des raccourcis réducteurs qui ne témoignent que de vos goûts personnels.
Irrespectueux envers les fans, il est indéniable que vous l’êtes.
« Impossible d’écouter la moindre de ses chansons sans éprouver de l’embarras, impossible de prendre au sérieux l’idolâtrie excessive de son public acharné. »
« Cela ne pardonne évidemment pas un répertoire musical franchement encrouté, pour ne pas dire proche de la torture auditive, mais cela ne permet également pas d’ausculter « le phénomène Hallyday ». »
Votre article manque de classe, dommage.
Ah, Johnny, cette icône visiblement intouchable.
Me suis-je bien fait comprendre ? Je reproche l’impardonable absence de documentation. Comment voulez-vous être pris au sérieux sans vous documenter ? Comment voulez-vous imposer le respect alors que votre article transpire le dédain envers ceux qui aimaient voire idolatraient un artiste ?
Si, si, on avait bien compris ! Se documenter sur Johnny, dites-vous ? Mais nous vivons tous avec l’idole depuis notre naissance ! Suffisamment pour connaître ses chansons, ses albums, ses looks, etc. C’est également pour cette raison (Johnny habitait nos vies, qu’on le veuille ou non) que cet article insistait sur le « phénomène » (indéniable, que nous respectons) pour justement ne pas trop nous attarder sur une discographie qui ne nous touche pas (avec des exceptions, certes). Et puis, pour définitivement clore ce faux débat, écrire un papier sur Johnny, c’est tout de même reconnaître, malgré nos divergences, l’importance de l’homme. Sans rancune.