Le dernier album d’Elysian Fields baptisé Ghosts of No paru en mai (via Vicious Circle) regroupe avec cohérence des ballades folk dépouillées, des titres aux couleurs blues-jazz expérimentaux et des morceaux pop-rock indé, le tout avec une approche très singulière et sur des tempos lents.
Le chant de Jennifer Charles y est posé délicatement, les mots sont exprimés avec peu de souffle, s’orientant vers le parlé chanté, dans une attitude sensuelle, langoureuse et nonchalante. Musicalement, l’univers est assez personnel même si on peut déceler des similitudes avec celui du groupe Blonde Redhead. L’autre figure du duo, Oren Bloedow, (guitare, clavier, basse et voix) livre ici des parties instrumentales dans un esprit alternatif affirmé : les suites d’accords et arrangements sont peu communs et recherchés ; les phrasés mélodiques élaborés s’entrecroisent et offrent un ensemble qui surprend agréablement l’oreille, signe d’une réelle identité musicale et artistique.
Souvent quand des musiciens traditionnels confirmés, ayant suivi un cursus standard par le biais de l’apprentissage technique du blues, du rock et du jazz, donnent leur point de vue sur le genre indé, on se retrouve face à un avis assez critique du genre : ces mecs ne savent pas jouer… Pour certains peut être mais dans sa globalité ce courant musical évite les clichés et refuse la démonstration technique. En effet, quel est l’intérêt de jouer le plus vite possible sur les gammes ou modes ? De chercher à impressionner l’auditeur ou encore de lui infliger des frissons assez désagréables ? Oui dans ce cas on peut inverser la remarque et se dire que bon nombre de virtuoses manquent de sobriété et d’intelligence dans la conception de leur musique.
Mais revenons au disque d’Elysian Fields. Cet opus de 11 morceaux s’écoute paisiblement, l’atmosphère est aérienne, onirique et également sombre. Effectivement les textes renvoient à un univers poétique complexe dans lequel Jennifer Charles évoque souvent notre connexion avec le monde animal et les autres règnes de la nature. Le disque s’ouvre avec le titre Bird In Your House et les paroles suivantes : « When a bird comes into your house is it an omen it is a curse. » Le morceau The Animals Know décrit quant à lui un état de conscience contemplatif, zen mais aussi inquiétant. Le clip étrange de la chanson Shadow Of The Living Light illustre assez bien aussi cette orientation spirituelle alternative, ce besoin de retrouver un rapport proche avec les éléments. Enfin, le visuel de la pochette renvoie à une nature sauvage et automnale : fleurs sèches (peut être toxiques) et arbres effeuillés. Ce paysage se prête bien à l’ambiance du disque : relâchée de tout élan et optimisme béats estivaux. Si beaucoup d’entre nous ne partent pas en vacances faute de moyens financiers ou simplement d’envie, on pourra donc écouter ce disque tranquillement chez soit pour accompagner une lecture ou simplement marcher dans le parc du quartier en observant hélas des pelouses tondues d’un peu trop près.
02. Rosy Path
03. The Animals Know
04. Cost of Your Soul
05. Crossrail Drive
06. Higher Power
07. Misunderstood
08. The Magician
09. Mess Of Mistakes
10. Elysian Fields
11. Shadow Of The Living Light