Benjamin Biolay / Palermo Hollywood
[Barclay / Universal]

Benjamin Biolay Palermo HollywoodLes deux précédents albums de Benjamin Biolay harnachaient le compositeur prodige à un axe de plus en plus « confessions sous les toits de Paris ». Ce n’était pas pour nous déplaire, loin de là (s’y révélait explicitement toute la passion de Biolay à l’égard des Smiths). Pourtant, Vengeance, au-delà de ses nombreuses qualités, sonnait un brin redite. De Biolay, effectivement, on espère, à chaque sortie, le dépaysement en territoires admis (la pop, la chanson, l’orchestre symphonique). D’abord car l’auteur de Trash Yéyé exprime une curiosité musicale faisant souvent défaut à la production française ; ensuite, banalement, car ce mec n’a peur de rien, à l’aise dans le maniement d’arrangements parmi les plus complexes.

Avec Palermo Hollywood, l’aventurier Biolay – défricheur et chasseur d’or – fait son comeback. Sous le soleil Buenos Aires, Benjamin malaxe Morricone, Astrud Gilberto, Goran Bregović et Jean-Claude Vannier. Il ne s’agit pourtant guère d’un voyage dépaysant, et encore moins d’un exercice de style. Car si Biolay puise certes dans les rythmes latinos, les cordes nuptiales et même… l’opéra, il reste, comme il se définit himself, « plouc et chic ». Chic : cette voix dandy survolant un mix hyper chiadé, cette moue blasée qui instaure un contrepoint avec l’énergie musicale aujourd’hui déployée, cet aspect « nomade » sirotant des drinks en compagnie des plus belles filles croisées à Palermo… Plouc : Biolay parle toujours des « fesses des filles », il boit de la 8.6, l’entrejambe féminine le fait plus kiffer qu’une chambre vue sur mer. Palermo Hollywood : un clodo classe s’invite dans les plus belles fêtes, se bourre la gueule jusqu’au blackout, drague comme un dératé, et se réveille au petit matin dans un palace aux côtés d’une argentine inconnue. Fiesta et gueule de bois.

Étrangement, loin de Paris, Biolay n’a jamais semblé aussi nostalgique de la capitale et du patrimoine culturel s’y affairant. En Argentine, le musicien regarde des films français (les titres crépitent de références : La Débandade, Ressources Humaines, Pas Sommeil –  Claire Denis ?), il écrit une Ballade Française et compose un inédit pour Claude Sautet (La Débandade, encore – moins Berri que Vincent, François, Paul et les autres). À l’instar de Nick Cave avant lui, Benjamin Biolay s’implante avec aisance dans un pays étranger, ce qui n’empêche pas la bougeotte et la mélancolie de l’expatrié.

On le sent tout de même assez heureux, l’ami Biolay, sur ce disque-ci. Foin de pensées négatives et d’amours à mort, le seul problème rencontré par Benjamin, sur Palermo Hollywood, est le suivant : tromper les heures en attendant le retour de la dulcinée. Généralement habitué au crash et au trash, Biolay dévoile une parcelle apaisée, un bronzage qui lui va bien, une ironie (souvent adressée à soi-même) pleine de malices. Oui : la sérénité transcende le répertoire Biolay… Et puis soudain, en fin d’album, le retour Rivers Cuomo de Benjamin : Pas d’ici (tube !), pop song idéale qui devrait rassurer les inconditionnels de Qu’est-ce que ça peut faire ? ou de Regarder la lumière.

Tracklist
1. Palermo Hollywood
02. Miss Miss
03. Borges Futbol Club
04. Palermo Queens
05. La Débandade
06. Ressources Humaines
07. Tendresse année zéro
08. Palermo Spleen
09. La noche ya no existe
10. Palermo Soho
11. Pas sommeil
12. Pas d’ici
13. Yokoonomatopea
14. Ballade française
Ecouter Benjamin Biolay - Palermo Hollywood

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