Elliot Maginot, de l’intimité à la notoriété ?

Elliot MaginotEn 2012, on découvrait quelques chansons d’Elliot Maginot un peu par hasard. Bien qu’enregistrées avec les moyens du bord, ces chansons laissaient déjà entrevoir l’incroyable talent du jeune homme à fleur de peau. Avec la parution de son premier album Young/Old/Everything.In.Between (en écoute ci-dessous), le Québécois est en passe de gagner un public de plus en plus large. Entre ces bluettes en solo armé de sa seule guitare sèche aux prestations sur une grande scène (comme l’illustre la vidéo), Elliot se révèle par petites touches et ne cesse de surprendre (et d’impressionner).

Crédit photo: Le petit Russe.

Nous avons eu la chance de découvrir ta musique, grâce à L’Oblique (disquaire à Montréal) qui nous avait recommandé ton premier disque autoproduit dès l’été 2012. On nous avait alors raconté une belle histoire romantique à ton sujet. Que s’est-il passé depuis ?

Beaucoup de choses ! J’ai probablement dû déménager 4 fois, je me suis coupé les cheveux, ils ont repoussé, je les ai recoupé, j’ai signé un contrat de disque, j’ai fait un disque et beaucoup de spectacles, quelques nouveaux tatouages, 2 vidéoclips ! En gros c’est ça…

Ton album parait sur le label Indica. Tu te retrouves ainsi au même catalogue que Mass Hysteria, La Rue Ketanou, Lofofora, ou Tryo (et plein d’autres dans d’autres styles encore). Peux-tu nous ce qui a motivé ton choix ?

Et bien Indica est une des plus vieilles compagnies de disques à Montréal. Je dirais que la longévité dans ce milieu est souvent un bon signe. Et ils ont une équipe et des artistes plutôt impressionnants! Comment dire non ?

Ton album s’intitule : Young/Old/Everything.In.Between. Quel sens y donnes-tu ?

Capturer tout le propos d’un disque en un seul titre est plutôt ardu. Je voulais quelque chose d’évocateur, mais vague et très ouvert en même temps. En fait je crois que depuis que j’ai commencé à faire de la musique il y a un peu plus de 3 ans, je me sentais comme un enfant égaré. Je crois que toute cette aventure musicale m’a fait vieillir dans beaucoup de sens. J’ai beaucoup changé et j’en suis encore à tenter de savoir si cela est pour le mieux. Si je m’en vais dans la bonne direction, comme individu et comme artiste… J’imagine que c’est à cela que ça fait référence: l’espèce de phase transitoire sans fin dans laquelle je me trouve depuis que tout ça a commencé.

Et pourquoi ce choix de pochette ? Il est assez bucolique, alors que les clichés intérieurs sont plus urbains. Dans quelle mesure ton environnement t’inspire-t-il ?

Encore là, je voulais une image puissante mais qui n’impose aucune idée précise dans la tête de celui qui la remarque. Une espèce d’effervescence mélancolique. La photographe, Lola Hakimian, est une amie et tout son travail m’inspire énormément ! En fait, mon environnement immédiat est une projection plutôt exact de ce que je suis. C’est souvent très chaotique alors que je sais que je fonctionne mieux et que je suis plus serein lorsque j’arrive à trouver l’équilibre, ce que j’arrive rarement à faire.

Une seule chanson est en français (Le Siècle Bruyant). Qu’est-ce qui t’a motivé ? Est-ce une voie que tu veux suivre à l’avenir ?

Je ne sais pas. Cette chanson là s’est retrouvée sur l’album parce qu’elle existait. Pas parce qu’on voulait une chanson en français à tout prix. Elle n’aurait pu ne pas s’y trouver, comme il y aurait pu en avoir d’autres en français. Si j’écris d’autres chansons en français que je considère bonne, elles se retrouveront sur les prochains albums !

On pourrait évoquer de multiples influences dans ta musique, sans qu’aucune ne paraisse évidente. Est-ce que certains artistes t’inspirent en particulier ? Faut-il voir dans ton patronyme à hommage à Elliot Smith ?

Bien qu’étant fan d’Elliot Smith, cela n’a rien à voir avec mon nom ! Il y a certaines filiations évidentes sur l’album, en tout cas pour moi, mais je préfère les garder pour moi afin de ne pas influencer l’approche des gens ! J’ai toujours été un gros fan de folk et même si l’album ne l’est pas vraiment, je crois qu’on peut entendre l’influence que cela a eu !

Tu avais réalisé tes premiers morceaux seuls. Alors, qu’elles étaient tes ambitions en t’entourant d’autres musiciens pour l’album ? Qu’ont-ils apportés à tes chansons ?

Il y a certains instruments sur l’album dont je ne peux tout simplement pas jouer (saxophone, cor français) et d’autre qui aurait donné de piètres résultats si je m’en étais chargé moi-même ! J’avais besoin de vrais musiciens pour concrétiser les idées que j’avais en tête. Et au delà de la partition, chaque musicien peut vraiment apporter une couleur distincte à la musique à laquelle il participe !

On se trompe peut-être, mais tes textes peuvent se lire souvent à plusieurs niveaux : une dimension poétique et romantique, mais aussi plus social. Est-ce qu’on a juste ?

Oui et non. Ce sont des termes tellement vagues et galvaudés. Tout est romantique et social ou presque. J’écris toujours à propos de choses que je vis, qui m’entoure ou qui m’affecte. C’est cliché mais j’essaie vraiment d’exorciser ma tristesse et ma colère à travers l’écriture. Et les plus grandes sources de tristesse et de colère viennent presque toujours des relations et de la société dans laquelle on vit. Alors j’imagine que oui, on pourrait dire  »romantique » et  »social ».

Certaines chansons étaient déjà présentes sur ton premier disque. Qu’est-ce qui t’a incité à en pousser certaines (Jepeto, Monster At War) et en laisser d’autres en l’état, comme le magnifique The Crawler ?

Et bien j’ai choisi de refaire ces chansons-là sur l’album parce qu’elles avaient quelque chose à gagner à être réarrangées. Je sentais qu’elles n’avaient pas atteint leur  »plein potentiel ». Ces deux chansons sont les seules que je jouais encore en spectacle alors je sentais qu’elles n’étaient pas encore arrivées à terme.

Certains morceaux sont uniquement interprétés avec des synthétiseurs, comme la chanson-titre, alors que semble-t-il, au départ tu composais sur une guitare acoustique. Est-ce du à une nouvelle façon de composer ?

Je compose beaucoup plus au piano qu’avant. La transposition aux synthétiseurs n’est qu’un choix d’arrangements mais c’était un désir conscient et assumé de m’éloigner de l’esthétique folk en explorant d’autres instruments.

Les morceaux s’enchaînent et tu as, manifestement, apporté une grande importance à l’ordre des morceaux. Pour toi, est-ce important d’écouter ton album dans l’ordre et en intégralité ? Comment réagis-tu à la perspective que les auditeurs « picorent » dans ton disque en écoutant seulement certaines chansons en streaming ou en mp3 ?

J’avoue que j’aime bien l’idée que les gens écoutent l’album dans son entièreté. J’ai effectivement porté une grande attention à l’ordre des chansons et je crois que l’enchaînement des morceaux est une partie intégrante de l’album mais en même temps, une fois que l’album est relâché dans la nature, ce qu’en font les gens ne te regarde plus vraiment !

Comment en es-tu venu à travailler avec Jace Lasek ? Te sens-tu proche de l’univers de The Besnard Lakes ? Qu’a-t-il apporté à tes morceaux ?

Je crois que même si nous faisons de la musique plutôt différente à beaucoup d’égard, il y a aussi beaucoup de similitudes entre nos deux univers ! Jace est vraiment un musicien et un réalisateur incroyable. Il est une référence en matière de technique mais il a aussi un instinct, un sens artistique et une ouverture d’esprit formidable. Il est très doué pour concrétiser les idées les plus saugrenues et vagues. Et il arrive toujours à trouver le petit détail sonore qui, une fois ajouté, change tout ! C’est une grande chance et un grand honneur d’avoir travaillé avec lui.

Comment présentes-tu tes chansons sur scène : seul sur le ton de la confidence ou en accentuant l’aspect épique ? A-t-on une chance de te voir en concert en France ?

Cela dépend de la formule. Je suis parfois en groupe de quatre ou cinq musiciens, parfois seul avec ma guitare et mon piano. Évidemment le spectacle en groupe et plus épique et très planant et assez fidèle à l’esprit de l’album ! J’ai un plaisir à jouer avec mon groupe, qui est constitué d’amis très chers, et je crois que cela transparaît. La version solo est plus intime et assurément plus folk (peu importe ce que cela veut dire). C’est un autre genre d’expérience musicale plus introspectif et peut-être plus exigeante pour moi mais tout aussi gratifiante. Nous comptons allez en France peut-être à l’automne alors vous verrez bien !

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