Alone… n’est plus tout seul : le nouveau single de The Cure est là et fantastique !

The Cure - AloneC’est aujourd’hui  que les fans de The Cure du monde entier ont enfin reçu l’invitation, la bonne nouvelle : Robert Smith et les siens viennent de révéler leur premier single original depuis The Perfect Boy, en août 2008, quatrième et dernier single tiré de leur album Dream 4:13. On ne va pas redire ce qu’on a déjà dit et redit, notamment dans cet article qui revenait sur l’importance de cet album à venir, Songs of A Lost World, qui déboulera sauf accident le 1er novembre mais entendre un single de The Cure… qu’on connaissait déjà, qu’on a déjà entendu joué sur scène et écouté/réécouté un bon millier de fois dans des vidéos souvent impeccables et presque plus belles que notre propre souvenir, procure une vraie émotion, ou du moins une émotion proportionnelle à l’attente fébrile qui était la nôtre.
Alone le single est-il meilleur qu’Alone… le single lancé en tournée pour la première fois le 6 octobre à Riga ? Est-il meilleur qu’Alone à Montpellier, à Sao Paulo, qu’Alone à Berlin ou à Bogota, la dernière étape de leur tournée mondiale ? Ces Alone sont déjà si nombreux, si « partout », si denses, intenses, si splendides qu’on craignait un peu que la version studio, dont on avait perçu dans le teaser révélé il y a quelques jours, que quelques dizaines de secondes d’un son plutôt métallique, soit juste… décevante.

Et elle ne l’est pas. Car Alone est peut-être le single le plus épatant, le plus émouvant et le plus excitant qu’a produit The Cure depuis au moins The End of The World (en 2004), voire depuis Pictures of You en 1990. A vrai dire, il n’y a pas eu de single aussi triste, aussi crépusculaire, aussi délibérément émouvant et profond qu’Alone dans l’histoire de The Cure depuis une éternité. Des morceaux oui, sur Disintegration, oui, ou encore Bloodflowers, mais des singles : Charlotte Sometimes, A Forest, il y a plus de quarante ans.

Alone est une cathédrale de douleur, longue et soyeuse, au texte ample et majestueux qu’il est indispensable de lire et de chantonner en entier comme on le faisait jadis, un de ces textes qui sont bons à retenir comme lorsqu’on passait des heures à les décrypter, à les ânonner avant de parvenir au stade suprême de maîtrise qui nous amenait à chanter avec, et dans le même souffle, que Robert Smith. Ce temps n’existe plus guère et par delà la chanson elle-même, l’événement nous permet finalement de renouer avec cette excitation et cette récitation/psalmodie adolescentes.

This is the end of every song that we sing
The fire burned out to ash and
The stars grown dim with tears
Cold and afraid
The ghosts of all that we’ve been
We toast, with bitter dregs, to our emptiness
And the birds falling out of our skies
And the words falling out of our minds
And here is to love, so much love
Falling out of our lives
Hopes and dreams are gone
The end of every song
And it all stops we were always sure that
We would never change and it all stops
Wе were always sure that wе
Would stay the same but it all stops
And we close our eyes to sleep
To dream a boy and girl
Who dream the world is nothing but a dream
Where did it go? Where did it go?
Broken voiced lament to call us home
This is this end of every song we sing
Where did it go? Where did it go?
Where did it go? Where did it go?
Broken voiced lament to call us home
This is the end of every song we sing alone

Il fut un temps où on apprenait les textes par cœur et où on chantait par dessus, un autre où on les recopiait à la main en imitant la police du moment. Ce temps d’avant le zapping permanent, des lyrics vidéos karaoké et des diffusions partout accessibles. Le mystère qui entoure le nouveau single de The Cure est avant tout un retour en arrière pour les fans, le merveilleux rembobinage d’une histoire commune faite de fidélité et de dévotion. Le jour où on ouvre le coffre au trésor.

On craignait pour la production, mais Alone est bien meilleur et bien plus beau que le teaser ne le laissait envisager. En un peu moins de 7 minutes, on tourne autour de cette météorite/sculpture comme d’un monolithe taillé dans la vérité même, sans parvenir à ce stade à en percer toute la symbolique. La pierre invite à réfléchir sur l’histoire du temps, à l’éternité, à l’usure comme l’introduction, qui occupe près de la moitié du titre, se déverse entière dans une prise de chant/champ qui n’a jamais été aussi attendue et aérienne. L’intro est longue mais passe comme un clin d’œil ou une vie d’homme, en un instant. la voix de Robert Smith est absolument incroyable, posée, calme, intacte, déjà détachée des affaires courantes mais aussi infiniment humaine et terrestre, chargée d’émotions mais droite et vierge. Alone est un titre somptueux, usé et frais comme le vent, désolé mais caressant, effondré mais empreint d’une force, d’une dignité, d’une bravoure presque qui invitent à redresser l’échine et la tête, qui emplissent d’une étrange fierté. Seul mais des millions réunis. Seuls mais avec ce même cœur qui bat. Il ne se passe paradoxalement pas grand chose sur le morceau, lent et peu varié, mais c’est dans cette morne plaine existentielle que se noue le défi qui attend l’artiste et son public : celui d’une réunion après plus de seize ans qui s’énonce comme… une séparation, une de ces dernières danses à la mode qui laissent deux parties aux prises avec leur amour l’un pour l’autre, un jour de grand départ. Il s’agit d’être ensemble une dernière première fois.

Alone n’est que regret, désolation, promesse d’une disparation prochaine mais il procure la sensation que cet adieu sera inoubliable, éternel et pour ainsi immortel. On ne pouvait pas rêver plus belle entrée en matière pour l’album à venir.

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