Il y a quelques temps encore, Cut Copy faisait sensation à chacune de ses publications, avec l’appui de toute la presse musicale. En presque vingt ans de carrière, les Australiens se sont bâtis une solide notoriété et une réputation d’ambianceurs invités aux quatre coins du monde pour embraser les fins de nuit en festival. Alors pourquoi Freeze, Melt a-t-il failli passer sous silence, tout comme la parution de Haiku From Zero en 2017 ?
Ah oui, c’est la magie de la dématérialisation. Tout est disponible eu quelques clics, le monde est à portée d’oreilles. Mais faut-il encore savoir que cela existe. Et comme Cut Copy publie ses albums sur sa propre structure (Cutter Records) et qu’apparemment il n’a pas pu ou trouvé pertinent de s’offrir une agence de communication en France, il est facile de passer à côté de l’information. Ô bien évidemment, on peut toujours s’inscrire à toutes les newsletters diffusées par les artistes dont on a, au moins 1 fois, apprécié la musique ou passer ses vacances à Melbourne… Plus simplement, on peut rester à l’affût pour traquer ce gros gibier (et oui, la chasse a repris ses droits) puisque le groupe n’a jamais déçu en cinq ou six albums, toujours plus profonds et résistants au temps que leurs singles et leurs nombreuses versions remixées le laisseraient croire.
On s’enthousiasme alors en constatant que, même si Cut Copy ne peut pas parcourir les routes du monde, le groupe nous offre le moyen de nous faire voyager. Loin, très loin. Haut, très haut. S’ils savent très bien emporter le public en concert, le groupe sait aussi qu’un album se doit d’être conçu avec méthode. Ainsi, la construction de Freeze, Melt est d’une redoutable efficacité, avec une introduction, une montée, un repos, et un second palier extatique.
D’abord, deux notes de synthétiseurs en boucles, démultipliées sur différentes variations, et le chant de Dan Whitford s’emparent de notre esprit par leur effet hypnotique. Ensuite, le quatuor peut nous inviter à le suivre dans son monde tout rose et moelleux. On n’a aucunement envie de résister, même si de toute évidence on va perdre pied. Ce mélange d’influences krautrock (les rythmiques rampantes), d’évidence électro-pop (les gimmicks malicieux) et d’étirements (a)temporels façon space-rock (les nappes synthétiques) est aussi efficace qu’une drogue douce dont on devient très vite dépendant. Et en ces temps d’incertitudes et de sinistrose généralisée, Freeze, Melt est une invitation à l’abandon qu’on ne peut pas décliner.