Sans même connaître Dropout Patrol, il y a au moins deux bonnes raisons pour que Sunny Hill aiguise notre curiosité.
D’abord, une pochette épurée absolument magnifique qui laissera à chacun le soin d’interpréter cette scène saisie sur l’instant à distance (le sauvetage d’une probable noyade ? un geste fraternel en fin de soirée ?). Ensuite, parce que le second album de Dropout Patrol parait sur Altin Village & Mine a qui on doit une poignée de découvertes (Young Hare, Urban Homes, PTTRNS, …) restées trop confidentielles malgré leurs qualités. D’ailleurs, on espère que le label berlinois sera plus médiatisé à l’avenir avec la signature d’un groupe comme Deerhoof. Voilà pour les indices extérieurs.
Pour ceux qui, comme nous, seraient passés à côté du premier album éponyme paru en 2012 du groupe en provenance de Leipzig, l’écoute de la chanson Feeding Ghosts (qui peut justifier à elle seule l’achat du disque) est très vivement conseillée. Pour résumer, on pourrait évoquer un Fugazi en mode acoustique, qui s’en irait sur le chemin tortueux de Slint, bien qu’en lieu et place de la vindicte de Ian MacKaye, ce soit le chant clair de Jana Sotzko qui saisisse et trouble. On pourrait alors citer une Cat Power hérissée et prête à bondir ou encore L’Altra sans les arrangements mélancoliques un jour de colère froide. Voire même Daughter écorché vif. Voilà pour les références qui permettent de cerner le sujet.
Mais au-delà de ce faisceau d’indicateurs convergents, il faut s’immerger dans ce disque dont les atours peuvent, certes, paraître austères de prime abord. Mais cette âpreté formelle se révèle fascinante, car elle montre à quel point le quatuor se concentre sur l’essentiel. Les arrangements sont minimaux autour d’une orchestration rock basique : Dropout Patrol privilégie la sincérité et la justesse. Il n’y a ici pas de place pour les enluminures superfétatoires et les poses calculées. Les morceaux sont tendus, mais cela n’empêche en rien les mélodies de s’émanciper. Mieux même : elles respirent, débarrassées de leur fardeau. Et elles nous emmènent vraiment très très loin. Une découverte marquante.