Jim Jarmusch (n’) est (pas) un cinéaste rock

Jim Jarmusch - Permanent VacationPermanent

Cinéaste mélomane, lui-même chanteur éphémère au sein des Del-Byzanteens (un album et quelques singles, dont l’ensorcelant Girl’s Imagination en 81), Jim Jarmusch n’aura jamais cessé de fuir l’encombrante étiquette « rock » qui lui colle à la peau. En fait, alors qu’il n’est qu’un simple étudiant à la NYU, Jarmusch, au moment de préparer son film de fin d’année (Permanent Vacation, 79), contourne les modes no wave (dont il fréquente pourtant certains parangons tels que James Chance ou David Byrne) pour s’en remettre au saxo désolé de John Lurie ainsi qu’à un titre vrombissant mais plutôt lointain de Earl Bostic (Up There In Orbit). Pas très à la pointe, le personnage principal, Aloysious Parker, se fringue 50’s et ne jure que par Charlie… Parker. (Encore que, selon Jarmusch, de nombreux jeunes se fringuaient de la sorte, dans le New York after punk.)

Il y a déjà, chez l’apprenti metteur en scène, une conscience des tendances et de tous les pièges qu’elles renfermeraient pour qui voudrait suivre l’air du temps : « Permanent Vacation ne me semble pas identifiable par rapport à une époque, à une tendance, la new wave, à une mode… J’ai voulu éviter ça, et tout d’abord en essayant de ne pas utiliser de musique rock dans le film. Il y a une revue (Télérama) qui a présenté Permanent Vacation comme un film new wave, un film-mode, et cela m’a beaucoup contrarié parce que c’était justement ce que j’essayais d’éviter », confiera-t-il, en 84 aux Cahiers du Cinéma, au moment de la sortie française de Stranger than Paradise.

Stranger

Jim Jarmusch - Stranger Than ParadisePlus radical encore dans son refus d’appartenir à un courant musical, Stranger than Paradise présente, en guise de trio farfelu, des petits ploucs arnaqueurs qui misent sur les courses hippiques, se refont une santé financière au poker, portent des chapeaux et des chemises vieillottes, parlent un langage bizarre (« choking the alligator ») et préfèrent Screamin’ Jay Hawkins à, mettons, les Talking Heads.

John Lurie rempile, comme acteur flegmatique et musicien à contre-courant : celui-ci enregistre le score du film sous le nom de groupe The Paradise Quartet (qui comprenait les musiciens Jill Jaffe, Eugene Moye, Mary Rowell, Kay Stern, tous orchestrés par Evan Lurie, frère de John). Loin du saxo langoureux de Permanent Vacation, la partition de Stranger than Paradise se compose de violons et contrebasses. John Lurie, en accord avec le découpage par vignettes du film, crée ici une saynète provenant à intervalle irrégulier, souvent pour conclure un plan-séquence ou bien pour accompagner la marche des personnages. L’effet est proche de l’hypnose : à l’instar de ces espaces intérieurs se répétant ad libitum, à l’instar de la durée similaire de chaque plan, le va-et-vient de cette saynète musicale donne à Stranger un côté berceuse. Il est vrai que la partition de John Lurie est placée à un très faible niveau sonore et qu’elle ne se compose que d’un leitmotiv aux accents d’Europe centrale. Rien à voir, donc, avec un quelconque cinéma new wave – à la même époque, les films Liquid Sky et Alphabet City, ouvertement hype, surfaient, eux, sur le clip et le style fashion ; mais qui se souvient aujourd’hui de leurs metteurs en scène respectifs, Slava Tsukerman et Amos Poe ?

Malgré les efforts de Jarmusch pour contourner les étiquettes, Stranger than Paradise, comme Permanent Vacation avant lui, devient un phénomène de mode. Il faut dire que le film, encore aujourd’hui, se pare d’une élégance qui le rend unique : observer les pauses de John « Willie » Lurie (quand bien même Jim s’en amuse) est un spectacle furieusement… cool.

S’y ajoute le background des deux acteurs principaux : le premier (Lurie) est fondateur des Lounge Lizards, le second (Richard Edson) a joué un temps avec Sonic Youth. Et que dire de la cousine hongroise, Eszter Balint ? Actrice de quinze ans qui officie à la Squat Theater Company (un théâtre new-yorkais qui, sitôt la nuit tombée, se transforme en salle de concert), celle-ci, après avoir œuvré dans un groupe de country nommé Rex Voto, sortira, en 1999, un premier disque sous son propre nom : Flicker, album au carrefour du folk et de la musique électronique qui rencontrera de nombreux adeptes en France. Nous retrouverons Balint en 2000 aux crédits d’un disque baptisé The Legendary Marvin Pontiac : Greatest hits, soi-disant l’album d’un musicien inconnu et redécouvert par… John Lurie ; en fait un véritable disque de Lurie et de ses habituels compagnons de route (puisque outre Eszter Balint, participent également Evan Lurie et Marc Ribot).

Tom

Jim Jarmusch - Down By LawDown by Law, troisième Jarmusch, se situe à la Nouvelle-Orléans. Mais de l’État de la Louisiane, pas question pour le cinéaste d’en décrire la faune musicale (on en voit bien plus dans un autre film américain, tourné au même moment, dans les mêmes rues : The Big Easy, polar décontracté de Jim McBride). Quelques trottoirs déserts, des maisons proches de l’abandon, un escalier, puis détour par la case prison (où les trois personnages principaux, Jack, Zack et Bob, finissent bien vite). À peine pouvons-nous apercevoir, dans la cellule voisine, les Neville Brothers.

Songe onirique, Down by Law fuit la réalité rock mais se rattrape à sa plus belle branche : le premier rôle tenu par Tom Waits (vieux pote de Jarmusch – ce dernier songea un temps à filmer l’adaptation de Franck’s Wild Years, une pièce de théâtre écrite par Tom et son épouse Kathleen Breenan, avant de décider que ce n’était pas son truc).

Jarmusch trouve ici le concept de ses prochains ouvrages, ou presque : le chanteur imprègne l’univers du film, son imagerie musicale déteint sur le projet jarmuschien. Down by Law est ainsi un véritable Tom Waits movie : Zack, DJ hobo, tire la gueule, se saoule, déambule comme un clochard, et pourrait éventuellement finir dans les bras de la prostituée rencontrée sur la pochette de l’album Rain Dogs (auquel Jarmusch emprunte les titres Jockey Full Of Bourbon et Tango Till They’re Sore).

Avec Down by Law, Jarmusch injecte du rock dans son cinéma, mais il fait mine du contraire : Roberto Benigni, du reste, tire la couverture à lui seul, et visuellement le film ne ressemble à rien de connu (polar ? Road movie ? Film de prison ? Conte de fée ? Sans doute tout cela au même moment).

Il n’empêche que : après le Tom Waits movie, Jim, en fan masqué, tournera un film d’après Neil Young (Dead Man, son chef-d’œuvre), un hommage au Wu-Tang Clan (Ghost Dog, autre sommet), une variation autour des Stratégies Obliques de Brian Eno (The Limits Of Control), avant de revenir au fondamental : l’objet guitare, vintage si possible (Only Lovers Left Alive, et son vampire musicien collectionneur).

Elvis

Mystery Train, malgré son titre, n’est pas un hommage à Elvis, pas plus qu’à Memphis (où se déroule le film). Si Jarmusch filme ici un quelconque retour aux origines du rock ‘n’ roll, alors le rock est totalement moribond, bouffé par le merchandising et l’appât du maigre gain (une histoire stupide sur le King en échange de 10 dollars).

Mystery Train s’ouvre avec la chanson éponyme (chantée par Elvis) et s’achève par sa version originelle (chantée par Junior Parker). Entre les deux, outre la très belle musique composée par John Lurie, nous trouvons un autre morceau d’Elvis (Blue Moon). Sans compter la présence de musiciens légendaires tels que Rufus Thomas (le vagabond dans la gare) et Screamin’ Jay Hawkins (le réceptionniste de l’hôtel). Il faut également citer la discussion entre Mitzuko et Jun (les deux touristes japonais) à propos des grands noms de Memphis : la première ne jure que par Elvis, le second cite Howlin’ Wolf, Carl Perkins, Jerry Lee Lewis

En démarrant son film par la plus célèbre version du titre Mystery Train, et en le concluant par l’original (beaucoup moins, voire pas du tout connu), Jarmusch insiste sur le grand mensonge de l’Amérique. Il est acquis qu’Elvis Presley n’a pas inventé le rock ‘n’roll, pas plus qu’il ne fut compositeur de ses chansons. Simplement, qui le sait vraiment, nous dit Jarmusch ? Et surtout, que pèsent des légendes telles que Junior Parker et Rufus Thomas face à l’internationale renommée d’Elvis ? Cette idée de vol bien plus que d’héritage (c’est le patron du label Sun qui confia la chanson de Junior Parker à Elvis, car il souhaitait un blanc pour l’interpréter) tracasse Jarmusch depuis Stranger than Paradise. Cinéaste civique quoi que plaçant son engagement en filigrane, Jarmusch ne pouvait mettre en scène un film se déroulant à Memphis sans retourner aux sources Sun et Stax.

Film sur le rock, Mystery Train ? Toujours pas : Jarmusch, façon Peellaert / Cohn, utilise le sujet pour en dresser un état des lieux assez mortuaire (en gros : le rock est un fantôme qui ne survit que par son exploitation commerciale). Ou comment feindre la colère face à un sujet qui motive le parcours d’une vie (à l’instar de ses enfants qui « n’aiment pas » pour ne pas avouer qu’ils adorent). Mystery Train : le plus grand film sur le rock refuse de l’être.

Ah oui, Joe Strummer (dans Mystery, il joue le rôle de Johnny, un prolo anglais au chômage)… Au journaliste Bates qui, dans Les Inrockuptibles (en 89), lui demandait s’il avait sciemment voulu ridiculiser les rockers anglais en donnant le rôle de Johnny à l’un d’entre eux, Joe Strummer, Jarmusch répondait : « Tu le trouves ridicule ? Parce que les autres se moquent de ses origines ? Alors tu commets l’erreur de trop associer Joe Strummer à son rôle… Johnny n’est pas Joe Strummer, Joe joue le rôle de Johnny qui n’est pas musicien, c’est un ouvrier. Je connaissais Joe avant d’écrire le rôle de Johnny, et je l’ai écrit pour lui. Si Joe n’avait pas été connu en tant que rocker, je lui aurais écrit le même rôle, simplement à cause de ses qualités. Il est très intense, très maussade, et il ne parle pas beaucoup, tout en étant très précis lorsqu’il le fait. C’est à la fois un gentleman et un sauvage. Je l’ai choisi pour ça. Pas pour avoir été le leader des Clash ». Blues ancestral se moquant du punk-rock ? Non, encore une fausse piste. Jarmusch n’est vraiment pas rock.

Neil & RZA

Avant de proposer à Neil Young de mettre en son les somptueuses images de Dead Man, Jarmusch, c’est une évidence, avait déjà son idée en tête. Non pas car le pré-montage du film, avant l’arrivée de Neil, détenait déjà quelques-unes des sections instrumentales du loner (Jarmusch envisageait une bande son acoustique, assez Harvest), mais parce que Dead Man (qui reste le plus grand film américain, le plus politique aussi, des vingt dernières années) est une transposition fidèle, parfaite, à la note près, des disques de Neil Young. Les thématiques et les obsessions se rejoignent : la nostalgie d’une terre pas encore colonisée, les ondes positives issues d’ancestrales croyances dépassant la capacité d’entendement du matérialisme occidental, le rapport à la nature (comme Neil Young alterne disques rock des villes et albums folk des champs, Jarmusch quitte ici le bitume pour la forêt), la marginalité assumée (l’Indien Nobody appartient à une tribu mais déambule seul, tout comme Neil Young a toujours refusé d’appartenir à une famille ou à une quelconque mouvance – cf. Woodstock)…

Cousin proche de Dead Man, Ghost Dog construit une allégeance similaire à l’égard d’un musicien, cette fois RZA et son gang Wu-Tang (pied de nez de Jim : nous le pensions arrimé au rock, il écoutait en fait du hip-hop). Les déambulations samouraï du corps gracieux de Forest Whitaker puisent effectivement dans la philosophie des moines Shaolin ayant inspiré le premier album du plus célèbre groupe de Staten Island (The 36 Chambers, l’un des plus beaux disques de la décennie 90). Pour l’occasion, RZA compose une bande originale à tomber : nu hip-hop ? Ambient rap ? Abstract beats ? On se pose encore la question…

Cinématographiquement, les enjeux sont néanmoins déviés. Dead Man et Ghost Dog se déclarent films rock ou rap par inadvertance, Neil Young et RZA constituant l’imagerie de thématiques bien plus sérieuses que le fétichisme musical : les origines de l’Amérique industrielle pour l’un, la nécessité de la passation culturelle pour l’autre. Jarmusch utilise le rock en filigrane, comme une conscience qui approuverait le propos du cinéaste et relierait l’Histoire à son pendant culturel. La musique devient le vecteur du temps qui passe.

Ce que confirme, en 97, le documentaire que consacre Jim à Neil Young & Crazy Horse (Year of the Horse ; « proudly filmed in Super 8 and 16 mm & HI-8 video », précise le générique) : la captation du présent (96) se fendille de soudains inserts extirpés des années 76 et 86. Ce n’est plus vraiment un « rockumentaire » sur Neil Young mais, pour Jarmusch, une façon de montrer l’intemporalité, voire l’immortalité de certains arts. Neil Young, par sa longévité, devient ici un passeur, une leçon à comprendre – une leçon morale qui ne se la joue pas.

En creux

Jim Jarmusch - Coffee and CigarettesBroken Flowers puis Coffee and Cigarettes semblent a priori s’éloigner de la musique (même si, dans le second, le casting comprend tout de même : Tom Waits, Iggy Pop, Jack et Meg White, RZA et GZA). D’abord car Broken suit la trajectoire limite existentielle d’un quadragénaire apathique, ensuite car Coffee, comme avant lui l’inégal Night on Earth, est un film à sketches dont la principale motivation consiste à réunir et filmer l’entourage jarmuschien (Bill, Alex, Isaach, Tom, Joie & Cinqué).

On sent pourtant, dans les non-dits de Broken Flowers, une petite nécessité mélomane : que Bill « Don » Murray, durant ses trajets en voiture, écoute du Mulatu Asastke. En fait, durant l’écriture du film, Jarmusch s’abreuvait énormément des compositions jazz de ce musicien éthiopien des années 60 et 70 (dont nous pouvons trouver des titres sur les compilations « éthiopiques ») jusqu’à se demander s’il n’y avait pas moyen d’utiliser cette musique dans Broken Flowers. Mais quel lien pouvait donc unir ce jazz hypnotique venu d’Ethiopie au voyage en terres farouchement américaines de Don ? Jarmusch eut ainsi l’idée de donner au voisin de Don, Winston, une nationalité… éthiopienne, ce qui justifierait que sur chaque compilation musicale que Winston offrirait à Don se trouverait des titres de Mulatu Asastke.

De même, pour la première fois, Jarmusch ne confie pas la musique de Broken Flowers à un compositeur précis (comme hier John Lurie, Tom Waits, Neil Young et RZA) mais sélectionne lui-même une liste de chansons afin d’accompagner le trajet de Don. Les morceaux racontent évidemment le film : Marvin Gaye (I Want You), Fauré (Pie Jesu), The Brian Jonestown Massacre (Not if You Were the Last Dandy on Earth), la pop garage des Greenhornes et le rock indus de Sleep, tous renseignent sur les incertitudes de Don, sur sa quête d’une progéniture qui n’existe peut-être pas.

Il en va également de Coffee and Cigarettes, œuvre extra musicale qui fait mine du contraire.

Pour Jarmusch, le juke-box est indissociable du bar. Cela commence par Iggy et Tom vérifiant chacun leur tour si le juke-box du lieu comporte un titre de l’autre (il n’y en a pas). Cela continue avec Jack et Meg White écoutant le titre I Feel Allright des Stooges… Surtout, à chaque sketch ou presque, une musique accompagne logiquement les discussions entre personnages.

Pourtant, dans Coffee and Cigarettes, la BOF ne se limite aucunement à une banale fonction de remplissage de l’espace sonore. En creux, le film met en scène l’évolution de la musique rock en filmant ses figures les plus décisives ou bien en les évoquant. Cela débute par l’apparition d’Iggy Pop (le papa du punk) et de Tom Waits (légende vivante unanimement respectée). C’est ensuite au tour de Steve Buscemi d’aborder le cas problématique du King Presley (qui aurait donc acheté ses chansons pour dix dollars à des virtuoses inconnus). Lorsqu’Isaach de Bankolé et Alex Descas discutent entre eux, c’est une chanson funk de Grandmaster Flash qui sort des enceintes. Steve Coogan personnifie ensuite la scène indie-rock du Manchester 80’s (dans 24 Hours Party People, il interprétait Tony Wilson). Il est logique peu après de rencontrer les White Stripes, descendants autoproclamés du blues et du garage (avec l’album Fun House des Stooges en fond sonore pour bien préciser la filiation). Nous passons enfin à la scène hip-hop représentée par son groupe le plus célèbre, le Wu-Tang Clan.

Rock ‘n’roll, funk, pop, hip-hop… Un courant musical manque à l’appel : le punk. Celui-ci est cependant bien là, dans la dédicace finale : « So long live, Joe Strummer ! ». De par son absence (l’activiste du Clash est décédé en 2002), le souvenir de Joe Strummer plane sur l’intégralité des onze sketchs, tel le fantôme d’Elvis (dans Mystery Train) débarquant à l’improviste dans une chambre d’hôtel de Memphis… (Jarmusch voulait inclure Joe dans cette anthologie café / cigarettes, d’où cet hommage au générique.)

Avec Coffee and Cigarettes puis Broken Flowers, le lien qu’entretient Jarmusch avec la musique (du moins, au cinéma) se modifie sensiblement : la généalogie rock ou la  personnalité d’un compositeur n’éveillent plus, chez Jim, un motif à fictions ; inversement, l’histoire racontée permet au cinéaste d’évoquer, dans les interlignes, son propre rapport à la musique. Etape suivante ? Questionner ce qu’il advient, aujourd’hui, des pionniers du rock.

Vintage

Et quoi de mieux pour cela que de revenir vers le principal : l’objet vintage. Normal pour un cinéaste à ce point soucieux du toucher, du parfum des choses. Il ne suffit donc pas d’écouter du rock, il faut également le voir, concrètement, en comprendre la portée historique. À la Straub / Huillet : admirer la beauté d’une guitare 1958 se fait avec allégeance et cadre à la bonne distance (Only Lovers Left Alive), une formule poétique (très Dylan époque Greenwich Village) doit s’inscrire à l’écran (Paterson), il faut expliquer les origines d’un instrument ou d’un chant (The Limits of Control)…

Amour et allégeance pour les parrains : dans Only Lovers, le vampire Adam possède un mur entièrement composé de photos représentant ses « amis » ou références. Ce panthéon est évidemment celui de Jarmusch : Nicholas Ray, Nikola Tesla, mais aussi Neil Young et Iggy Pop. Jim Jarmusch incarne dorénavant la conscience du rock, le gardien du temple, celui qui veille (mieux qu’un critique) sur sa passation générationnelle.

Aux Cahiers du Cinéma, en octobre dernier : « J’aime célébrer mes sources d’inspiration plutôt que de les cacher, ou au moins les encoder dans les films pour qu’un spectateur qui ne connaissait pas William Blake, disons un adolescent du Kansas, le découvre grâce à un de mes films. Alors, mission accomplie ! Une personne a été changée. Il y a un très beau poème de Ron Padgett (…) Il dit que si on écrit un poème à New York, les gens chics dans les dîners en parleront peut-être et que c’est très bien, mais que peut-être, quelque part dans le Kansas, une fille va lire votre poème et ouvrir grand la fenêtre pour sentir le vent dans ses cheveux (…) Si on arrive à faire ça, c’est peut-être ce qu’il y a de plus important. »

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