Tout va beaucoup trop vite. Il faut toujours être plus direct, faire plus simple pour être soi-disant être percutant et intelligible, quitte à sacrifier le propos pour exister dans le tourbillon du zapping incessant. Il faut aligner les gimmicks et les punchlines calibrés pour être gobé par le consommateur boulimique et pressé. Et s’ils n’émane pas d’un groupe doté d’une aura telle qu’il peut se permettre d’avancer en marge des canons de l’époque comme Godspeed You! Back Emperor ou Sigur Rós, bien peu d’albums peuvent se permettre de s’étirer sur une heure pleine et compter jusqu’à treize titres. Ce qui était encore la norme il y a encore quelques années est devenu un luxe.
Le geste de Mt. Wolf pour son premier album est donc à bien des égards à saluer. De plus, les trois garçons aux looks de métalleux alternent les courts intermèdes et les longues plages épiques. On ne voit pas bien quel extrait d’Aetherlight pourrait de ce fait passer sur les ondes – ou se trouver dans une playlist en streaming. Mais comme il faut quand même donner à entendre, c’est The Electric malgré ses 6 minutes et trente secondes qui fait l’objet d’une mise en clip. Apocalyptique le clip d’ailleurs.
Mais Mt. Wolf assume pleinement ces choix et fait preuve d’une personnalité bien affirmée quand bien même l’histoire du groupe est déjà tumultueuse. Au départ Alex Mitchell (batterie) et Stevie McQuinn (guitare) embarquent Kate Sproule dans l’aventure, mais dès 2013, la belle se fait la malle avant d’avoir concrétisé les espoirs suscités par les premiers singles. Le line-up fluctue quelques temps avant que Sebastian »Bassi » Fox se retrouve derrière le micro, et Mt. Wolf prend un nouvel élan. Et forcément, avec l’apport de ce chant de tête haut perchée, l’ambiance change et c’est fort logiquement que le trio est allé chercher Ken Thomas pour assurer la production de son premier album. Ce point lourd s’y connait en matière de pop-emphatique / lyrique puisqu’il déjà produit (entre autres) M83, Maps, Daughter, Suede ou encore Sigur Rós avec qui les comparaisons ne manqueront pas pour le chant comme les partitions de cordes. Aetherlight ne manque donc certainement pas de souffle ni de coffre, mais ce son sied bien aux compositions du groupe. Alors certes, le risque est grand de verser dans l’emphase et la grandiloquence et Tucana, par exemple, lorgne vers l’approche world-mystique façon Enya. On note aussi des inflexions médiévales à la Dead Can Dance. Mais ce ne sont que des détails, des encorbellements, dans une cathédrale sonore qui invite à la solennité et à la méditation, lorsqu’elle ne s’embrase pas dans la ferveur du prêche de Soteria ou de l’incandescent Dorji. Mt. Wolf joue à plein sur l’effet produit par les sautes d’humeur entre douceur et emportement dans la plus pure tradition post-rock (Hex). Ça transpire et ça chiale, mais c’est beau.