Rolling Blackouts Coastal Fever / Sideways To New Italy
[Sub Pop]

8.5 Note de l'auteur
8.5

Rolling Blackouts Coastal Fever - Sideways To New ItalyLa pop australienne a toujours eu un truc à part qui, sans la rendre forcément meilleure ou pire, l’a toujours fait se démarquer des anglais et des américains. Des premiers émois radiophoniques avec INXS et Midnight Oil aux initiations plus pointues à la lecture des grands mensuels de l’époque (The Church, The Triffids et bien évidemment The Go-Betweens), il s’est toujours passé quelque chose de particulier avec les groupes de Melbourne, Sydney ou parfois Brisbane ou Perth. Les grandes années de l’indie pop ont mis en lumière les influents Cannanes et Cat’s Miaow et même chez Sarah Records, Even As We Speak dont on reparlera très prochainement ou The Sugargliders se démarquaient nettement du « son Sarah » même si avec le recul, on peut douter qu’il ait un jour existé. Plus récemment, de défunt label brestois Beko avait mis en avant la scène actuelle australienne, celle qui gravite autour du label Osborne Again, révélant les insolents talents juvéniles des Dainis Lacey (Cool Sound), Liam Halliwell et autres frères Denton, Lachlan et le regretté Zac, pur songwriter fauché par un kyste cérébral à 20 ans à peine, laissant les formidables The Ocean Party à leur peine et leur split, en pleine ascension. C’était en 2018, date à laquelle sortait Hope Downs, premier album de Rolling Blackouts C.F. (pour Coastal Fever). On pourrait épiloguer des soirées entières, écrire des thèses sur les hasards de la vie et des rencontres dans le milieu musical qui font que Rolling Blackouts C.F. bénéficie aujourd’hui de la force de frappe d’un géant comme Sub Pop quand The Ocean Party avec lesquels la gémellité est parfois frappante (sur Falling Thunder ou The Only One que l’on jurerait écrites par Liam Halliwell) devra se contenter d’avoir connu une carrière bien plus confidentielle. Mais impossible évidemment de réduire le talent de Rolling Blackouts C.F. à une histoire de chance alors que sort leur second album, Sideways To New Italy qui, comme son ainé, se prépare à égayer de la plus belle des façons le plus bizarre des étés que l’hémisphère nord va connaitre.

Préparez-vous à ouvrir les fenêtres et à crier à la face du monde, celle de vos voisins du moins, ce plaisir condensé en 10 pop songs parfaites pour la saison, cette joie de retrouver les chaleurs sous le ciel bleu azur, celui de la pochette, celui de cette Nouvelle Italie qui renvoie aux origines des frères Russo (Tom au chant et à la guitare, Joe à la basse), les iles Eoliennes au large de la Sicile. Une histoire de famille donc, les deux autres guitaristes et chanteurs Fran Keaney et Joe White étant eux cousins, mais aussi d’amitiés masculines, ciment de tant de groupes pop même si les belles histoires ne durent parfois qu’un temps. Mais pour l’instant, ici, tout va bien. Ça se voit et ça s’entend.

C’est entendu, Rolling Blackouts C.F. n’a pas la prétention de nous faire explorer des contrées inconnues. Le terrain est balisé depuis belle lurette et Sideways To New Italy non seulement s’inscrit dans la lignée directe de son prédécesseur Hope Downs, mais aussi et surtout dans celle de tous ces beaux disques de pop intemporelle. Alors c’est certes un peu du pilotage automatique en mode Streets Of Your Town mais ça respire la joie de vivre d’un bout à l’autre de cet album haletant, entrainant, sautillant et il est clairement inutile de résister et de bouder son plaisir. C’est une fois l’été passé que l’on verra ce qu’il restera de ce disque et on constatera probablement, qu’il est bien plus profond et consistant qu’un simple coktail de saison.

C’est que le quintet, sous ses airs de gars cool avec lesquels on irait bien partager une pinte de temps en temps est avant tout une redoutable machine à écrire. Bien que créditées du nom du groupe, les chansons sont principalement l’œuvre des trois guitaristes-chanteurs qui assument leurs textes en les interprétant mais en laissant des bouts aux copains. Des chansons à plusieurs voix donc qui, parce qu’elles ne sont pas vraiment uniformes, donnent un vrai relief aux titres : à Fran Keaney la douceur pop toute cajoleuse tandis que celles de Joe White et Tom Russo sont clairement plus rugueuses, rock, voire scandées. Pas étonnant alors de retrouver ici ou là des atmosphères chorales à la Teenage Fanclub (celui d’avant le départ de Gerard Love en tout cas – The Cool Change) où ces harmonies vocales contrastées fonctionnement à la perfection et concourent pour beaucoup à la grande réussite de ce disque. Ajoutez à cela une recherche mélodique permanente, servie par une rythmique omniprésente mais surtout ces trois guitares qui se courent sans cesse les unes après les autres comme de vraies gamines, créant tour à tour des atmosphères parfois groovy (The Only One), des cavalcades qui emportent tout sur leur passage (The Second And The First et sa jumelle Cars In Space, tube irrésistible, Cameo plus rock) ou plus évocatrices de grands espaces quasi Byrdiens (Beautiful Steven, The Cool Change).

Si Sideways To New Italy semble être un disque estival, c’est surtout par un hasard de calendrier car une fois tombé dedans, il remontera aussi le moral lors de la déprime automnale, réchauffera les cœurs et les âmes au fin fond de la froideur hivernale et ne manquera pas d’accompagner le retour de la douceur printanière et des floraisons de sa pochette, pour peu qu’on puisse cette fois pleinement en profiter. S’il ne fait sans doute pas partie de ces disques qui construisent la grande histoire du rock, cette encyclopédie d’ailleurs pas toujours intéressante à laquelle on préférera souvent des petites nouvelles percutantes et fort bien troussées, il imprimera durablement les esprits d’une partie de son auditoire tant la plupart de ces chansons ont tout de classiques qui marqueront au moins l’année 2020. Un grand disque sans fard ni artifice, rempli de soleil, de bonnes vibrations et d’espoir.

Rolling Blackouts Coastal Fever – She’s There

Tracklist
01. The Second Of The First
02. Falling Thunder
03. She’s There
04. Beautiful Steven
05. The Only One
06. Cars In Space
07. Cameo
08. Not Tonight
09. Sunglasses At The Wedding
10. The Cool Change
Écouter Rolling Blackouts Coastal Fever - Sideways To New Italy

Liens
Recevez chaque vendredi à 18h un résumé de tous les articles publiés dans la semaine.

En vous abonnant vous acceptez notre Politique de confidentialité.

Écrit par
Plus d'articles de Olivier
Grand Parc / Pull Noir
[Autoproduction]
Après un premier album tout simplement intitulé Grand Parc en 2015, les...
Lire
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *