Baltimore est le nouvel Eldorado du rock indé américain. C’est la nouvelle Memphis du fun. La ville nous a donné Future Islands il y a quelques années et maintenant c’est au tour de ce combo dingo de livrer avec son premier album, The Dongo Durango (aucune idée de ce que cela veut dire), ce qui restera comme l’un des albums les plus cool, surprenants, intéressants et efficaces de l’année. Sun Club ressemble à une demie équipe de rugby après un match un peu rude (et paumé bien sûr) : ils jouent serrés, ils sont fracassés du ciboulot, libres comme le vent et ils ont l’air de se foutre d’à peu près tout. Leur musique est le plus beau et poétique bordel organisé qu’on a entendu depuis que Wavves a atteint la majorité. C’est une musique et un disque à la fois puissants, d’une énergie redoutable et en même temps arrangés avec le plus grand soin. Sun Club n’est pas à proprement parler un groupe punk mais il en prend parfois l’apparence. Ils connaissent leur latin musical et jouent de leurs instruments tout à fait correctement, comme s’ils étaient nés avec une guitare dorée dans la main. En fait, ces types semblent nés pour pratiquer le Do It Yourself, cet artisanat qui, sous couvert de jmenfoutiste et de liberté absolue, repose sur une pratique incessante et complètement maîtrisée de l’instrument.
Commencer son premier album par un morceau d’une grosse minute où des types chantent en toussant comme des lépreux et qui s’appelle Glob est une belle forme d’audace. C’est d’autant plus risqué quand ce machin se change en parfait tube pop et post-psychédélique comme Summer Feet. Les 5 gars de Sun Club font partie d’une mini secte qui ne compte qu’eux comme membres et qu’ils ont fondée il y a déjà 10 ans. Comme ils n’ont pas plus de 20 ans en 2015, cela veut dire qu’ils jouent ensemble depuis la crèche ou l’école primaire au pire. La légende veut qu’ils aient tout appris d’un batteur clochard céleste dans une vieille échoppe déserte, avant que le type ne soit dévoré par un requin dégénéré lors d’un bain de minuit arrosé. Mais le type a eu le temps de leur enseigner les 1001 secrets du rythme. Ils ont pratiqué en toute clandestinité depuis en bouffant des pizzas. Sun Club sonne comme une version allumée et 3.0 des Beach Boys. Ils connaissent toutes les règles de composition mais choisissent délibérément de les ignorer, comme vous pouvez faire quand vous pensez que vous êtes plus intelligents que tout le monde. Et c’est ce qu’ils sont à leur manière. Worm City est une chanson de vitesse sur les jeunes qui courent après leur destinée dans un trou à rats. Le rythme est quasi tribal, renforcé par des voix débiles. Cela sonne un peu comme une version américaine de Flowered Up, le jour où ils découvrent l’ecstasy, juste avant de partir au boulot et qu’ils décident de prendre 3 pilules au lieu d’une. L’album est parfois vraiment vraiment dérangeant. Par moments, la musique de Sun Club est confuse et pas toujours du meilleur goût mais il y a tellement d’excellents moment qu’on ne le remarque même pas. Carnival Dough est l’une des meilleures chansons de l’album : c’est un titre chaleureux, qui rend heureux et dégage une forme d’arrogance crâneuse. A l’écoute de ces chansons, on est épaté par l’immense sentiment de liberté qui se dégage de partout. La batterie l’emporte sur les autres instruments et donne corps à la plupart des titres. Les guitares papillonnent autour comme des abeilles en plein mois de juillet et font exactement ce qu’elles veulent. Il y a des chansons pop, des harmonies psychédéliques avec des chœurs ou du chant sophistiqué, des voix trafiquées et des sérénades afrobeat (Beauty Meat). La musique de Sun Club a un énorme potentiel régressif. Ecoutez un peu Language Juice qui est la meilleure/pire chanson de l’année : c’est la rencontre d’Animal Collective, de Deerhunter, Mike and The Mechanics et Ty Segall. A vrai dire, on pourrait vous servir n’importe quelle référence et vous diriez : « ouais, j’entends ça. » car, malgré son côté brut, ce que fait Sun Club semble provenir de chutes d’ADN venues d’un peu partout. Et c’est ce à quoi ressemble exactement la bonne musique du XXIème siècle (celle qui sera faite par des mecs nés après l’an 2000) : un melting-pot organisé par la folie furieuse et la liberté reine, une sorte d’avenue trans-courant cinglée avec juste quelques loupiotes sur les côtés pour éviter qu’on se prenne les pieds dans le tapis volant.
La couverture de l’album est organisée autour d’un masque de clown et d’un crocodile qui s’éclatent à la fête foraine. Cela nous rappelle cette couverture ancienne de Mark « Sparklehorse » Linkous. Sun Club n’est pas juste un nouveau groupe cool et virevoltant. Leurs chansons parlent, comme toutes les chansons pop, de s’effacer, de mourir, de vieillir quand on est un gosse, des filles (le très beau Dress Like Mothers), de ruptures et de dépressions. C’est 5 fois la folie et la mélancolie de feu Linkous, le Do It Yourself dans ce qu’il a de meilleur mais aussi un disque que vous pouvez passer sans honte dans un repas de mariage. Jetez une oreille à Tropicoller Lease et vous comprendrez ce qu’on veut dire. On peut danser sur ce machin jusqu’à en crever. Le Club du Soleil s’est levé et on espère qu’il ne croisera pas la lune de sitôt. 2015 est décidément une très belle année.
Baltimore is a lucky town and the new epicenter of American indie fun music. They gave us Future Islands a few years ago and now they got this remarkable 5 piece combo whose first album The Dongo Durango is probably one of the best LPs we’ve got this year. Sun Club is like a rugby team after a tough (lost) game: they are tight, bruised in their heads, free as fuck and they seem not to give a shit. Their music is the most angelic chaotic mess we’ve heard since Wavves are not teenagers anylonger. It is powerful, energetic and beautifully crafted. Sun Club is not a punk band but it could have been. They know their musical latin and how to play their parts properly. They do an excellent job producing a strange sound for the masses.
To start one’s first LP ever with people coughing/singing on a low-fi recorded song called Glob is an audacious move. It is all the more risky when you turn this thing into a post-psychedelic perfect pop song like Summer Feet. The guys from Sun Club (which is an amazing name by the way) are part of a personal sect they created something like 10 years ago. As they seem to be not much over 20, we imagine these guys are playing together since kindergarten and first have assembled around a Golden drummer from abroad. This secret guy taught them the 1001 secrets of rhythm before he was devoured by a degenerated shark from the bay and he has left them practicing alone since then eating pizzas.
Sun Club are wild guys 3.0 Beach Boys. They know the rules but overpass them, just like you do when you think you are more intelligent than anyone else. And they are somehow. Worm City is a song about speed and youth racing towards their destiny. It has a tribal rhythm enhanced by stupid vocals. It sounds like an American Flowered Up discovering ecstasy just before going to work and taking an extra pill on purpose. It it is really really disturbing. At times, Sun Club’s music is confused and not as good as that but it has so many beautiful moments we don’t even remark it. Carnival Dough is one of the best songs of the lot: it is warm, comforting and deliciously arrogant. We feel freedom drilling from everywhere here : the drums are playing the major role on most of the songs. Guitars are turning around like bees in July, doing exactly what they want from pop sounds to psychedelic motives and afrobeat serenades (Beauty Meat). Sun Club’s music has a tremendous regressive potential.
Just listen to Language Juice which is the best/worst song this year : it is part Animal Collective, part Deerhunter, part Mike and The Mechanics and part Ty Segall. We could bring whatever reference we want and you would probably say “yes, I can hear that” because, despite its raw aspects, this music seem to be made from a million pieces of fallen DNA. And that’s what music in the XXIst century is due to be: an organized frenzy melting pot, a transgender mad avenue with a few lights on so you don’t take your feet over the flying carpet.
There is a grotesque clown mask and a crocodile dancing at a fun fair on the album cover: it brings back memories from an ancient Mark Sparklehorse Linkous LP. Sun Club is not just a happy new band. Songs are talking like pop music does of fading away, aging when you are a kid, girls (the nice Dress Like Mothers), heartbreaks and breakdowns. It is 5 times Linkous’ madness and melancholy turned into a LP, Do It Yourself art at its best and a LP you could easily bring to have fun at a family wedding party. Just listen to the closing track Tropicoller Lease and you’ll know what I mean. We could dance on that very track until we die. Sun Club has risen and we wish it never meets the moon.
02. Summer Fest
03. Worm City
04. Carnival Dough
05. Beauty Meat
06. Language Juice
07. The Dongo Durango
08. Cheeba Swiftkick
09. Puppy Gumgum
10. Dress Like Mothers
11. Tropicoller Lease