Tess Parks & Anton Newcombe / I Declare Nothing
[A Record / Differ-Ant]

Tess Parks & Anton Newcombe - I Declare NothingChronique tardive pour un album que la clémence interdisait de juger à chaud. Et pour cause : avec les titres Cocaine Cat puis (surtout) le très Mazzy Star German Tangerine, l’association entre la canadienne Tess Parks et le despotique leader du Brian Jonestown Massacre brouillait les pistes : en éternel amoureux des voix féminines, Anton s’adaptait-il au timbre éraillé de sa nouvelle dame (faisant suite à un palmarès comprenant Sarabeth Tuceck pour le mini album We Are the Radio, puis Asia Argento et Soko pour le récent Musique de Film Imaginé) ? La jolie Tess rêvait-elle en secret de chanter sur une texture sonore en provenance directe de Bravery, Repetition and Noise ou Thank God for Mental Illness ? Cet avant-goût germanique annonçait-il un album façon pied de nez ?

À trop se faire à l’idée qu’Anton Newcombe, depuis une dizaine d’années maintenant, n’aime rien moins que la prise de risque et la constante remise des compteurs à zéro, la première écoute de I Declare Nothing fut plutôt déstabilisante. Car si la voix de Tess Parks provoque le frisson Nico (tine), l’inspiration d’Anton furète dans le passé. I Declare Nothing : un disque du Brian Jonestown sans la voix du chef (pourquoi pas ?) mais qui semble débarquer de 96. Chaque titre possède effectivement un aspect madeleine proustienne, mais la monotonie supplante ici le bonheur naïf de survoler un territoire que l’on connaît tout de même par cœur.

Plus grave (ou déstabilisant, c’est selon) : I Declare Nothing propose dix morceaux, tous les mêmes ! Le concept pourrait évoquer le lascif et beau Stoned & dethroned des frères Reid (dans lequel participait Hope Sandoval, pas un hasard de comparaison) ; mais s’agit-il vraiment, chez la belle et son clochard, d’un parti-pris répétitif, d’une volonté de composer une musique acétique dont le pouls intime s’approcherait dangereusement de la crise cardiaque ? Pas certain. À force d’écoutes, deux options justifient cet album fatalement décevant (premier titre entendu, German Tangerine est sans surprise le meilleur) : l’absence volontaire ou le laisser-aller.

Hypothèse haute : après un disque très personnel qui s’apparentait à une orbite au sein de la plantureuse discographie du BJM (Musique de Film Imaginé, donc), Anton respecte la volonté de Tess et refuse d’en faire trois tonnes, conscient que la voix féminine détermine l’enjeu de la collaboration. Il est également possible de n’y voir là que pause sans enjeu, amusement à la cool, fascination pour une chanteuse (fort belle) induisant pour le compositeur un nécessaire profil bas… Sincère mais léger.

Hypothèse basse : Anton ne s’est pas trop cassé la tête, décalquant certains accords de ses classiques, composant le nez dans le guidon, branleur magnifique… Rigolo mais toujours aussi léger.

Hypothèse intermédiaire (la plus probable) : Anton Newcombe se fiche complètement de crédibilité comme du moindre devoir à l’égard de son fan-club. Dans un sens, I Declare Nothing stipule que le courant punk habite toujours le plus génial emmerdeur des vingt dernières années (quitte à ce que l’auditeur n’y trouve pas son compte)…

Tracklist
01. Wehmut
02. Cocaine Cat
03. Peace Defrost
04. German Tangerine
05. Gone
06. October 2nd
07. Mama
08. Voyage de L’âme
09. Meliorist
10. Friendlies
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