Avec ses 30 minutes et 7 titres, le nouvel EP de Wu-Lu a des allures de vrai faux album. Le londonien Miles Romans-Hopcraft, y signe une collection de chansons qui ont pour thème commun l’inquiétude, le sentiment de se perdre un peu mais aussi d’apprendre à naviguer dans l’incertitude. Le premier morceau, Young Swimmer, démarre par des voix d’enfants puis prend la forme d’un magnifique spoken word que Wu-Lu confie au poète d’avant-garde Rohan Ayinde. Son accent tendu entre l’Angleterre, l’Amérique et l’Afrique, soutenu par quelques notes de piano/synthé donnent à cette entrée en matière un élan spirituel et un souffle remarquables. Daylight Song est plus classique dans le registre mi-rock, mi-hip-hop jazzy qui caractérise l’artiste et donne le ton d’un disque équilibré et plutôt engageant. Wu-Lu évolue en mode mainstream sur la jolie balade Sinner mais s’essouffle un peu par la suite. Mount Ash est plus affecté malgré une tentative de donner de l’amplitude (l’ascension du dit… mont) par l’ajout d’un crescendo de cordes. Il faut saluer toutefois la prise de risque de l’artiste qui déjoue la progression annoncée par un final particulièrement surprenant sur ce titre.
Wu-Lu alterne ainsi les titres inattendus et les livraisons qu’on pourrait qualifier de « plus commerciales » ou dans l’air du temps. On n’est pas loin finalement de préférer ces dernières comme un Blunted Strings, autre single tête de gondole, super inspiré et efficace. Last Night With You sonne presque comme du King Krule avec un travail de production impeccable, avant que Wu-Lu ne referme le bal en compagnie du nigérian et poète Caleb Femi sur le très chouette Crow’s Nest. On pense dans les meilleurs moments à une version arty et édulcorée de Gonjasufi, dans les moins bons au panculturalisme agaçant (mais néanmoins ultra-séduisante) d’un Patrice. Les intentions sont excellentes et l’exécution globalement admirable : Wu-Lu fait partie des artistes qui incarnent le mieux l’actualité des musiques multiples et indépendantes. Et puis ce n’est pas tous les jours qu’on retrouve sur un EP deux jeunes lauréats d’un (même) prix (celui de la Jeunesse Londonienne). Rien que pour ça, cet EP est hautement fréquentable.
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Wu-Lu / LOGGERHEAD