La parution simultanée d’une compilation des vétérans AMP et du nouvel album des jeunes virtuoses britanniques Brave Timbers grâce à la micro-structure grecque Sound In Silence démontre une nouvelle fois l’influence de la mondialisation sur l’artisanat européen.

Comme la trentaine de productions précédentes, ces disques réalisés par le label athénien se présentent dans une pochette carton colorée sur laquelle est collé un cliché polaroïd et comprend un CD dupliqué à 200 exemplaires.

Cela ne va certainement pas apporter un dixième de point de croissance au PIB du pays, mais ce format confidentiel (mais joli) convient bien à la démarche poursuivie, de gré ou de force, par Richard Walker et Karine Charff depuis des années, eux qui ont déjà collaboré au fil d’une longue discographie entamée en 1992 (!) avec des labels « cultes » comme Enraptured, Wurlitzer Jukebox, Darla, Ochre, … On peut aussi assurer qu’à sa façon, AMP est une figure notable de la scène ambiant britannique, ou tout du moins de celle du Bristol des années 90. D’ailleurs, les passerelles sont nombreuses entre AMP et Flying Saucer Attack ou The Third Eye Foundation comme l’atteste la présence dans le line-up de Matt Elliott et Matt Jones (Crescent, Movietone) sur deux morceaux enregistrés en live en 1995. Switched On And Live s’adresse bien évidemment aux fans hardcore de ce groupe confidentiel avec un ensemble de morceaux enregistrés sur scène avant 2003. Dans cet océan de guitares délayées sur lequel flotte le chant fantomatique et distant de la mystérieuse brune (égérie de toute cette clique), émerge un fragile îlot de toute beauté : Blind Man’s Bluff, exercice quasi acoustique guitare/voix, rare chez AMP. Les aficionados ne s’y tromperont pas et loueront immanquablement le travail d’archiviste de George Mastrokostas.

Poursuivant une filiation artistique qui abolit le temps comme les frontières, celui-ci qui œuvre lui-même sous le nom d’Absent Without Leave, réalise concomitamment Secret Hopes de Brave Timbers.

Si jusqu’alors ce projet reste confidentiel (malgré la sortie de pas moins de trois albums cette seule année !), en revanche on a déjà souvent croisé le nom de Sarah Kemp, à l’origine de ce projet solo devenu duo avec l’arrivée d’Andrew Scrogham. En effet, la multi-instrumentiste virtuose a participé en tant que violoniste à nombre de compositions de Library Tapes, Epic45, The Declining Winter, etc. Elle est aussi membre de Memory Drawings, Last Harbour et Lanterns Of The Lake. On n’est pas bien sûr que la liste soit exhaustive mais tout du moins est-elle suffisamment explicite pour circonscrire le champ d’expression de la jeune maman (c’est elle-même qui s’affiche avec sa progéniture sur les rares photos de presse qu’on a pu voir). Cette fois-ci, c’est donc la scène du Nord de l’Angleterre que Sound In Silence met à l’honneur. Enregistrées en même temps que Hope (Gizeh Records – 2016) qui a jouit d’un beau succès Outre-Manche et dont il serait le pendant confidentiel, ces sept nouvelles pièces instrumentales, entre folk ascétique et néo-classique, sont le fruit d’expérimentation entre les deux musiciens. Violon, piano et pincement de cordes de guitares s’accordent pour dresser des saynètes pastorales. Les fans des Rachel’s et ceux qui ont succombé aux charmes des compositions de Peter Broderick (avec qui Sarah Kemp a aussi collaboré) devraient chérir cette œuvre domestique.