Becca Mancari / The Greatest Part
[Captured Tracks]

7.5 Note de l'auteur
7.5

Becca Mancari - The Greatest PartDe prime abord, The Greatest Part de Becca Mancari a tout de l’album kleenex. C’est un énième recueil de chansons pop mid-tempo, vaguement shoegaze, de la gentille indie-pop typiquement américaine qui fait les belles heures des college-radios et dont Captured Tracks a fait son fond de commerce. Au mieux, on peut lui accorder une durée de vie d’une semaine sur la platine – et encore, c’est parce que la saison est aux vaches maigres.

D’ailleurs, si on lui accorde un peu de crédit et de clémence, c’est uniquement parce que le label a produit de véritables pépites – et qu’il n’a jamais fait de faute de goût majeure malgré un rythme de production effrénée. Ce ne sera pas non plus pour la posture esthétique vu qu’il n’y pas d’identité affirmée, et encore moins pour le glamour dégagé par la dame. Même sa provenance n’est pas exotique : à Nashville, la légende prétend qu’il y a 10 artistes derrière chaque porte de bars. Quant au fait que la production soit assurée par Zac Farro, le batteur de Paramore, c’est trop peu pour émoustiller l’attention. Certes, c’est un peu vache d’enfoncer les clous pour crucifier un album sans prétention… mais au moins, si on écoute ce disque, ce ne sera pas pour de mauvaises motivations.

Mais alors qu’on lui promet l’oubli plus certainement qu’une place, aussi mineure soit-elle, pour la postérité, The Greatest Part fait tomber progressivement les « a priori ». Certes, on comprend très vite qu’on ne sera pas bousculé et que Becca Mancari ne fera rien pour nous étonner. C’est un album délibérément flatteur, bienveillant et confortable. Probablement est-ce là ses principales qualités, exactement comme chez les albums de Chris Cohen (sortis également chez Captured Tracks) qui pourraient en constituer le pendant masculin.

Quand on découvre les deux singles placés en ouverture, Hunter et First Time, on a déjà l’impression de les avoir écouté depuis plus d’un quart de siècle (!!). Certes la production est millésimée 2020, comme chez l’australienne Hazel English, mais chaque chanson ou presque peut faire penser à une rengaine extraite du label Sarah Records (1987 – 1995) qu’on vénère mais dont les productions twee-pop n’étaient que le fruit d’une longue filiation déjà en son temps. Si vous appréciez une bluette comme Pretend, on vous invite à réécouter l’intégrale de Blueboy. Pour autant pour peu qu’on apprécie les madeleines, on s’en régale goulûment. C’est cette capacité à croiser insouciance et tristesse pour se loger exactement au point où la mélancolie jaillit qui fait mouche. Les chansons de Becca Mancari font décrocher un sourire qui reste figé. Une belle promesse suspendue, une main tendue qui n’attrape rien. A coup sûr, c’est I’m Sorry qui abolit la distance qui conduit jusqu’au vague à l’âme avec son roulement de batterie à contretemps et sa mélodie vocale qui peut évoquer Daughter (ou du coup Ex:Re). Judicieusement placé à sa suite, Stay With Me tente de réconforter et toute la fin de l’album reste dans cette tonalité aux contours troublés. Voilà qui remet en perspective les titres plus enjoués de la première partie de l’album.

La semaine s’est écoulée depuis longtemps, mais le disque est toujours sur la platine.

Tracklist
01. Hunter
02. First Time
03. Like This
04. Bad Feeling
05. Pretend
06. Stay True
07. Lonely Boy
08. Tear Us Apart
09. I’m Sorry
10. Stay With Me
11. Knew
12. Forgiveness
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