Impossible d’y résister : dès que trois jolies filles branchent les guitares et laissent crépiter leurs amours alternatifs 90’s, on succombe. Bien souvent, l’idylle ne dure que l’espace d’un disque ou deux ; car les filles, soucieuses d’une existence « normale », raccrochent après avoir assouvi certains fantasmes adolescents ; également car les girls bands qui veulent perdurer finissent par un peu trop se prendre au sérieux. Les classiques issus de la mouvance « nos copines font du rock » sont finalement rares : le premier Elastica, le Last Splash des Breeders, Live Through This de Hole (on ne parle évidemment pas d’artistes solos – de Patti Smith à Liz Phair, les réussites prendraient un bras).
En attendant le prochain September Girls (qui confirmera ou non l’enthousiasme électrique des débuts), les filles de Bleached s’imposent comme nos meilleures copines du moment. L’entente ne durera pas forcément, mais pour l’heure on s’imagine très bien papoter indie-rock et boire des coups en leurs compagnies. Welcome The Worms (Dead Oceans) est certes un disque de l’instant présent, voire de quelques jours (semaines ?). Un disque tout frais tout chaud, à cueillir sans se poser de questions. Une petite collection de vignettes délicieusement vintage qui, sans trop pouvoir l’expliquer, filent la pêche et boostent le moral.
Si l’on replace pourtant ce deuxième album de Bleached dans le contexte des récentes formations en « girls » (Vivian, Dum Dum, September), Welcome The Worms n’est guère destiné à faire avancer le schmilblick : grattes Pixies, voix Courtney, assise Sub Pop, cousinage Dee Dee Penny. So what ?! Jennifer et Jessie Clavin (et Micayla Grace à la basse) possèdent la fougue de la jeunesse, un besoin (éphémère) de jouer tendu et lourd (mais avec humour et distance), à l’instinct, sans craindre les inévitables comparaisons, peu soucieuses d’un mot caduque tel que « postérité ». Cette urgence, et la sincérité allant avec, permettent à Bleached de coucher sur bandes un état d’esprit teen qui ne saurait durer, une insouciance qui se sabordera d’elle-même ou bien se perdra un jour dans une quelconque soif de reconnaissance. Pour l’heure, la virginité de Bleached est une force. Également car une fraîcheur californienne enrobe ces dix compositions (on pense à la Courtney Love tendance Joan Jett de Celebrity Skin – à l’inclinaison pop de Hole, en somme). Bleached s’éclate sous les palmiers. Et en ce mois d’avril insurrectionnel, un joli sourire ensoleillé se déguste avec caresses à l’œil…
02. Trying To Lose Myself Again
03. Sleepwalking
04. Wednesday Night Melody
05. Wasted On You
06. Chemical Air
07. Sour Candy
08. Desolate Town
09. I’m All Over The Place (Mystic Mama)
10. Hollywood, We Did It All Wrong