Playlist The Cure : Les meilleures lignes de basse de Simon Gallup

Simon Gallup - The Cure 2012
Simon Gallup en 2012 via Wikimedia

« With a slightly heavy heart I am no longer a member of the Cure ! Good luck to them all », c’est par ces mots simples, émouvants et énigmatiques que Simon Gallup a mis fin à son deuxième/second mandat au sein de The Cure, groupe qu’il avait rejoint en 1979, suite au départ du bassiste fondateur Michael Dempsey, pour divergences artistiques autour des démos de Seventeen Seconds (ce nigaud!). A l’exception d’une sortie quelque peu tumultueuse (suite à une baston dans un bar avec Robert Smith autour d’une histoire de consos non réglées) entre 1982 et 1984, Simon Gallup était indissociable des meilleures années du groupe (il n’est pas encore là sur Three Imaginary Boys) et du succès considérable qu’il rencontra dans les années 80. Jouant bas comme Peter Hook, et assurant à lui tout seul le spectacle sur scène (il était le seul qui bougeait encore), Simon Gallup était devenu en live l’alter ego de Smith, une forme de reflet bondissant et animé du feu de dieu, en même temps qu’un véritable allié technique par la précision de son jeu et son énergie. Inspiré par Paul Simonon des Clash et par l’anglo-normand Jean-Jacques Burnel des Stranglers, Simon Gallup signait pour le groupe quelques lignes mémorables. A la différence toutefois de Joy Division, The Cure n’aura jamais été véritablement un groupe de basse (plus sûrement un groupe de guitares, ou de claviers) passées les premières années. C’est en effet sur les premiers albums que le son de basse est le plus imposant et le plus important. Pas étonnant dès lors que l’on retrouve dans la liste des meilleures lignes de basse de Gallup nombre d’extraits de Pornography, Faith et Seventeen Seconds.

Tandis que l’importance de Robert Smith croît, il n’est pas aisé de savoir encore aujourd’hui quelle est la contribution réelle de Gallup dans l’invention de ces quelques accords majeurs. Les démos de The Cure (assemblées en solitaire par Robert Smith) intègrent souvent les motifs de basse qui deviendront caractéristiques. Il est ainsi permis de penser que l’influence réelle de Gallup est plus mesurée qu’on ne le croit, sans qu’elle soit seulement limitée à broder sur ce qu’apporte le leader. Entre la tenue sur le final de A Forest (qu’il invente et rallonge ne sachant quoi faire d’autre) et une légère mais subtile altération sur A Strange Day, les traces de ses contributions ne manquent pas. Gallup joue également (et surtout) un rôle majeur sur scène où la place de son instrument est souvent revalorisée par rapport à celle qu’elle occupe en studio. On rappellera aussi un peu plus loin que la bassiste a livré également quelques compositions clé en mains (on ne les a pas forcément retenues ici) comme High sur Wish. Un homme à tout faire et le dernier des grognards donc après le départ de Porl/Pearl Thompson en 1993. Roger O’Donnell (24-25 ans de présence en trois segments) et Jason Cooper (26 ans, pour l’ancien My Life Story) deviennent ainsi les plus anciens musiciens de The Cure.

1. Play For Today (1980)

Sommet du jeu de basse chez The Cure et probablement sommet tout court, Play For Today n’est pas qu’une question d’intro, mais on a le sentiment que tout est gagné entre la 5ème et la 10ème seconde et ce avant même que Robert Smith n’ait commencé à chanter. La basse porte le morceau tout du long, même si elle est assez vite reléguée à l’arrière-plan. Sa place caractérise assez bien la position qu’on lui accorde dans le groupe, centrale mais rapidement discrète et sous-jacente. Elle est utilisée pour lancer les morceaux, les tenir et en structure, ce qui la différencie de l’usage qu’en fait, par exemple, Hook chez New Order.

2. A Forest (1980)

Dans les années 80, on avait une collection de plusieurs centaines de versions de A Forest et un petit jeu qui consistait à trouver celle qui durait le plus longtemps. Entre 5 et 13 ou parfois même 14 minutes, cette chanson iconique du groupe repose pas mal sur la basse qui occupe aussi tout l’espace (et presque exceptionnellement) sur le final. C’est à Gallup qu’il appartient de refermer un morceau qui n’a pas de fin. C’est lui qui place, étire, suspend la dernière note. L’histoire veut que c’est Gallup qui proposa cette fin qui n’en est pas une car personne n’arrivait techniquement à terminer A Forest. C’est sur cette minute qui se reproduit à l’infini que souvent le groupe se retire et surtout que la balade en forêt se résout. Robert ne parle plus, disparaît faute de souffle et c’est la basse qui expire.

3. Forever (1981)

Forever est un bon exemple du dialogue qu’instituent Gallup et Smith autour de leurs instruments. La ligne de basse est ici dominée tout du long et asservie par la guitare sur laquelle elle se contente de rebondir impuissante. Le titre agit en miroir à A Forest mais figure parmi les préférés des fans et à juste titre. C’est un titre qui lui aussi présente la caractéristique de pouvoir s’étirer presque sans fin et d’être utilisé pour conclure les sets. La basse chez Cure est souvent utilisé en faire-valoir. On aurait pu citer également All Cats Are Grey où on a le sentiment que c’est le synthé qui vole la vedette au bassiste.

4. Sinking (1985)

Sinking est un morceau de The Cure qui est, et ce n’est pas si fréquent, organisé autour du jeu de basse de Gallup. La mélodie tourne autour et s’y enroule, créant un effet siphon qui fait écho évidemment à la sensation de noyade et de coulé à pic qu’évoque le morceau. C’est bien joué et le chant de Smith fait le reste.

5. Primary (1981)

Difficile de ne pas saluer le travail de Gallup tout en dextérité, en vivacité répétée et en doigts sur le début du morceau. La basse est porteuse et répétitive. C’est elle qui diffuse l’énergie et la vie au morceau. Sur Primary, le jeu de Gallup évoque celui de son modèle Simonon sur le Clash. Pour les amateurs, la tablature est assez facile à lire : cela tient sur deux accords et c’est clair et sombre comme de l’eau de roche.

6. Another Journey By Train (1980)

Gallup est à la fête ici, sur un morceau qui est la face B du A Forest dont on a parlé. La basse est gracieuse, dansante, rythmique, une vraie leçon d’instrument pour ceux qui débutent. S’il n’y avait qu’une partie à retenir du travail de Gallup, sans que Smith lui vole la vedette par le chant et les textes, ce serait peut-être celle-ci. Un grand morceau sans conteste pour un immense album.

7. Jumping Someone Else ‘s Train (1979)

On pourrait presque dire la même chose de ce magnifique morceau dont le précédent est, pour ainsi dire, une longue introduction. Il y est aussi question de trains et de voyages mais Smith intervient assez tôt pour prendre le morceau à son compte. Il n’en reste pas moins que la basse fait un boulot formidable à l’arrière-plan. Gallup est agile, habile et garde jusqu’au long tunnel dans lequel s’engage le groupe au début des années 2000, un vrai dynamiteur d’espaces.

Correctif : ce titre est en réalité le dernier sur lequel évolue en studio Michael Dempsey, le premier bassiste de The Cure. Pour se faire pardonner, on vous offre en bonus l’une des chansons les plus rares de The Cure, chantée par Robert Smith un soir de 1980 en Allemagne pour l’anniversaire de Simon Gallup qui fêtait ses 20 ans ce jour là. A ma connaissance, ce titre n’a jamais refait surface. Quel beau cadeau ! 

 

8. The Last Day of Summer (2000)

Au fil du temps et finalement après la prise de pouvoir réussie et magistrale des guitares sur Wish, The Cure est devenu un groupe lent et fondamentalement chiant. Le jeu de Gallup ne fait pas exception et s’est considérablement ralenti et engraissé. Une seule exception toutefois : les grands morceaux romantiques et à rallonge, comme ce Last Day of Summer qui ne fonctionne pas si mal sur Bloodflowers malgré la boursouflure et que Gallup a amené au groupe comme un grand. La basse est pâteuse. L’ensemble est usé et abîmé mais le mouvement est touchant et sublimé par la déconfiture de Smith. Les derniers grands morceaux du groupe sont tous des instants de décomposition où l’on ne peut s’empêcher de pleurer sur ce qu’on est devenu.

9. A Strange Day (1982)

Pas certain que Gallup y soit pour grand chose, mais A Strange Day est un miracle. La basse se tient à carreaux, à l’ombre de la batterie. Elle résonne comme une caverne et grésille en menaçant son monde, avant que le jour ne s’éclaire. Tout ici est un jeu de lumières plus que de cordes. Les planètes sont alignées. Difficile de dire qu’un instrument est plus important que l’autre. Le texte est stratosphérique dès les premiers vers et Smith ne chantera plus jamais aussi bien. « Give me your eyes that I might see/ The blind man kissing my hands« . Les enregistrements live de cette époque sont insurpassables. Le morceau est joué pour la première fois sur scène le 1er mai 1982 à l’Hammersmith Odeon de Londres.

10. The Perfect Girl (1987)

Parmi les morceaux composés par Gallup, il y a Perfect Girl, morceau pas forcément bien-aimé de Kiss Me Kiss Me. A l’époque, on l’écoutait avec le plus grand sérieux à chaque fois qu’on changeait de copine en se disant que cette fois, c’était la bonne. Avec le recul, la chanson fait presque peur et la basse n’y est pour rien. On ferme les yeux et c’est une pluie de visages heureux, de baisers et de splits.

I think I’m falling
I think I’m falling in
I think I’m falling in love with you
With you

11. Fools Dance / Empty Hours (1983)

Pendant son escapade hors de The Cure, Gallup rejoint ou assemble un groupe intitulé Fools Dance. Appelé au départ The Cry, le groupe démarre en avril 1983 avant de se rebaptiser Fools Dance et de signer 2 eps et quelques morceaux épars qui seront réassemblés plus tard (en 1987, si nos souvenirs sont bons) en un album. Empty Hours est l’un de leurs morceaux les plus cools. L’influence de The Cure est évidemment très forte.

12. Avec son groupe Cry (1983)

Cadeau bonus, le groupe de Gallup The Cry et son premier concert post-Cure, en avril 1983. Le groupe change de nom (et de chanteur) assez vite. Gallup prend le chant sur une unique compo très solide comme du Duran Duran, The Ring.

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3 Comments

    1. Bien vu Marc. On savait bien qu’on allait se planter sur au moins un morceau. J’ai rectifié l’erreur et ajouté une petite cerise sur le gâteau en guise d’excuse. Une vidéo un peu rare de la chanson offerte à Robert un soir de 1980 à son copain Simon.

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