Le risque avec les coups de foudre, c’est que le quotidien les rattrape trop vite et que le temps leur fasse la peau tout aussi rapidement.
En 2014, le premier album de SOHN bouleversait les cœurs d’artichauts, pourfendait l’armure des bien-pensants : une voix de tête très haut perchée et contrite parvenait à sublimer dans un grand élan de romantisme des compositions électroniques qui recyclaient à grands coups d’effets d’autotune et de « click & cut » de vieilles scies électro-pop (pour faire crédible, on dirait synth-pop). A prendre ou à laisser.
SOHN n’a pas ravi tous les suffrages, loin s’en faut, et le beau digifile doit compter parmi l’une des références 4AD les plus fréquentes dans les bacs à soldes des supermarchés culturels. Mais ceux qui ont succombé à Tremors savent à quel point cet album opère une fascination maléfique sur leurs états d’âme.
Christopher Michael Taylor s’est réfugié dans la douceur de la Californie et cela s’entend sur Rennen, son second album publié toujours chez le label britannique et qui semble un peu moins intimiste que son prédécesseur, si on s’en fie à Hard Liquor qui pousse de quelques BPM la rythmique dubstep. De fait, SOHN semble désormais lorgner ouvertement vers le r’n’b’… Mais quand bien même l’autre single Signal donne envie de se trémousser lascivement, la mélancolie poissarde reste à fleur de peau sur Conrad. Il va falloir se plonger dans l’écoute de l’intégralité de l’album pour se faire une opinion. Mais il y a fort à parier que Rennen pourrait devenir ce plaisir coupable, cette madeleine de Proust 2.0 qu’on écoutera seul, à un volume indécent pour le voisinage, les yeux fermés et embués.
Rennen est sorti ce 13 janvier. SOHN sera en concert à La Maroquinerie le 27 février.
Photo : Phil Knott.
02. Conrad
03. Signal
04. Dead Wrong
05. Primary
06. Rennen
07. Falling
08. Proof
09. Still Waters
10. Harbour