Frog / GROG
[tapewormies]

9.2 Note de l'auteur
9.2

Frog - GrogOn ne sait pas encore si ce GROG de Frog sera la dernière belle surprise de cette année 2023 mais il a tout pour marquer les esprits. Les frères Bateman rappellent sur chaque sortie à quel point ils sont cools et indispensables, libres et… maladroits et ce nouvel album ne fait pas exception. Les anti-héros new-yorkais ne sont jamais fatigués et nous offrent ici un magnifique festival de pop rock lo-fi, assemblage de chansons bouts de ficelle qui envahissent tous les territoires connus depuis la pop bricolo, jusqu’au simili-grunge en passant par des décrochés soul et quasi Rnb (dans l’intention) qui, portés par la voix incroyable de Daniel, le chanteur, font merveille.

Ce disque est un petit trésor pour ceux qui aiment sauter du coq à l’âne. So Twisted Fate ravira les fans de Daniel Johnston. Tout y est : le banjo joueur et la voix gentiment désaccordée, les éclats de guitare et les paroles ultra-sensibles. C’est dans ce registre qu’on peut vénérer le duo et le rattacher à tout un courant DIY de la scène américaine. U R Still Mine est une balade remarquable, romantique et rendue belle par tous ses déséquilibres : Bateman se prend un instant pour Prince et virevolte ici avec une virtuosité vocale incroyable, avant que le morceau ne revienne à ses racines folk hillbilly. Frog est ainsi tous les genres à la fois. DOOM Song est juste un brouhaha façon blues psychédélique (de moins de 2 minutes), entêtant et poisseux. Il cotoie un Maybelline aérien, virtuose et chanté dans les aigus qui aurait toute sa place sur le meilleur disque de Mercury Rev ou… d’Elton John. La chanson parle d’une nana droguée qui a un accident de voiture. Ou quelque chose dans ce genre là.

On pense à Animal Collective, à Pavement mais aussi à Jonathan Richman pour la manière dont Daniel s’étonne de ces petits détails qui font l’Amérique, de cet environnement très 60s où les filles quittent les mecs avec allure puis reviennent à la maison. La musique de Frog est intense, chaleureuse et familière. Il n’y a rien de mieux que de revenir à la maison, le coeur chaud et battant après un premier rendez-vous, en entonnant le superbe New Ro, sorte d’hymne radieux à la ville de son enfance. Gone Back To Stanford est une merveille de progression qui n’est pas sans rappeler les premiers Will Oldham pour son intensité et la manière de tutoyer la justesse. Par rapport à leurs albums précédents, les frères Bateman semblent avoir étoffé leur discours et gagné en confiance. Les titres sont plus aventureux et souvent, malgré les apparences foutraques, parfaitement construits et développés. U Shud Go To Me, par exemple, fait inévitablement penser à du Pavement, période Slanted and Enchanted, mais avec un petit côté camp/cabaret en plus. « Butthole Surfers… was it worth it ?  » répète un Daniel iconoclaste et joueur, dans un leitmotiv délirant et brillant. Black on Black On Black est une curiosité aux accents rétro-disco qui finit par ressembler à un mélange du Happy de Pharrell Williams et de la groupie du pianiste en version rock indé !  Autant dire que vous n’aurez jamais entendu cela nulle part.

On ne souhaite pas multiplier les références pour le plaisir. Grog est un petit condensé de musique américaine, un joyau de plaisir, de musique joviale, d’astuce et d’inventivité. C’est le meilleur disque d’un groupe fraternel qui ne cesse de progresser et de pousser plus loin sa liberté, une leçon d’audace et de composition, un vrai manifeste pour les musiques différentes et qui s’affranchissent de toutes les restrictions. L’un des disques de l’année sans aucun doute !

Tracklist
01. Grog
02. Goes w/o Saying
03. 420!!
04. U Shud Go To Me
05. Black on Black on Black
06. DOOM Song
07. Maybelline
08. So Twisted Fate
09. Ur Still Mine
10. New Ro
11. Gone Back To Stanford
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