Gogojuice : années collège & indie rock avec les Arctic Monkeys de Normandie

Gogojuice par Charlotte RomerIl aura fallu un paquet de temps et d’années avant de se retrouver nez à nez avec le premier album de Gogojuice. Les Rouennais seront passés par plusieurs états et auront eu le temps de faire évoluer, autour de leur leader Nelson Vard et de leur batteur Hugo Van Leene, leur line-up et leur style. A quelques semaines maintenant de découvrir ce premier LP, Rewind The Afterparty, qui suit plusieurs enregistrements live et deux EPs, sans doute est-il temps de causer du talent de ce groupe longtemps divisé entre le rock “dansant” et ce qu’on pourrait qualifier de rock alternatif. On ne sait pas trop pourquoi ce premier album n’est pas venu avant mais peu importe…

Leurs derniers singles n’hésitent plus : les Gogojuice sont résolument rock… rock anglais serait-on tenté d’ajouter tant les premiers extraits du disque sonnent comme des productions britanniques des années 2000. Cela vaut peut-être plus pour Sasha’s Song qui sonne comme un mélange plutôt sympa des Libertines et de Franz Ferdinand. Ca sautille un peu, ça rebondit, ça se chante en refrain et en choeur et c’est suffisamment énergique pour ne pas emballer les grands-mères. Le texte renvoie à un contenu immature, adolescent et empli de liberté. L’american college n’est jamais très loin. “You are hard on me“, entonne le refrain, le narrateur se plaignant d’être jugé hâtivement (par celle qu’il aime ou plus généralement les autres) pour les bêtises et les conneries qu’il fait. Le titre est entraînant, ultra classique mais efficace et vivifiant.

Kids Are Not Stupid (on ne commentera pas Knock, Knock, Knock, sorti encore avant) est encore meilleur et bien plus ambitieux. Ca démarre avec la solennité et la grâce d’un bon Arctic Monkeys, avec notamment des guitares fabuleusement progressives et pleines de sagesse, avant que le morceau ne bascule à mi-chemin dans quelque chose de plus psyché-contemplatif. On pense ici, et sur la fin en particulier, au virage “pop” des fous furieux de Fat White Family, et ce n’est pas un petit compliment. Le groupe signe avec ce morceau une pièce majeure de son répertoire naissant, sur plus de six minutes. C’est dense, intense et convaincant dans la façon de marier pop et étrangeté. Il y a chez les Gogojuice, par delà leur nom, un sens du dérangement qui frappe aux oreilles et rend leur musique plus intéressante qu’elle n’y paraît.

On espère revenir, près de sa sortie, sur le LP qui est plus que prometteur et pourrait bien être, dans ce genre typiquement anglo-saxon, une des plus belles réussites françaises de l’année (voire un peu plus). Le tout s’exécute sans jamais céder à la prétention et n’abandonnant jamais le dessein d’accoucher d’une musique glorieuse et festive. Peut-être bien l’un des groupes à célébrer cette année. Le tout en provenance d’une Normandie sonique qui n’en finit pas d’épater.

Photo : Charlotte Romer pour Gogojuice

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