On aurait aimé garder Johnny Mafia pour nous et que ces types là restent indéfiniment des losers bourguignons à la noix. C’est peu ou prou ce qu’on écrivait il y a deux ans en discutant (plus qu’en critiquant) leur premier album…tout en souhaitant très très fort qu’ils rencontrent une reconnaissance critique à la hauteur de leur engagement scénique. Deux ans après, c’est fait : le bidule s’est produit et la petite bête est en train de monter très très haut, figurant dans les magazines de filles et les revues branchées comme la relève punk et trash qui tue (du cul). Johnny Mafia est en train de devenir le parrain du petit business des groupes qui font peur à Macron et qui redessinent la géographie des ploucs français. Tant mieux d’une certaine façon. Ce sont de bons clients et des types qui le méritent plus que d’autres.
Est-ce que ça change notre rapport au groupe ? On s’en tamponne comme à chaque fois. Ce n’est pas parce qu’un groupe a du succès qu’on l’aime moins. Est-ce que ça change le rapport du groupe à sa musique ? C’est là la véritable question, à laquelle répondra le groupe sur son nouvel album à paraître le 9 novembre, Princes de l’Amour. Le premier single tiré de ce 11 titres laisserait penser que rien n’a changé dans le petit monde de Johnny Mafia. Big Brawl, qui ouvre l’album, est gros, gros et gras à la fois. Bien pensé, bien mené, idéal pour un pogo entre amis, suivi d’un bon concours de gerbe chaude où se mêlent bière, nourriture pour chats et fantasmes vampiriques. Le moins qu’on puisse dire c’est que Johnny Mafia ne semble pas avoir mis de l’eau dans son cubi. Même énergie, même sens mélodique et même capacité à reproduire sur disque (le secret des Ramones) la furie déclenchée en concert. Certain ? Oui et non. Une écoute (qu’on reprendra bientôt en détail) de l’album trahit une légère évolution du son, moins crade et saturé qu’aux débuts du groupe, et une volonté de composer plus complexe et travaillé. Est-ce que le groupe y gagne ou y perd ? C’est évidemment l’éternelle question pour les amateurs de punk. A l’image d’un Wavves qui avait rénové la vitrine sans véritablement céder sur l’intention, Johnny Mafia qui est le groupe qui s’en rapproche le plus aujourd’hui pourrait bien réussir dans son entreprise subversive : professionnaliser sa formule (magique) sans céder sur le message et la manière de le cracher aux oreilles.
En attendant le verdict, on en restera là. Un disque avec un fox-terrier en couverture ne peut qu’être réussi. C’est ce qu’il faut retenir.