Ah, si seulement, nous avions le courage des oiseaux qui chantent dans le vent glacé…
Et Moinho n’en manque pas de ce courage pour se mettre en marge du tumulte de la société, pour livrer son cœur et son âme sur un album d’une profondeur vertigineuse. Celui qui fut un temps hébergé par la bienveillante structure Arbouse Recordings le temps d’un premier album (Batltika – 2012) et qui participa au beau projet Erik Satie Et Les Nouveaux Jeunes a confié sa nouvelle œuvre au label 1631 Recordings dont le tableau de chasse compte déjà des ténors du genre tels qu’Akira Kosemura, Library Tapes et Hauschka. La moins bonne nouvelle, c’est que seulement une édition digitale est prévue à ce jour, ce qui ne sert malheureusement pas le propos.
Pour son second album, le pianiste et instigateur de ce projet, Franck Marquehosse, a travaillé avec Stéphane Garin qui joue du vibraphone et des marimbas et un quatuor à cordes apportant une dimension dramatique à certaines pièces. La longue odyssée Elastikanimal, qui prête son nom à l’album, synthétise ainsi la sensibilité d’un Steve Reich et la tension que sait distiller Rachel’s. Les parties de piano solo, comme The Keys ou le poignant Fiahr, peuvent évoquer quant à elles les premières compositions de Yann Tiersen. Mais au-delà de ces références élogieuses (on pourrait aussi mentionner la filiation avec Felt ou Spaces de Nils Frahm), Moinho fait preuve d’une sensibilité qui prend le pas sur la maîtrise technique – parfaite au demeurant, mais les amateurs de « néo classique » savent bien que nombre de compositions bien exécutées peuvent se révéler absolument rébarbatives. Le Palois, les yeux fixés sur la ligne de crêtes des Pyrénées, emmènent l’auditeur en voyage, laissant à chacun la latitude pour vagabonder dans ses propres pensées, pour projeter ses doutes et ses espoirs au gré des abimes et des sommets que ses compositions esquissent dans un ample mouvement tout en souplesse.
Sous ces atours de projet artisanal, Elastikanimal est un formidable vaisseau vers l’introspection, le rêve, le lâcher prise. On ne doute pas que si cette œuvre à la fois intimiste et universelle avait reçu l’appui d’une structure comme Type ou Erased Tapes, Moinho sifflerait ses mélodies dans le creux de toutes les oreilles sensibles.
02. The Keys (5:23)
03. Elastikanimal (8:14)
04. Entre-Deux (2:14)
05. Les Lointains (4:35)
06. Le Chien Jaune (3:47)
07. Fiahr (4:59)
08. Les Ondes (3:21)
09. Cairn (5:52)