On ne va pas faire semblant d’être originaux. Paul McCartney a 80 ans et on n’a pas été invités à son goûter d’anniversaire. On aurait pu faire une playlist des meilleures chansons qu’il a écrites… au sein des Beatles ou encore s’essayer à faire un Album Idéal mais à quoi bon ? Vous voulez vraiment qu’on vous dise que oui, sa meilleure chanson est Eleanor Rigby ? Qu’on aime She’s Leaving Home à la folie ? Ou que Penny Lane est vraiment très très cool ? Voire qu’on préfère les chansons de McCartney à celle de Lennon comme si notre avis comptait vraiment ? S’agissant de Sir James Paul McCartney, le mieux est sans doute de mettre un genou à terre et de se prosterner en signe d’éternelle et universelle allégeance, plutôt que de faire semblant d’être intelligent. Les meilleures chansons de celui qui fête son 80ème anniversaire le 18 juin 2022 (oui, il est né à Liverpool, vous l’ignoriez?) figurent probablement parmi les meilleures chansons pop tout court.
Du coup, on s’est fait juste une playlist perso de titres à peine moins connus. Quand on dit « à peine moins connus » avec McCartney, c’est pas comme si on listait des faces B de K-Maro ou de Justin Bieber. On parle de titres méconnus d’un gars très très suivi par des dizaines de millions de personnes et donc méconnus de dizaines de millions de personnes tout de même. Juste des titres marrants ou sympas à écouter, à raison d’un par décade de vie.
D’une façon générale, l’idée d’être le contemporain de McCartney depuis qu’on… est né est une sensation plutôt plaisante et qui témoigne de la générosité de la vie. Savoir que ce type compose de la musique dans le même monde que nous est un privilège qui rattrape l’existence simultanée de Vladimir Poutine, Damien Abad ou Niska. C’est ainsi.
1. Junk (1970, Mc Cartney)
La chanson a été composée alors que McCartney séjournait en Inde avec les Beatles. Elle manque finir sur Abbey Road et sort finalement en 1970 sur l’album McCartney. La mélodie folk est simplissime mais très convaincante. Le texte est anti-matérialiste et repose sur une longue énumération. McCartney moderne et désintéressé.
« Buy, buy »
Says the sign in the shop window
« Why, why? »
Says the junk in the yard
2. Some People Never Know (1969, Paul Mc Cartney & Wings)
La chanson figure sur Wild Life, le premier des Wings. On est juste après la séparation des Beatles. McCartney écrit ce titre alors qu’il est en vacances à la Barbade. D’aucuns ont voulu y voir une adresse à John Lennon mais cette interprétation n’est sans doute pas juste. C’est juste une chanson parmi quelques centaines d’autres mais elle sonne bien.
3. Your Way (2001, Driving Rain)
Tirée de Driving Rain, un album généralement mal aimé (il s’est très peu vendu) mais qui avait pourtant été bien accueilli par la critique, audacieux et assez sonique, Your Way est avant tout une sublime miniature pop et une très jolie chanson d’amour.
4. Picasso’s Last Words (Drink To Me) (Band on the Run, 1973)
Le titre figure sur l’album Band on The Run, qui n’est pas le moins connu de McCartney. Il sort en 1973, l’année de la mort de Picasso. C’est une belle réflexion sur la mort, la santé, la crainte de ne plus vivre, l’amour aussi. L’album est enregistré en partie à Lagos, en Afrique. Il y a quelques tensions dans le groupe. Cette chanson est une belle respiration.
The grand old painter died last night
His paintings on the wall
Before he went he bade us well
And said goodnight to us all
Drink to me, drink to my health
You know I can’t drink any more
Drink to me, drink to my health
You know I can’t drink any more
5. Mama’s Little Girl (face B de Put It There, 1972)
La chanson est enregistrée pendant les sessions du 2ème album des Wings. Elle est anecdotique mais légère comme le vent.
6. Sweetest Little Show (1983, Pipes of Peace)
La chanson figure sur l’album Pipes of Peace. Elle a été quelques années auparavant. Son intérêt repose dans sa structure fragmentaire. Bon nombre des chansons de McCartney (et certaines de ses meilleures) reposent sur l’assemblage de segments qui n’ont rien à faire ensemble et qui se retrouvent dans le même morceau presque par hasard, reliés par un adhésif acoustique tout aussi bizarre (comme ici). La chanson est bonne parce qu’elle est comme rapiécée.
7. Temporary Secretary (1980, McCartney II)
C’est l’une des seules chansons electro-pop de McCartney, à la fois un joyau et une curiosité même si, pour l’époque, elle n’a rien de novateur. On n’attend pas du tout McCartney dans ce registre, comique et électro, et lui non plus. S’il ne fallait en garder qu’une pour justifier cette playlist, ce serait celle-ci. On dirait du Marc Bolan variétoche. C’est chouette.
8. Alligator (2013, New)
Autour des années 2012-2013, McCartney entre dans une phase d’écriture-plaisir où (enfin) dégagé de toute obligation il s’astreint à écrire plutôt rapidement et sans pression des chansons de manière artisanale. Alligator naît de ses sessions décontractées : thé sur la table, guitare, piano, McCartney se lève, prend son petit déjeuner et compose des chansons pop « comme elles viennent ». Quand c’est lui évidemment, cela donne des titres comme Alligator, petit brouillon passionnant que la technologie va affecter, étirer, déchirer en studio. Le résultat est assez stupéfiant.
9 – Décennie Bonus. 3 Legs (1971, RAM)
RAM n’est pas vraiment un album clandestin ou méconnu, c’est le moins qu’on puisse dire. Mais pour ouvrir cette neuvième décennie bonus, on voulait revenir aux sources et terminer par cette chanson blues composée avec David Spinozza presque sans y penser. 3 Legs est chouette, et le film/clip qui l’illustre aussi avec l’Écosse, Linda, les chevaux et le sourire amoureux de l’après Beatles.
McCartney a toujours réussi à faire passer les prodiges pop qu’il réalisait pour des productions simples et faciles. C’est là que réside son génie.
Crédit photo : Raphael Pour-Hashemi — MaccaLyricsRFH051121 (15 of 18), CC BY 2.0