Reprise du boulot : la hiérarchie chie selon BT93

BT93Ceux qui se souviennent de l’ambiance entrepreneuriale de la fin des années 80 et du début des années 90 pourraient trouver un certain intérêt à ce disque que la maison de disques présente un peu rapidement comme un disque-culte mais qui tombe tout de même à point nommé alors que nombre de salariés s’apprêtent à quitter leur domicile pour retrouver le chemin du travail.

D’après la légende donc (à laquelle on ne croit pas tant que ça…), BT93 aurait sévi dans le monde de l’entreprise entre 1989 et 1994. Cadre le jour, il sortait beaucoup la nuit et se transformait à son retour chez lui en auteur de chansons, régurgitant à travers ses textes le discours managérial qu’on lui assénait durant sa journée de travail ou racontant ses histoires à la façon d’un Début de Soirée lettré et cadencé. Accompagné de son fidèle clavier synthé, il livrait ainsi un album entier de chansons pépites en mode parlées-chantées qui, à quelques décennies de distance, font sourire et trembler à la fois. Retrouvées dans une pochette surprise à l’état de démos, les dites chansons auraient fait l’objet d’une restauration et avec l’accord de leur mystérieux propriétaire, à une nouvelle sortie. Bah voyons…

L’album qui sort… en 2020 chez Dragon Accel ressemble bien à une pochade du jour d’avant et on n’a pas réussi à retrouver beaucoup de traces passées du dénommé BT93 dans les années 90. Peu importe à vrai dire. Si on n’a jamais raffolé de ce genre si particulier de la chanson…. qui fait sourire, il faut avouer que BT93 a un certain talent et produit une pop industrielle et funky plutôt marrante et bien troussée. Le côté vintage est sacrément bien fichu, offrant un mélange entre des Talking Heads cheap et la livraison blanche et atone d’un Houellebecq pour Tricatel, la poésie en moins.

Sur 11 titres, il faut avouer qu’on fatigue assez vite et que tout n’est pas de premier choix. Cela peut faire danser les cadres sups en happy hour et donner envie de s’éclater en after work avant d’essayer d’enfiler quelques collègues. Les textes notamment sonnent comme des charges souvent maladroites contre le capitalisme, ses porteurs et ses effets pervers. C’est le cas de quelques pièces caricaturales comme l’Énarque. La hiérarchie en chie a le mérite d’être vraiment marrant et il y a une belle amplitude sur Chasseur de Tête. Con ou moche ? Marrant ou bof ? Notre cœur balance.

On croise le bassiste Marcello Giuliani et le batteur Patrick Goraguer, deux jazzmen émérites sur le premier morceau, et aussi le célèbre Frédéric Lo à la production sur ce même titre. Faut-il en déduire que l’origine vintage des morceaux est authentique ou au contraire qu’on a affaire ici à une entourloupe entre professionnels. La production est sophistiquée, l’ensemble estimable mais on imagine assez mal écouter cela plusieurs fois. C’est la limite de ce genre assez anecdotique. BT93 est une belle et intense curiosité, malheureusement sans hier ni lendemain.

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