Super Furry Animals / Zoom! The Best Of (1995-2016)
[PledgeMusic]

9 Note de l'auteur
9

Super Furry Animals - Zoom! The Best Of Vingt ans de carrière ou un peu plus, résumés en une petite quarantaine de morceaux, c’est ce que propose ce double CD (pledgé…) des Super Furry Animals, superbement illustré par leur designer habituel Pete Fowler. L’édition best-of, déclinée à l’envie en CD, Vinyle, tee-shirts et autres formules dont le financement participatif a le secret, s’accompagne, dans les bacs (virtuels), d’une tournée spéciale du 20ème anniversaire et de la réédition en double CD de Fuzzy Logic, leur album inaugural, resté le plus connu.

On n’aura pas l’ambition ici de rebalayer par le menu une carrière aussi riche (et qui compte 9 albums) mais tout simplement de redire qu’il faut se précipiter sur ce double CD et ne pas hésiter à l’offrir pour les fêtes. Groupe sous-estimé, après avoir été sur-estimé, le plus grand ensemble gallois de tous les temps s’offre ici sous son meilleur jour. Le double CD permet en effet de se rendre compte combien leur parcours, qui a pu paraître heurté et confus par moments, est au contraire brillant, pétillant et globalement homogène dans l’excellence. Entre l’impeccable Fuzzy Logic, qui signe leur entrée en matière tonitruante en 1996 et leur permet d’intégrer, par la petite porte, le wagon britpop, Rings Around the World, en 2001, qu’on peut tenir, encore aujourd’hui comme leur grand oeuvre, ou le plus récent Dark Days/Light Years les Super Furry Animals ne se sont jamais loupés en grand format.

Leurs chansons sont habiles, complexes et pleines de rebondissements à l’image de leurs illustrations de pochettes, elles jaillissent souvent « hors du disque » dans une démesure psychédélique qui, paradoxalement, aura fini par nuire à leur crédibilité critique. Formidable groupe de singles, la bande à Gruff Rhys aura inondé les Iles Britanniques d’improbables hits depuis The Man Dont Give A Fuck, qui termine le double album, jusqu’à des morceaux irrésistibles comme Northern Lites ou le moins connu Inaugural Trams. Il y a une telle profusion de bons morceaux ici qu’on en arrive à saturer. Le démarrage est une tuerie à lui seul avec, à l’entame, Slow Life qui est peut-être la meilleure chanson jamais composée par le groupe. Son histoire résume assez bien à elle seule les méthodes atypiques d’un groupe qui, placé sous la haute responsabilité de son chanteur compositeur, agit bien souvent également comme une vraie démocratie inégalitaire. Développée par le clavier du groupe, Cian Ciaran, Slow Life est d’abord un morceau électronique, baptisé Miami Vice, que les SFA trimballent pendant des années et n’arrivent jamais à insérer sur un album. Un peu lassé par cette affaire, Ciaran demande à ses amis d’en finir et les invitent à jammer comme des dingues pour faire accoucher le morceau de tout ce qu’il a dans le ventre. Au final, le morceau, enrichi par des cordes confiées à Sean O’Hagan, devient le titre le plus impressionnant de Phantom Power qu’il referme (alors qu’il figurait à l’ouverture sur les envois promotionnels). Oeuvre collective, mi-électronique, mi-pop, psychédélique aux accents Beatlesiens, Slow Life est un monument qui évoque Big Star et le rock californien. Sur le fond et la forme, c’est un morceau emblématique de la maestria des SFA à leur meilleur, comme il s’en présente tant sur ce double disque. Les Super Furry Animals excellent lorsqu’il s’agit d’aller vite mais ne sont pas malhabiles quand il faut ralentir le tempo.

Bing Bong, le dernier single en date, est splendide et beaucoup vendraient leur âme au diable pour avoir écrit une des compositions de leur album… en gallois sorti en 2000. Représenté ici par le charmant Organ Yn Dy Geg, Mwng est un album intéressant car il met en scène (puisqu’on y comprend rien) le caractère strictement organique et instinctif des mélodies du groupe. Le texte agit souvent comme un instrument à part entière, un instrument capricieux et qui vient semer le désordre dans un assemblage lui-même secoué de vagues contradictoires. La musique des Super Furry Animals aura poussé dans ses retranchements les vieilles leçons de Brian Wilson sur la composition musicale séquentielle. Si le jam reste la base de tout ici, chaque chanson semble être le résultat d’un assemblage savant, digne de la constitution d’un grand vin ou de la créature de Frankenstein. Le tout est d’autant plus impressionnant qu’on n’a jamais tout à fait l’impression d’être confronté à un grand n’importe quoi. Chaque album a sa tonalité, sa ténacité et sa tenue en bouche. On peut trouver parfois que les SFA en font trop. C’est le cas de Guerrilla, sorti en 1999 sur Creation, qui écoeure dans il part dans tous les sens. L’album fonctionne comme un vrai juke box, sautant de la pop à l’acid, du rock au quasi metal, à un rythme indécent et auquel l’oreille humaine ne peut pas s’habituer. Mais comment résister à Night Vision ? Comment reculer devant Do or Die ? En regroupant la quasi totalité des grands singles du groupe, et en y associant quelques curiosités, Zoom, le nom porté par ce best of remarquable, nous ramène à la question qu’on se posait déjà à l’époque de Radiator : est-ce que ce groupe virtuose est un groupe d’albums ou un groupe de singles ? Est-ce qu’on peut vraiment aimer toute cette crème de la crème sur la durée d’un album entier ou est-ce qu’il n’est pas préférable de la fréquenter à petites doses ?

A vrai dire, on a jamais été capable de répondre. Sans qu’on identifie exactement pourquoi, la pratique fait qu’on écoute assez peu les albums des SFA de A à Z mais qu’on tuerait père et mère pour défendre leurs immenses qualités aux yeux de leurs détracteurs. Les Super Furry Animals, et cela fait partie de leurs immenses qualités, sont un groupe qui nous aura tenu pendant 20 ans en appétit et dans l’irrésolution. Un groupe bouillant, en perpétuelle effervescence, un groupe incandescent et aussi difficile à cerner qu’une nuit d’amour. Le secret des Gallois est peut-être là : ils sont insaisissables et plus jeunes que tous les autres. The Beach Boys contrariés de notre génération….

Super Furry Animals – Receptacle for the Respectable

Super Furry Animals – (Drawing) Rings Around the World

Tracklist
CD1
01. Slow Life
02.(Drawing) Rings Around The World
03. Bing Bong
04. Organ Yn Dy Geg
05. Run-Away
06. Northern Lites
07. Inaugural Trams
08. Demons
09. Ice Hockey Hair
10. Juxtapozed With U
11. The Gift That Keeps Giving
12. The International Language Of Screaming
13. If You Don’t Want Me To Destroy You
14. Fire In My Heart
15. Run! Christian, Run!
16. The Piccolo Snare
17. Zoom!

CD2
01. Night Vision
02. God! Show Me Magic
03. Hello Sunshine
04. Hermann ♥’s Pauline
05. Patience
06. Do Or Die
07. YsbeidiauHeulog
08. Show Your Hand
09. Something 4 The Weekend
10. Smokin’
11. The Citizen’s Band
12. It’s Not The End Of The World?
13. Play It Cool
14. Golden Retriever
15. Lazer Beam
16. Receptacle For The Respectable
17. Hometown Unicorn
18. Mt.
19. Mountain People
20. The Man Don’t Give A Fuck

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