The William Loveday Intention / The New And Improved Bob Dylan
[Damaged Goods Records]

8.9 Note de l'auteur
8.9

The William Loveday Intention - The New And Improved Bob DylanCela faisait une éternité qu’on avait pas pris un tel plaisir à écouter du Bob Dylan. Avec le temps, la joie de la découverte s’est émoussée et on s’était lassé de la voix et du reste. C’était une aberration en soi de ne plus écouter de tels morceaux mais il y a les groupes dont on reconnaît l’immense talent et la portée et ceux qu’on écoute tous les jours. Les deux ne vont pas toujours ensemble. C’était avant de découvrir ce New And Improved Bob Dylan, délivré par The William Loveday Intention. On avait déjà signalé la qualité du dernier album de ce nouveau groupe qui sert de prête nom aux agissements de Billy Childish, l’un des songwriters les plus précieux et atypiques d’Angleterre. La sortie de ce disque essentiellement constitué de reprises de Dylan s’accompagne de la sortie d’un autre album, Will There Ever Be A Day That You’re Hung Like A Thief?, dont on reparlera peut-être et qui constitue son complément parfait. Billy Childish ne s’est jamais présenté comme un fan absolu de Dylan. « Just Bob curious« , déclarait-il il y a peu. Et quelle curiosité !

Le chant de Childish essaie subtilement de mimer celui de Dylan dans ses intonations et sa manière de souligner les nasales. Pour le reste, c’est bien à des reprises originales mais « à la manière de » qu’on a affaire ici. Et avec un brio, une énergie, une tenue incroyables. The William Loveday Intention fait feu de tout bois pour vivifier des titres qui, à l’image de la formidable entrée en matière Visions of Johanna, ne font pas tous partie des plus connus du répertoire de Bob Dylan. On ne peut pas en dire autant de Ballad of Hollis Brown, l’un des morceaux les plus sombres et réputés de The Times they are a-changin’. On pense aux Murder Ballads de Nick Cave et à ces cycles sudistes tragiques. Ici, Hollis Brown, fermier pauvre du Dakota, finira par se suicider faute de pouvoir nourrir sa tribu, après avoir abattu sa femme et ses cinq enfants. La version du William Loveday Intention est parfaite de sobriété, répétitive comme du The Fall et surtout à peine secouée sur le final.

Le groupe (qui comprend le fils de Childish à la guitare) est étincelant et se surpasse sur It’s All Over Now Baby Blue (1965), avant d’aller se frotter brillamment au monument Like A Rolling Stone. Apporter quelque chose de neuf et d’intéressant à un titre qui a dû faire l’objet de deux millions de reprises depuis sa création est un défi que le groupe relève en sept minutes impressionnantes et réellement extraordinaires. Sur le plus tardif Blind Willie Mc Tell (chanson enregistrée en 1983 mais intégrée à un album en 1991), le William Loveday Intention propose une ambiance plus bluesy, à base d’harmonica, mais tout aussi fascinante par sa capacité à capter l’intensité et la résonance si particulière du thème originel emprunté au standard St James Infirmary. Pour les amateurs, Mark Knopfler était à la douze cordes sur la version de Bob Dylan. Lay some Flowers On My Grave est d’ailleurs l’un des seuls morceaux (à notre connaissance) qui ne soit pas de Dylan mais de Mc Tell.

 L’antichanson d’amour, She Belongs To Me, dédiée à Joan Baez, est magnifique et pleine d’ironie et de tendresse. Childish referme d’ailleurs l’album avec une jolie version du Oh Sister que Dylan partageait avec la chanteuse américaine sur Desire en 1976. D’une intelligence remarquable sur l’exécution et la construction de la sélection, ce New and Improved Bob Dylan, au titre en forme de clin d’oeil, n’est pas loin de réussir son coup et de nous faire voir sous un oeil nouveau tous ces titres.

Sans les malmener, ni vraiment les moderner et dans une forme de respect irrespectueux, The William Loveday Intention leur rend un hommage fidèle, inspiré et vivifiant qui est ce qu’on pouvait souhaiter de mieux à l’oeuvre de Dylan. Difficile de parler de génie quand on parle d’un « simple » exercice de reprises, mais déclencher un tel frisson de plaisir avec des chansons si objectivement démodées et souvent vieilles de cinquante ans tient du prodige. Pour les amateurs d’histoire de la musique, ce disque est un must.

Tracklist
01. Visions of Johanna
02. Ballad of Hollis Brown
03. It’s All Over Now Baby Blue
04. Like A Rolling Stone
05. One More Cup of Coffee
06. Blind Willie Mc Tell
07. Positively 4th Street
08. Leopard Skin Pill Box Hat
09. She Belongs To Me
10. If Loving Is Believing
11. Lay Some Flowers On My Grave
12. Oh Sister
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