Auteur d’un premier album de hip-hop très remarqué, le texan Chris Conde s’est fait connaître au moins autant pour sa figure provocante de rappeur queer aux dimensions peu orthodoxes que pour sa musique. Ancien drogué et alcoolique profond, fils d’une famille de militaires, Conde en est à cinq années d’abstinence qui lui ont permis de remettre un peu d’ordre dans sa vie et de développer un hip-hop rédempteur d’une remarquable originalité.
Producteur doué, fin parolier et surtout chanteur musicien capable de faire bouger les lignes d’un hip-hop ouvert au rock comme au Rnb, l’homme mérite le détour et autre chose que la curiosité manifeste que déclenche son personnage. Growing Up Gay parle de la différence sexuelle mais aussi d’un itinéraire trash décrit avec sensibilité et humour. C’est un album combatif et novateur, équilibré et passionnant qui fait de son auteur l’une des découvertes les plus marquantes et intéressantes de l’année. Chris Conde est un homme déchiré, en pleine reconstruction, l’un de ces artistes survivants et qui prospèrent dans la marge que l’Amérique aime chérir et châtier à la fois.
Les gens en France ne vous connaissent pas encore. Est-ce que vous pourriez vous présenter rapidement ?
Oui, salut, je suis un rappeur, chanteur, musicien et producteur qui habite à San Antonio, au Texas, pour le moment. Je suis avant tout un artiste. Il se trouve que le hip-hop est mon mode d’expression, le vecteur par lequel je passe ma vie au crible et par lequel j’ai choisi de communiquer en direction du monde.
En France, on aime bien définir les gens par leurs origines sociales. Vous venez de quel milieu ?
Mes parents étaient militaires tous les deux. Ils ont divorcé et se sont remis avec d’autres personnes qui étaient également dans l’armée. J’ai donc grandi dans un environnement et une culture stricts et disciplinés. Ma demi-soeur la plus âgée du côté de mon père est aussi gay. J’ai deux autres demi-soeurs de ce côté là, une plus vieille et une autre toute jeune. J’ai un frère authentique qui est aussi musicien et produit de la musique techno, de la transe. Nous sommes d’origine immigrée. Je suis à moitié Lituanien, à moitié Mexicain. Je peux dire que si mes parents ne comprennent pas beaucoup ce que je fais et sont assez conservateurs, nous avons réussi à nous entendre à peu près correctement. Mes errements et mes choix ont plombé notre relation mais comme je suis sobre depuis 5 ans, cela a contribué à améliorer les choses. J’ai eu l’occasion de réparer pas mal de choses qui avaient été abîmées par ma conduite.
J’ai lu que vous aviez pas mal voyagé étant plus jeune… Quand êtes-vous arrivé au Texas ? Quels ont été vos premiers contacts avec le Lone Star State ?
Mon père était dans l’Armée de l’Air en service actif. Quand j’avais quatre ans, nous avons emmenagé au South Dakota. Deux ans plus tard, nous étions à Washington DC. Trois ans plus loin, nous sommes allés à Guam pour deux ans. De là, nous avons bougé une année au Kansas, puis deux en Floride. Après une année là-bas, mon frère et moi sommes allés retrouver mon père et ma belle-mère à Izmir en Turquie. J’avais 13 ans. Nous avons fréquenté l’école internationale là-bas là-bas. J’ai appris la langue. C’était incroyable. Ca m’a vraiment marqué. Pendant cette période, j’ai voyagé une semaine en Egypte et une autre en Allemagne pour une semaine aussi. Puis nous avons déménagé à Okinawa, au Japon. C’est là que j’ai fait la majeure partie de mes études et j’ai adoré ça. Ensuite, je suis revenu à Annapolis, au Maryland, et j’ai passé un peu de temps à la fac où j’ai étudié le cinéma et la photographie, avant d’abandonner. J’ai fini par déménager au Texas il y a dix ans car je sentais que je n’avais plus rien d’autre à faire dans le Maryland, même si j’avais commencé là-bas à écrire du hip-hop en compagnie du producteur de trance, Casey Keyworth aka Breakfast qui était avant chez Flashover Recordings, le label de Ferry Corsten. Cela fait dix ans que je suis à San Antonio et que j’y ai planté mes racines, après tant et tant de voyages. Mais maintenant je suis prêt. Prêt à prendre la route à nouveau et à retraverser le monde entier s’il le faut pour donner des concerts.
Vous vous définissez sur ce premier album comme un rappeur gay, un chanteur queer, etc. Nous ne sommes pas forcément habitués en France à des revendications aussi claires en matière d’expression artistique. Parler du point de vue racial ou sexuel…. Est-ce que cette caractéristique définit vraiment votre art et jusqu’à quel point ?
Mon identité sexuelle ne définit pas entièrement ce que je fais. Si je me définis comme rappeur gay, c’est bien pour revendiquer l’importance de la visibilité à donner aux queers, aux LGBTQs dans la culture américaine, et évidemment dans le hip-hop encore plus. Il y a des gens aux Etats-Unis qui en tuent d’autres par qu’ils sont gays ou trans. Au Texas, un employeur peut licencier quelqu’un tout à fait légalement parce qu’il est gay. Je me revendique rappeur gay parce que je veux détruire ce qui fait qu’on considère parfois encore les gays comme des sous-hommes. Nous sommes présents dans toutes les formes d’art et de culture. Nous sommes dans le rap, le football américain, le soccer, nous sommes peintres, danseurs, réalisateurs, des maris, des femmes, des chefs, des skateboarders, des journalistes. Et ainsi à l’infini.
Pour moi, le disque sonne plus comme l’évocation d’un parcours personnel que comme l’expression d’un gay en tant que tel. C’est Chris Conde qui chante et s’exprime, et pas le parcours d’un ex-junky, gay-queer je ne sais quoi. L’homme avant la cause ?
Oui, vous avez complètement raison. C’est un album très personnel. Si j’évoque certains aspects de mon identité queer, cela ne suffit pas à résumer qui je suis. Je ne me réduis pas à ça mais si c’est important et que ça représente quelque chose, ici, maintenant, aux Etats-Unis. Il y a un contexte qu’on ne peut pas ignorer, cette culture machiste qui est celle du hip-hop. Je voulais affirmer et démontrer en actes que les gays sont des rappeurs aussi efficaces que les rappeurs hétéros. Mais oui, mon album est un voyage, le récit d’un voyage qui ne se résume pas à montrer une seule face de moi-même.
C’est sûrement une question bête mais vous ne pensez pas que de nombreuses personnes vont se détourner de votre musique parce que vous êtes un type déviant qui portez ce drapeau arc-en-ciel de façon si voyante ?
Bien sûr ! Des gens vont m’ignorer pour cette seule raison et tant mieux. C’est bien ainsi mais il y aura autant de gens qui vont l’écouter pour cette même raison, parce que j’aurai empoigné ce même drapeau et que j’aurai crié bien haut « je suis une pédale bizarre et queer qui fait du rap, et vous? »
Parlons un peu de votre vie. Vous chantez ça mais n’en dites pas forcément beaucoup : il y a eu beaucoup de souffrances dans votre vie. Il y a eu l’alcool, la drogue, l’autodestruction…. D’où est-ce que cela vient ? De l’enfance, du fait d’être gay et de se sentir coupable de l’être ?
J’ai certainement bu parce que j’avais ce problème d’homophobie qui me minait. On m’a appris à considérer que j’avais un gros problème et que c’était mal d’être un gay. Je n’arrivais pas à comprendre pourquoi Dieu m’avait créé comme quelque chose de mauvais à ce point. Cela m’a mis en colère et j’ai conservé toute cette colère à l’intérieur de moi. J’ai été maltraité pendant quelques années pendant que j’étais gamin et lorsque j’étais un jeune adolescent, un type de l’armée m’a violé. J’ai traversé un épisode dépressif et je n’ai pas su me débarrasser de ça parce que je l’ai réprimé et je ne savais pas à qui et comment en parler. J’avais honte. Je me suis réfugié dans la religion et la foi mais cette foi était contraire à ce qui se produisait en moi et qui m’amenait à devenir gay. La religion m’interdisait d’exprimer ce que je ressentais. Je ne pouvais pas sortir avec des hommes, avoir des dates, et encore moins baiser avec quelqu’un. A partir d’un moment, la religion a cessé de fonctionner pour moi. La magie qui allait avec ce nouveau système de croyance s’est dissipée et je me suis mis à prendre de la drogue et à boire comme un trou. C’était si puissant qu’il m’était impossible d’arrêter et de me détourner de tout ça. Au plus bas (ou au plus haut), je prenais du crystal meth et je m’enfilais une bouteille de whisky par jour au minimum. Un matin, je me suis réveillé et j’ai demandé à l’aide. Je suis sobre depuis ce jour-là. Le 6 juin 2014.
A quel moment avez-vous réalisé que vous étiez différent des autres ? Pas seulement réalisé que vous étiez gay mais aussi un artiste et quelqu’un qui a des dispositions particulières pour souffrir et devenir accro ?
J’ai toujours su que j’étais différent. Petit, je faisais du zéro main à vélo et je fermais les yeux rien que pour voir jusqu’où je pouvais aller avant de me rétamer la tronche. A l’école primaire, je jouais à sauter du toit avec mes amis. Le jeu consistait à trouver des toits assez hauts pour en sauter. Ah ah, ça me semble fou maintenant mais j’ai toujours voulu vivre à fond les choses et mourir jeune et brutalement. J’ai toujours été à la recherche de moyens pour changer la manière dont je me sentais intérieurement…
Je ne veux pas vous lancer dans quelque chose d’impudique mais est-ce que vous avez eu peur en descendant si bas ? Est-ce que vous avez eu peur de mourir ?
Tout le monde a peur de mourir un jour ou l’autre dans sa vie. Je pense que c’est cette peur de la peur qui m’a maintenu en vie pendant un moment. Je dois ma vie à cette peur. Et puis je ne voulais pas faire de peine à ma mère car dans un sens je me disais qu’elle s’en voudrait s’il m’arrivait quelque chose. Je ne voulais pas la laisser avec le fardeau de ma disparition à porter. Chaque jour était semé de souffrance, de ténèbres et de douleur durant toute mon adolescence. J’avais ce sentiment permanent de dégoût qui montait du fait d’avoir été utilisé, depuis ma petite enfance, jusqu’à ce traumatisme adolescent, aux abus sexuels. Tout cela s’était transformé en une forme de longue agonie que je sentais peser sur moi, sur mes épaules. J’ai été écrasé par ça longtemps et je n’arrivais pas à m’en dégager. J’ai écrit de la poésie à un moment au collège et au lycée, puis je me suis mis à rapper et à écrire des textes de hip-hop. C’est ce qui m’a sauvé la vie. Et puis j’ai découvert la drogue et l’alcool. Ils m’ont offert une solution acceptable pour continuer à vivre pendant une longue période. La drogue et l’alcool.
J’ai visionné la vidéo du concert récent que vous avez donné à Tusla. C’est sacrément violent. Evoluer à un tel niveau d’engagement personnel, torse nu, presque à poil. C’est radical. Est-ce que cela vous permet de vous affirmer ? Ca a un pouvoir cathartique ? D’aucuns pourraient considerer que c’est une forme de violence que vous vous imposez à vous-même…. Un spectacle presque dégradant. Comment est-ce que vous expliquez votre état de conscience ou d’inconscience à travers ce genre de concert ?
Ce concert là était un peu différent de ceux que je donne habituellement. J’avais préparé un set à partir de mes chansons les plus bruyantes et sauvages car je savais que ce public là souhaiterait quelque chose de brutal et de destructeur. La plupart de mes shows intègrent cette dimension (je termine nu le plus souvent) mais la performance à Tulsa était à un degré autre. Et oui, j’ai éprouvé une forme de libération à faire cela. Je suis un artiste nouveau, peu connu, que les gens sont en train de découvrir. Il y avait dans cette salle une énergie dont je ressentais toute la puissance et dont j’identifiais la source de manière cathartique comme étant cette même énergie qui alimente ma manière d’écrire et de composer les chansons.
J’ai interviewé récemment Jean-Louis Costes un performeur français très connu pour ses excès sur scène. Il me disait que ses performances physiques étaient en partie préparées et en partie improvisées, que ces moments libéraient souvent des choses inattendues, en provenance d’endroits insoupçonnés. Vous êtes d’accord avec ça ? Est-ce qu’être sur scène vous rend heureux ?
Je suis très heureux sur scène. Ma musique est souvent dissonante, le son distordu mais l’idée générale que je communique est une idée d’espoir. Quel que soit le trajet ou le voyage que je raconte, j’ai survécu les abus, la drogue, la dépendance. On peut en revenir, traverser cela, même si cela implique de demander secours. Je termine mon set par Dividing Lines et je cause souvent ainsi au public : « si vous avez besoin d’aide, demandez de l’aide. Il n’y a aucune honte à vivre une journée de plus. Aucune honte à se sentir triste. Tout se dépasse. Tous les obstacles se dépassent. »
Est-ce que vous aimeriez proposer des spectacles plus “classiques” ? Un groupe normal. Des choristes. Je ne sais pas : vous avez un potential RnB. Vous pourriez devenir plus sévère et strict et passer à la télé !!!
Ah ah ! J’adore le RnB. J’ai fait des tas de choses déjà et encore maintenant. J’ai eu un groupe rap folk où je jouais du banjo et de l’harmonica, j’ai rappé et chanté en trio avec des choristes. J’ai joué à trois avec un batteur et un trompettiste. Ce qui compte pour moi pour l’instant c’est de rester un performeur engagé et qui impressionne. Je veux créer un échange avec le public et même si ça n’est que moi en train d’appuyer sur mon macbook et qui rappe au visage des gens : il faut garder cette capacité à interagir. Pour être franc, j’adorerais monter un spectacle à la façon du Cirque du Soleil, ahah, mais en attendant, il est plus probable que vous me retrouviez tout seul face à vous !
Quand est-ce que vous avez découvert le hip-hop ?
Lorsque je vivais à DC, j’écoutais une station de rap la nuit sur mon baladeur Sony. C’était en 1994. J’écoutais Busta Rhymes, Missy Elliott, Timbaland. Magoo est arrive quelques années plus tard. Je regardais les clips sur BET et MTV. J’étais obsédé par le côté étrange et futuriste de cette musique et c’est ce qui m’a attire. Bone Thugs-N-Harmony m’a fait le même effet. Bizzy Bone en particulier, sa modestie technique et sa voix angélique me fascinaient.
Quelles sont vos influences musicales ?
Marilyn Manson, Nine Inch Nails, Skinny Puppy, the Indigo Girls, Lauryn Hilll, The Fugees, Bone thugs-n-Harmony, Missy Elliott, Busta Rhymes. Eminem a eu son importance pour moi. J’aime des choses aussi différentes que George Winston et… Schubert. Je chantais dans un choeur classique au lycée et j’ai chanté un grand nombre de vieilles pieces classiques qui avaient des harmonies complètement dingues. J’aime le metal aussi, Metallica et des trucs prog-metal comme Tool. En ce moment, je suis fou d’un groupe français qui s’appelle Alcest et qui vient de Bagnols-sur-Cèze. J’écoute pas mal de metal atmosphérique.
Est-ce que vous aviez une idée precise pour ce premier album ? On a le sentiment que c’est assez réfléchi avec 19 plages, des interludes. Le LP est très fourni mais ne donne pas cette impression qu’on a avec les premiers albums parfois quand l’artiste essaie de tout dire en même temps. C’est imposant mais maîtrisé. Comment vous avez bâti l’album ?
Je vais être honnête : j’ai réalisé que je tenais un album quand je me suis posé pour établir la track list. A ce moment là, j’avais neuf titres. C’était en 2016 ou quelque chose comme ça. Il me semblait que la musique avait une coherence mais j’abordais tellement de themes différents que j’avais l’impression que le résultat manquait de cohesion. J’ai appelé mon amie Angel Marcloid de Fire-Toolz qui est un de mes collaborateurs de longue date, de l’époque où je vivais à Annapolis. Elle m’a envoyé des morceaux et a travaillé sur la post-production de l’album. Elle a fait un travail formidable pour remplir les blancs et lier les choses entre ells, pour amener de la continuité entre les morceaux.
Quelle est votre implication personnelle dans les beats et les mélodies ? Vous jouez d’un instrument ou est-ce que tout est composé ordinateur ? Comment est-ce que vous travaillez ?
Mon premier instrument, c’est l’alto. J’ai joué pendant deux ans à l’école. Et puis j’ai appris seul à jouer de la guitare, de la basse, du piano, de la batterie et du banjo. Généralement je démarre en composant sur Garageband. C’est un bon outil pour faire émerger les idées. Ensuite, quand j’entre en studio, je peux rejouer ce que j’ai compose sur garageband dans protools, voire même, si le son est assez bon, utilizer directement le fichier garageband. Tous les interludes, Open Your Heart, Get Free et Coffee ont été produits sur garageband à partir de mon iphone ! Hé oui. J’utilise garageband sur mon téléphone depuis des années. J’ai produit des beats et des musiques pour des publicités qui sont passes à la télé ainsi. Croyez moi si vous voulez…
Avec qui est-ce que vous travaillez ?
Je travaille généralement avec un petit groupe d’amis proches qui m’aident pour l’enregistrement et savent le son que je recharge. Ici, j’ai enregistré avec un ami, un MC qui s’appelle D.R.O. C’est l’un des rappeurs et des producteurs les plus talentueux que j’ai jamais rencontrés. Il a bossé sur mon album et sur mon prochain EP.
Comment naissent vos morceaux ?
Ca varie pas mal. Parfois j’ai une phrase qui me trotte dans la tête ou j’entends un beat, une progression de cordes. La plupart du temps, je me mets à rapper en mode impro par dessus un beat. Je fonctionne par monosyllables, je cherche un chemin, une mélodie vocale qui sonne bien jusqu’à ce que les mots et les phrases s’inventent d’elles-mêmes. C’est pour moi comme si je me mettais à jouer de la batterie par dessus un beat enregistré. Une rythmique verbal qui peu à peu prend sens et forme. Je ne sais pas si c’est comprehensible mais c’est comme cela que je le ressens.
Vous vous débrouillez question punchlines. Est-ce que c’est quelque chose que vous appréciez chez les autres artistes ?
Si je suis bon pour les punchlines ? Oui, je crois. J’aime ça quand c’est vraiment intelligent, plein d’esprit et drôle. Oui, carrément. Mais pas tout le temps, tu sais. C’est comme aimer le rap égocentrique comme ASAP Rocky ou même Kendrick, qui a quelques chansons dans ce genre. C’est un registre d’expression qui peut être bien mais qui ne reflète qu’une partie de notre ego et de ce qu’on est.
Ta musique est à la fois désespérée et en même temps pleine d’espoir. C’est ce qui te rend intéressant. Il y a de la lumière. Le morceau Dividing Lines renvoie à cela. Est-ce que tu es plus heureux aujourd’hui qu’hier ?
Oui, je suis clairement mieux et plus heureux depuis que je suis sobre. J’ai le sentiment d’avoir trouvé un but à ma vie en tant que personne. Je suis persuadé que chacun d’entre nous est sur Terre pour faire quelque chose de précis, être au service des autres, s’entraider, être bon. Partager ses expériences, ses forces, ses ambitions, procurer de l’espoir, s’extraire des traquenards physiques, mentaux ou spirituels dans lesquels on tombe. En ce qui me concerne, je suis cette voie à travers la musique : incarner cet espoir.
Le texte et la musique de la chanson Ferris Wheel sont réellement impressionnants. Comment as-tu composé ce morceau ?
Je voulais rendre le sentiment de malaise et la profonde noirceur qui vient lorsqu’on chasse le dragon. Rendre le besoin qu’on a, absolu, de se piquer à nouveau. Et en même temps essayer de modifier le rapport qu’on a en prenant de la drogue. Ce sentiment d’angoisse qui vient avec l’action de s’injecter quelque chose qui justement modifie la manière dont on se sent. J’ai écrit les paroles très vite. En à peine 20 minutes. La chanson repose sur un instrumental qui était déjà sorti sur l’album de Angel Marcloid il y a quelques années. J’adorais cette chanson et j’avais l’impression que les paroles correspondaient parfaitement à la violence de la musique.
Qu’est-ce qui vous rend le plus fier sur cet album ? Est-ce le fait de l’avoir tout simplement enregistré et de pouvoir en parler ? Qu’est-ce que vous attendez des réactions du public ?
Je suis fier de mon honnêteté. De ne pas avoir menti sur quoi que ce soit. J’ai l’impression d’avoir exposé ce que j’avais d’obscur en moi et à l’inverse aussi ce que j’ai de lumineux. Parce que c’est ce qui fait de nous des humains. Nous avons le don d’être tout ça. Pour des tas de raisons, le monde a eu tendance à nous enseigner qu’on était ou l’un ou l’autre, bon ou mauvais mais nous sommes bien un mélange de ces deux choses. J’attends du public qu’ils comprennent cette dualité, cette dichotomie entre ombre et lumière. Et que peut-être ainsi il trouverait leur voie vers l’espoir et la vérité. Et puis je veux qu’ils soient distraits. Je veux que les gens s’agitent sur mes chansons et qu’ils s’amusent avec elle. Qu’ils prennent du plaisir.
J’ai écrit dans la critique de l’album que votre flow me rappelait un peu celui d’Eminem par moment. Si l’on considère qu’il n’est pas réputé pour son amour de gays, est-ce que c’est une comparaison qui vous semble… provocante ? Ou est-ce que vous la recevez comme un compliment ? Quels sont vos MCs de référence pour le chant ?
Eminem a eu une grande importance pour moi. Je ne raffole pas de ces travaux récents, disons de ces dix dernières années. Ca manque de profondeur. Est-ce qu’on pourrait avoir une seule chanson qui ne serait ni homophobe, ni misogyne ? J’aime Bizzy Bone. Kendrick Lamar. J. Cole fait des trucs bien aussi. L’un des rappeurs que je préfère et que j’ai découvert récemment s’appelle Ceschi. Il tourne depuis longtemps et est assez connu dans le milieu underground. Son dernier album Sad, Fat Luck est l’un des trucs les plus émouvants que j’ai entendu ces cinq dernières années, que ce soit dans le rap ou ailleurs et j’inclus le folk, le punk et le hip-hop.
Votre album est du reste un peu plus qu’un album de hip-hop. Il y a du Rnb, du punk et aussi une pointe d’esprit soul. Vous aimez cette idée de mêler les genres ? Vous pourriez jouer avec un orchestre ou un groupe ?
J’aime qu’il y ait plusieurs couches de son sur cet album, plusieurs genres. Je n’aime pas que le hip-hop. J’aime toutes les musiques. Je voulais injecter ce que je préfère et que j’ai pris au meilleur de tous les genres que j’écoute, tout en ne perdant pas en cohérence et en unité. Bien sûr que ça me botterait de jouer avec un orchestre. Et oui, vous me verrez sûrement avec un groupe un jour.
Quel est le programme maintenant ? Vous êtes prêt à tourner en Europe ?
Je dois renouveler mon passeport et après ça, c’est parti. L’Europe me manque. Je suis assez excité à l’idée de revenir en France et en Europe en tant qu’adulte. Je joue beaucoup en ce moment aux Etats-Unis, notamment avec des concerts qui arrivent à New York et j’espère monter quelque chose d’ici la fin de l’année, une tournée dans le sud Est des Etats Unis.
Vous avez parlé longuement de votre sobriété. Est-ce que vous vous considérez toujours « sur le fil » ou est-ce que vous êtes suffisamment solide pour dire que la musique occupe désormais la place principale dans votre existence et pour de bon ?
Je suis sobre depuis cinq ans et je suis plutôt à l’aise pour en parler. Je ne pense plus à picoler ou à prendre de la drogue, du tout. Même quand je sors et que je me produis en concert, cela ne me traverse même plus l’esprit. Lorsque ça se produit, je me souviens rapidement de ce qui se passe quand je bois et croyez moi, c’est vraiment la chose au monde que je souhaite le moins.
Quels sont vos goûts musicaux du moment ? Qu’est-ce que vous écoutez avec votre copain ?
Beaucoup de black metal et de metal. Alcest, j’en ai parlé. Russian Circles. J’adore aussi le post-rock avec des groups comme Explosions in the Sky et Mono. J’aime Emma Ruth Rundle, une de mes chanteuses favorites. Chelsea Wolfe, superbe, très éthérée et atmosphérique, dark. Ces musiques me font du bien. Mon petit ami Bubba et moi partageons les mêmes goûts musicaux. On adore Ceschi tous les deux. C’est grâce à lui que nous nous sommes rencontrés. Mais on aime aussi le punk hardcore comme Code Orange et Vein. Il s’y connaît encore plus que moi en musique, ce qui est assez marrant.
Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter dans les six prochains mois ?
Continuer à élargir ma fanbase, aux Etats unis, en France, en Europe. Dans six mois, j’espère être en mesure de quitter mon boulot et me consacrer à temps plein à la musique. Je suis journaliste pour un magazine local à San Antonio. J’écris sur la musique, je suis des groupes qui viennent en ville et la scène locale. J’aime ce boulot mais j’aimerais avoir du temps pour écrire, tourner et me consacrer entièrement à ma « carrière de rappeur », ah ah !
Chris Conde : Gay Rap King At World’s’ End
With his first LP, Growing Up Gay and amazing live performances, Texan Rap Giant Chris Conde has built a reputation for both being a provocative high-profile queer rap figure and a remarkable artist as strong as he was known for his past trash experiences of drug and alcohol abuses. Coming from a military background, the underdog artist is clean and safe for 5 years now and ready for the next move. His life is in order and all dedicated to creating redeeming and unique hip hop music.
Chris Conde is a good producer, a exquisite lyricist and a great musician whose talent and singularity could expand over the traditional hip hop frontiers. Tackling Rnb, punk and soul, his music deserves far more attention than the curiosity his XXL caracter owes him. Growing Up Gay talks about feeling, breathing and fucking different in an ignorant and oppressive society. It talks about harming yourself through excesses and self-depreciation. It talks about relief and growing up as a whatever LGBTQ man you want to be. The LP itself is full of fight, hope and soul. The story of Chris Conde sounds like a reborn Christian myth in reverse, a typically American renaissance fairytale when one man has delved so low he can just die or become someone new. Last but not least, music rules and what he does is simply amazing. Music with a heart and soul, with guts and love spilling all over the place, experimental and at the same time straight as fuck.
Chris Conde is the man of tomorrow. The other man i mean…
People in France don’t know much about you for the moment. Can you introduce yourself ? You’re from San Antonio etc. How would you describe yourself as an artist ?
Hello! I’m a rapper, singer, musician and producer living in San Antonio, Texas at the moment. I believe that at the root of what I do, I’m just an artist. Hip-hop just happens to be my medium – the avenue, which I process life and choose to communicate with the world through.
We in France like to define people from their social origins. What is your social background? What can you tell us about your family? Sisters, brothers, etc ? Are you still connected to them or has your life put some distance between you all?
Both of my parents were military. They divorced each-other and re-married other people who were in the military, so I grew up in a pretty disciplined culture. My oldest half-sister from my father’s side is also gay. I also have two other half-sisters from my Dad’s side, one older one much younger. I have a full-blooded brother who also is a musician and used to produce trance music and techno. My family comes from immigrants. I’m half Lithuanian and half Mexican. Even though my parents don’t really understand my art and are actually quite conservative, we still manage to find common ground. My ailments and choices put some strain on my relationships. but being sober for five years now, i’ve been able to do some work to repair those relationships.
I’ve read you had travelled a lot as a child and teenage. When did you arrive in Texas ? At what age? What were your first contacts with the Lone Star State ?
My step-father was active duty in the U.S. Air Force so at 4, we moved to South Dakota, two years later we were in Washington D.C., three years later we moved to Guam. Two years later we spent a year in Kansas before moving to Florida. After a year in Florida, my brother and I went to visit my father and step mother in Izmir, Turkey. I was 13. After falling in love with the city, my Dad proposed that we just go to the international school there, so we did. I learned the language and had a blast. During that time I was able to travel to Egypt for a week and then Germany for a week the following year. We then moved to Okinawa, Japan. I spent the rest of high-school there and absolutely loved it. I moved to Annapolis, Maryland and attended University for a short while studying film and photography, but then eventually dropped out. I ended up moving to Texas ten years ago because I felt I didn’t really have a purpose in Maryland anymore, even though I started writing a hip-hop a year before I left there with Trance producer Casey Keyworth AKA Breakfast who was once on Flashover Recordings – Ferry Corsten’s record label. The last ten years, i’ve lived in San Antonio finally putting down roots after traveling so much. Finally, I actually am ready to be on the road full time touring the world.
On this first LP, you define yourself as a “gay rapper”, a queer singer, etc. We are not that used in France to rappers claiming they are gay… and more generally to people claiming they are singing from a sexual, racial or whatever social point of view they may have? Is your sexual identity defining your art ? To which point ?
My sexual identity doesn’t define my art, however I say “gay rapper” because of the importance of “queer-visibility” and “lgbtq-visbility” in American culture, especially in hip-hop. People in America are still killing other people for being gay or trans. In Texas, it is legal for an employer to fire an employee just because they are gay. I claim “gay rapper” because I want to destroy the stigma that gay people are less than human. That we exist in all forms of art and culture. We are rappers, football players, American football players, painters, dancers, film-makers, husbands, wives, brothers, chefs, skateboarders, journalists, the list is ad infinitum.
To me, the LP is more intimate and linked to your personal self than to a “social or sexual group” in itself. That’s Chris Conde singing and not a ex-drug fiend-gay-queer-man, if you see what I mean. Don’t you think so ?
I totally agree with you. It’s a very personal album, and while I do touch upon some areas of my queer identity, my queerness or being gay doesn’t envelop my persona. I’m not defined by it, however it is something that I acknowledge because it’s still such a big deal in America to be gay. And with how macho/machismo hip-hop culture can be, I wanted to make it absolutely clear that gay people are juset as good rappers as straight people. But yes, this album is a journey, not defined by just one facet of my makeup.
Maybe it is a stupid question but don’t you think people could ignore your music because of that “deviant” gay flag you raise too high?
For sure! people could definitely ignore my music, and that’s fine, but I’ve found that a lot of folks are drawn to my album because I have raised that flag and have shouted “I’m a weirdo queer fag that raps, hello!”
Let’s talk about your life first. You sing about that but don’t tell that about it. There is or was suffering in your life. There was drug, alcohol, self-destructing behaviours… Where does all this come from ? Childhood, being gay and feeling guilty about it ?
I certainly drank because of my internalized-homophobia. I was taught to believe there was something wrong with me because I was gay. I couldn’t understand why God created me wrong though, so I became angry and internalized that anger too. I was also molested for several years during my childhood and then in my early-teens was raped by a man in the military. I became severely depressed and didn’t know how to process the trauma because I was too ashamed to ask for help. I eventually sought out Christianity as a way to feel hope. At this same time I had come out as gay. but because I was a Christian i felt i had to not express the gay part of me or date anyone or have sex with anyone. Eventually Christianity stopped working and the magic of a new belief system failed and I began to use drugs and drink heavily to the point that I couldn’t physically stop anymore. At the lowest, I was using crystal meth and drinking over a bottle of whiskey a day. Finally one day i woke up and asked for help. I’ve been sober ever since that day, June 6, 2014.
When exactly did you realize or feel you were different from the other ? I mean not just being gay but well an artist and maybe someone who’s got particular disposition for suffering and addiction.
I always knew I was different. I used to ride my bike with no hands and close my eyes and see how far I could get before crashing into something. I used to play a game in elementary school called “jump off the roof” where me and some friends would essentially find roofs to jump off of. Haha, it sounds insane looking back, but I wanted to live fast and die hard and was always looking for a way to change the way I felt inside.
I don’t want to go into something voyeuristic about what has happened. It is not that interesting from my point of view but were you afraid to delve so low? Were you afraid of dying ?
I think everyone is afraid of dying at some point in their lives. I think my fear of death kept me alive for a good while, which i’m grateful for. I also didn’t want to hurt my mother, because in a way I felt like she would blame herself and I didn’t want to leave her with that burden. Everyday was darkness and pain throughout earl-teens and teens. The feelings of disgust and being used from my childhood and teen trauma and sexual abuse had morphed into this agony that weighed on my chest and shoulders. I carried it with me and didn’t know how to get relief from it. I wrote poetry throughout middle school and high school and eventually began rapping and writing hip-hop verses. Having that outlet probably saved my life too. then i discovered drugs and alcohol, which became my solution for life for a long period of time
I’ve watched last week’s video of the gig in Tusla. It’s still very violent. I mean singing on such a personal level, bare chest and almost naked. It’s radical. Do you find it self-affirmative ? Liberating ? Some could think it is still a form of violence you are inflicted to yourself… what they would call a degrading show. How do you explain that sort of show ? Is it how you like to perform ? Doesn’t bring you or people to a certain state of consciousness ?
That particular show was a little different than my normal shows. I curated more of my noiser songs from over the years because I knew that this particular audience was going to want something harsher and more destructive. While my normal shows have aspects of that – and I do get almost naked for every show – The Tulsa performance was a little abnormal for me. It did feel liberating in a way. As a newer artist, so to speak, people are still discovering me and there was an energy in the room that felt like i could cathartically express the true energy I felt when I was writing those songs.
I’ve interviewed recently Jean-Louis Costes who is one of the most famous French musical body performer (he spills blood, feces, etc). He was telling me it was part acting, and part not acting when on stage as the process could really bring things to get out from unexpected places. Would you agree with that ? Are you happy on stage? Who are you when performing ?
I am very happy on stage. While there is a sort of distortion to my sound, ultimately I feel like my music communicates hope. That whatever journey anyone is on, for me surviving trauma, abuse and drug addiction, you can get through it, even if it means asking for help. The last song on most of my sets is “Dividing Lines” and I usually speak to my audience and say “If you need help, ask for it, there’s no shame in living another day or feeling sad, you can get through whatever you’re going through.”
Would you like to evolve towards a more “classical” performance ? A normal band, I don’t know chorist singers… There is a Rnb potential in you. You could get straight and perform for the TV !!! (jokin)
Haha, I love R&B! I’ve have many manifestations of what I do now. I’ve had folk rap bands where I’ve played banjo and harmonica, rapped and sang in three part harmonies with my back-up singers. I’ve had three-piece interpretations of what I do with just a drummer and a trumpet player. Right now I think I want to continue on just being an engaging performer. Being able to connect with my audience even though it’s just me playing press on my Macbook and my rapping in peoples faces. Eventually, sure, I’d love to have a Circue du Soleil type show, haha, but until then, I”ll most likey be a solo act
Let’s talk about music then. When and how did you discover hip-hop ?
Living in D.C. i would listen to the rap station at night on my Sony Walkman, It was 1994. Eventually Busta Rhymes, Missy Elliott and Timbaland and Magoo came on the scene a few years later and I would watch the music videos on BET and MTV and I was obsessed with how futuristic and weird the music was and it just drew me in. Bone Thugs-N-Harmony did the same for me too, Bizzy Bone in particular – his technical clow and angelic voice really resonated with me.
We can follow many other influences in your production. You make me think of Suicide, Pere Ubu, experimental things and industrial music but also rap, old school sould and rnb. What are your musical references ?
Marilyn Manson, Nine Inch Nails, Skinny Puppy, the Indigo Girls, Lauryn Hilll, The Fugees, Bone thugs-n-Harmony, Missy Elliott, Busta Rhymes. Even Eminem had an influence on me. I also love stuff like George Winston, and Schubert. I was in a madrigal choir in high school and sang many old classical songs that had insane harmonies. I love metal as well, Metallica and prog-metal stuff like Tool too. Today my favorite band is actually a French band called Alcest from Bagnols-sur-Cèze, and I listen to a lot of atmospheric metal.
What was the idea of the LP ? We have the impression it is a very instinctive collection of songs. 19 tracks. Interludes. But it is not clearly the “1st LP” syndrome when you try to put as many things you can in. It is large but compact and focused. How did you get with the LP tracklisting ?
I honestly didn’t realize I was making an album until I actually sat down and tried to put a track list together. at that time i had about 9 songs. it must’ve been 2016 or so. I felt like all the music was slowly coming together, but I had so many different themes, I was unsure how it was all going to make sense cohesively. I reached out to my friend Angel Marcloid of Fire-Toolz a long time friend a collaborator I had first met when living in Annapolis. She sent me some tracks and I think her post-production on the album really filled in some of the loose ends and added some continuity to the collection of songs.
What’s your personal input into beats and melodies ? Do you play an instrument ? Is it all computer composing ? How do you work ?
My first instrument was viola. I played for two years in elementary school. I taught myself guitar, bass, piano, drums and bano later. I like to compose in Garageband at first. It’s a great arena to get my ideas out. And then, when I go into a studio I can replicate what I did in Garageband in ProTools or, if the audio is good enough from Garageband, just use that file. All of the interludes plus “Open Your Heart,” “Get Free” and “Coffee” were all actually produced in Garageband on my iPhone lol. I’ve been using Garageband on my iphone for years and actually even have produced beats for commercials that have appeared on American Television believe it or not.
Who do you work with ? Friends, people you like ? How was the recording ?
I work with a small group of close friends that help me record and know the sound I’m going for. I recorded with a friend and fellow MC named D.R.O. I think he’s probably one of the most talented rappers and producers i’ve ever met. He’s recorded this last album and my upcoming EP.
How do you come with a song ? Texts first. Music. A chorus ? Is everything written beforehand ?
It’s different. Sometimes I have a phrase in my head or I’ll hear a beat or a chord progression in my head. Most of the time, I rap jibberish over a beat in a syllabic pattern that I think sounds cool until those patterns turn into actual words and phrases. Sort of like drumming over the beat in a made up language if that makes any sense.
You are not bad at punchlines. Is it something you fancy in other artists ?
Haha, am i good at punchlines? I think yea, when it’s really funny and witty, yes, i dig it. not all the time ya know? like I do like egocentric rap like ASAP Rocky and even Kendrick Lamar has a few songs like that but it’s all a reflection of just one part of the ego.
Your music is both desperate and full of hope. That’s what is very interesting in you. We feel the despair and at the same time, there is a permanent light… Dividing lines says it well. Are you happier today than you were before ?
I’m definitely happier the longer that I stay sober. I feel like I’ve found my purpose as a person. I believe all of us have some sort of purpose on this Earth. to be of service and useful to each other and to be kind. To share our experiences and strengths with one another, to help each other pursue our respective dreams and ambitions and to provide hope or to help each other get out of negative places either physical, mental or spiritual. to me, I feel like I do that with music: reflect hope
I’ve been impressed by the sound and words of Ferris Wheel. How do you come with such a song ?
I wanted to capture the uneasiness and utter darkness of chasing the dragon. of constantly needing to fix. changing the way I feel using drugs. That anxious feeling of needing to put something inside me to change the way I feel. Lyrically, it was one of the quickest songs I wrote, i think I wrote it in 20 minutes or so. The actual song is an instrumental that was first released on Angel Marcloid (Fire-Toolz) album a few years ago. I loved the song so much and I felt like the lyrics matched how violent the song was.
What are you the most proud of on this LP ? Is it to have been able to record it and now to talk about it ? What do you expect from the listeners ? To love you ? To be afraid of you ? To thrill ? I don’t know.
I’m proud that I was just honest. That I didn’t lie. That I showed you all of my darkness and all of my light. Cuz that’s what humans are. We have the capacity for both, and I believe that for whatever reason, the world has taught us that we can only be good or bad, when in fact we possess good and bad attributes. I expect listeners to hopefully identify with this dichotomy of light and darkness. That maybe they will find their own hope and truth. I also want it to be entertaining, I want people to rock out to the songs and to have fun.
I’ve written your flow sounds a bit like Eminem’s. Considering the fact is not known for being pro-gay, do you find the comparison… provocative ? Or is it something you could receive as a compliment ? (I do like Eminem) Which MCs do you admire for their singing ?
I think Eminem made a big impact on me growing up. I don’t so much enjoy his recent material of the last ten years or so. I just want to see more depth to him. like Can we get a happy Eminem song that isn’t misogynistic or homophobic please? I love Bizzy Bone. I love Kendrick Lamar. Some J. Cole is really good. One of my favorite rappers who I recently discovered is this artist named Ceschi. He’s been around for a long time and is well known in the underground circuit. I think his latest album “Sad, Fat Luck” was one of the most moving pieces of music I’ve heard in five years, whether it was rap or not. which it’s a little bit of folk, punk and hip-hop.
Your LP is more than a hip hop album. There is Rnb in it, punk attitude there and a kind of soul spirit. Do you like it being musically “transgender” (no pun) and not to be trapped into a special art form. I feel you could sing with a rock band or a full orchestra…..
I like that there are layers to this album. I don’t just like hip-hop, I like all kinds of music and I wanted to be able to somehow harness my favorite aspects of some of my favorite genres, while still making this album sound as cohesive as possible. I’d love to sing with an orchestra and yea, maybe you’ll see me with a band sometime.
What’s the plan now ? Are you ready to tour in Europe etc ?
I need to renew my passport, but after that, yea, i’m ready. I miss Europe. I’m very eager to come to France and to see Europe as an adult. I’m playing a lot of shows right now in the U.S. I have some shows coming up in New York City, and am trying to work out a tour for the end of the year. through the south east U.S.
You’ve said in interviews you were clean now. Do you still consider yourself to be “on the verge” or do you feel more secure now music has taken the first place in your life ?
I’ve been sober for five years now so, I feel very comfortable. I don’t think about drinking or doing drugs at all, really. even when I go out and play shows, it doesn’t really cross my mind. If it does, i’m very quick to know what happens when I do drink, which is basically the last thing I ever want to do.
What music do you listen to ? Have you got favorite titles you maybe share with your lover ?
I listen to a lot of atmospheric black metal and metal. I love Alcest, which I shared earlier in the interview. I love Russian Circles. I’m a huge fan of post-rock bands like Explosions in the Sky and Mono. I love Emma Ruth Rundle, she’s one of my favorite singers. Also, Chelsea Wolfe. I dig very ethereal, atmospheric, dark music lol. It’s just very comforting to me. My boyfriend Bubba and I actually do have similar musical interests. We both love Ceschi. Ceschi is sort of how me and Bubba met. Anyway, we both like hardcore punk like Code Orange and bands like Vein. He knows more about music than I do which is sort of funny.
What can we wish you in the 6 following months ?
I want to just continue to build a strong fanbase here and in France and Europe. Eventually I think in 6 months I might be able to quit my day job. I’m a journalist for a local magazine in San Antonio. I write about music here, covering bands that are coming to town and then artists that are doing cool stuff in the city. While i love my job, I’d like to step back more and focus on touring and building this whole rap thing, haha.
Il est vraiment protéïforme ce Chris Conde, c’est le moins qu’on puisse dire! Je viens d’écouter l’EP « Conde Digital ». Je vais continuer à suivre ses autres facettes.
Les références allant du Wu-Tang Clan à Alcest, en passant par du Missy Elliot… Amusant de constater qu’il ne cite pas Big Freedia, un rappeur trans de la mouvance electro-trap matinné d’un zeste de ragga / dancehall. J’y ai tout de suite pensé en écoutant son « No Air (Remix) ». Je ne sais si c’est juste un oubli de lui… On y sent l’influence de la communauté hip-hop queer et des balls new-yorkais dans son phrasé, dans ce titre en particulier. Je le verrais bien comme rappeur dans un label comme Mad Decent ; il collerait bien à la pâte électro-rap trashouille.
Je préfère quand il lorgne de ce côté là plutôt que lorsqu’il fait du Eminem sur un son expérimental un peu brouillon. Mais je pense qu’il est loin de la maturation et que le meilleur est à venir.
Qu’il est protéiforme, ce Chris Conde! C’est le moins qu’on puisse dire. Entre les influences citées, allant de Busta Rhymes à Alcest tout en passant par des producteurs de trance comme Breakfast… Sacré melting-pot. C’est vrai qu’il y a du Missy Elliot chez lui. Je suis étonné d’ailleurs qu’il n’ait pas évoqué l’excellent rappeur trans’ Big Freedia, qui braille sur des instrumentales très électro-trap (sa tonalité est assez… surprenante). J’ai tout de suite pensé à lui en écoutant « No Air (Remix) ». Il y a vraiment un phrasé très afro- « bounce » si je puis dire dans ce titre en particulier, avec des références directes à la culture LGBTQ des « balls » que j’aime beaucoup.
En parlant de label indé, je le verrais chez Mad Decent spécialisé dans l’électro expérimental (mais aussi de rap, moombahton, etc.). Ça collerait parfaitement à son image délurée d’Eminem homo’.
Son dernier EP est pas mal à mon goût (peut-être qu’il y manque un brin de folie et de rythme, les instrumentales assez sombres se ressemblant). Il n’empêche qu’il est prometteur. Il n’y a plus qu’à attendre qu’il mature pour le voir exploiter toutes les cordes qu’il a à son arc.
Merci pour ton analyse hyper précise. J’avoue que je ne suis pas très au point sur les rappeurs trans….et oui Conde évolue dans des registres extrêmement variés. Je ne sais pas trop où il sera au final le meilleur mais tu as raison, il est peu probable que ce soit dans du hip hop à la Eminem !