Daisy Mortem planque l’arête sous le carnage

Daisy Mortem - ArêtesDe retour en France le 14 novembre à Montpellier, pour un tour de France à suivre qui s’achèvera le 1er décembre à Marseille, les agitateurs de Daisy Mortem en ont profité pour mettre en avant un nouveau single, Arêtes, extrait de leur album à venir, Faits-Divers, qui sortira l’an prochain. Fidèles à leur (mauvaise) réputation, le groupe électro trap/trash punko-provocateur livre avec ce titre un clip lugubre et envoûtant réalisé par Charlotte Pouyaud.

Derrière l’électro trash affolée du single, la voix repoussée à l’arrière-plan d’outre-tombe et l’autotune vocodée qui ferait passer Black M pour Freddie Mercury, les Daisy Mortem livrent ici l’une de leurs compositions les plus radicales et soignées. Si l’écoute et la réécoute du morceau restent assez malaisées, voire difficiles, l’effet anxiogène produit par la réunion du morceau et des images est perturbant et, à cet égard, parfaitement à la hauteur du texte qu’il illustre. Car derrière ses mauvaises manières et cette façon de faire scandale, Daisy Mortem est, sans conteste, l’un des (jeunes) groupes français les plus attachés au texte et parmi les plus doués pour composer… de la poésie. Il suffit de se pencher quelques instants sur le texte d’Arêtes pour s’en rendre compte. La forme n’a rien à voir avec le fond ou plutôt si : l’arête musicale qui nous retourne l’estomac est beaucoup plus que ça, une vraie arête métaphysique qui interroge la vanité du monde et la vacuité de l’existence. Daisy Mortem, c’est ainsi Schopenhauer qui s’exprimerait en piquant la rythmique de MHD et la voix de Maître Grims.

Avec Stick et Goune, cette année, on tient là un tiercé outrancier, ultradoué et sans aucune restriction verbale qui n’est peut-être pas susceptible de faire aimer le rap français à lui tout seul mais (ce qui est déjà un but en soi) d’en faire tester les 2/3 restants !

« Je ne sais pas où je vais et je veux me sentir vivre/

Sinon je meurs donc je m’enivre et je m’enfuis et je voudrais m’en foutre/ 

Mais les arrêtes restent toujours coincées dans ma gorge/

Alors je perce de nouveaux trous dans mon torse pour respirer Et je sais que l’étau se resserre, qu’on nous met dans bâtons dans les roues

Mais en fait, on se fait déjà du mal sans vous/  Nos vies se gangrènes donc on joue à la haine/  Et on aime nos peurs, nos peines et nos propres lâchetés/ 

Et combien d’arêtes encore coincées dans nos gosiers habitués au sang/ Comme si la vie n’était qu’un gros poisson qu’on bouffe sans faire gaffe/

Mais attention : après l’arête il y a l’hameçon »

A défaut d’être gai, ce n’est pas ce qu’on a écrit de plus con cette année.

Crédit photo : extrait du clip – We Are Vicious – Charlotte Pouyaud

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