Il est des moments où il faut particulièrement faire attention à ses choix musicaux. En cette période claustrophobe encore plus. Alors, n’imaginez pas que le deuxième album de Christian Löffler serait particulièrement adapté pour trouver un peu de sérénité ni même qu’il pourrait constituer un agréable fond sonore pour toute la famille. Tout au contraire.
Méfiance donc, car c’est ce qu’on pourrait croire, puisque Lys (Ki Records) est présenté comme un exercice down-tempo, voire même trip-hop comme diraient les plus anciens si le terme n’était pas aussi galvaudé de nos jours. Car oui, l’Allemand a certes invité plusieurs artistes à venir chanter sur ses compositions électroniques répondant aussi aux clichés du producteur solitaire et mutique faisant appel à différentes personnalités pour donner vie à ses compositions (chacune parfaitement intégrée et au service de la cohérence de l’ensemble). Oui, la production, signée par Löffler lui-même comme tout le reste, de l’interprétation de tous les instruments (car il n’y a pas ici que des machines) à la pochette est parfaitement ajustée. Oui, le ton ne monte jamais sur ses douze compositions parmi lesquels il est difficile de discerner de réelles modulations d’ambiance. Oui, mais voilà.
Une lourde ligne de basses sous-tend l’intégralité de l’album. Une véritable pulsation, profonde, omniprésente qui finit par devenir obsédante si ce n’est oppressante. C’est encore plus intrigant lorsqu’on apprend que Christian Löffler a imaginé et enregistré cette musique dans une cabane face à la Mer Baltique. Un paysage naturel, sans homme, et propice à l’évasion dit la légende. C’est amusant parce que, tout au contraire, on imaginerait volontiers le musicien composant ces pièces électro-humanistes, casque sur les oreilles, admirant la nuit citadine parasitée par le fourmillement inlassable, incessant et tellement futile des noctambules. Comme si finalement, Löffler délivrait une vision fantasmagorique de cette ville que rien n’arrête, et dont il a la sagesse de se tenir à distance. Il adopte ainsi une sorte de posture ruralo-maritime qui fait écho à celle développée par Apparat. L’image est séduisante et confère une aura supplémentaire à cette œuvre aux belles mélodies mélancoliques. On doute fort que dans son atelier de peintre-musicien, Christian Löffler supporte sans subir quelques troubles la contemplation de la folie des hommes.
02. Versailles (Hold)
03. Weiß
04. The End – Featuring Josephine Philip
05. Bergen
06. Noah
07. Lys – Featuring Menke
08. Sun
09. Ballet – Featuring Patrick Siegfried Zimmer
10. Roth – Featuring Mona Steinwidder
11. Map
12. Für Immer