Les premiers singles de La Femme détenaient une joyeuse insouciance, une façon plutôt personnelle de manier le cut-up musical et la badinerie surf. Le Podium #1 ou From Tchernobyl With Love, en sus de leur efficacité, se dégustaient telles des friandises. Il était possible d’imaginer des petits cousins et cousines prolongeant l’adolescence en vivant de belles expériences musicales. Touchant.
Buzz aidant, La Femme avait même signé chez Barclay. Une bonne nouvelle, au fond : pour une fois qu’un groupe issu de l’underground obtenait les faveurs du Grand Capital, cracher dans la soupe aurait été mesquin. La Femme venait de gagner au Loto (les six chiffres plus le complémentaire). L’enthousiasme général était probablement un brin disproportionné à l’égard du produit offert (des bombinettes pop sans prétention, à siffler sous la douche ou en dégustant un Big Mac), mais qu’importait : chez le coiffeur ou au bistrot du quartier, entendre La Femme sur les ondes populaires changeait des sempiternels Pascal Bruel et Patrick Obispo.
Pourtant, sur la longueur d’un album (Psycho Tropical Berlin, en 2013), le groupe plaisait moins. Trop de titres inutiles, une recette qui commençait à tourner en rond (le surf rock, le yéyé, le tout saupoudré d’une petite glaciation post-punk). Pas grave : un premier disque, après divers singles acclamés, ressemble généralement à une fausse compile, à une volonté de solder l’enfance. Il fallait laisser Sacha et Marlon s’émanciper, emprunter de nouvelles routes…
Le deuxième album de La Femme (Mystère), depuis une semaine, charrie autant de louanges que d’injures, de mépris que d’admiration. Tout ou rien ! Du calme : ce disque est totalement inoffensif, trop gentillet pour oser lui taper dessus. Comme une série B (voire Z) dont les intentions initiales ne transparaissent guère lors du rendu final.
Mystère, et c’est son principal défaut, reconduit, encore et encore, la recette La Femme – en plus long. Beaucoup de titres renvoie à du bouche-trou, l’insouciance (malgré un texte sur la mycose) finit par lasser. Musicalement, c’est propre, joli, un peu emmerdant (une première écoute, face à la longueur disproportionnée du disque, donne envie de stopper l’affaire au bout de huit titres). À la relecture, des refrains exigent la clémence (Septembre, Où Va Le Monde) mais ne font que cloisonner La Femme dans un statut qui dorénavant les dépasse : une formation qui peine à se renouveler, qui ressuscite l’école Oui-Oui, et dont les gens attendent beaucoup trop.
Ni affreux ni enthousiasmant, Mystère laisse de marbre. Le disque défile, on le connaît par cœur dès la troisième plage, il ne dérange personne, il ne communique rien de concret à l’auditeur (excepté le texte sur la mycose) mais n’exige aucune haine en retour. Bien pire : La Femme, aujourd’hui, laisse indifférent. Dommage.
Ne pas condamner le groupe, ne pas jouer à la Madame Irma du pauvre (des réflexes trop simples et certainement injustes). Juste admettre une pensée intime : cet album est raté, mais attendons le prochain…
02. Le Vide Est Ton Nouveau Prénom
03. Où va le monde
04. Septembre
05. Tatiana
06. Conversations nocturnes
07. S.S.D
08. Exorciseur
09. Elle ne t’aime pas
10. Mycose
11. Tueur de fleurs
12. Al Warda
13. Psyzook
14. Le chemin
15. Vagues
16. Always in the Sun
17. Couteau