Il ne s’y sera pas pris très longtemps à l’avance. Quelques semaines seulement avant sa sortie prévue le 4 juillet, le chanteur compositeur Jonathan Richman a annoncé la sortie de son nouvel album, Only Frozen Sky Anyway, sur son label Blue Arrow Records. Cela faisait quatre ans que le légendaire fondateur de The Modern Lovers n’avait pas sorti de long format. A l’excellent Want To Visit My Inner House? (en 2021) avait simplement succédé l’année suivante un EP intitulé Cold Pizzas and Other Hot Stuff, sur lequel il reprenait, entre autres, la Bamba.
L’annonce s’est accompagnée de la mise en ligne sur bandcamp uniquement de deux titres de ce nouveau disque. La production est assurée collectivement par Richman, son épouse Nicole Montalbano et l’ancien Talking Heads et compagnon de la première heure Jerry Harrison, présent également sur une bonne partie des morceaux. La plupart des chansons ont été écrites par Richman qui est accompagné tout du long par le fidèle batteur Tommy Larkins qui l’épaule depuis qu’il a écrémé son dispositif scénique il y a de ça plusieurs décennies. On y retrouve également son épouse, son beau-frère et quelques amis de passage en studio, pour ce qui devrait être un beau travail collectif. Plusieurs chansons sont chantées à deux ou trois voire quatre voix et on note au tracklist une reprise des Bee Gees, Night Fever, qui devrait être très intéressante.
La sortie du disque intervient alors que Richman vient de boucler une tournée printanière aux Etats-Unis et au Canada, laquelle se prolongera au mois d’octobre par une ambitieuse seconde partie (sur une vingtaine de dates). D’après les témoignages, Richman, âgé de 74 ans, semble en pleine forme et satisfait du duo qu’il forme avec Larkins, parcourant le continent nord-américain en passant, selon les envies du jour/soir, en revue une vingtaine de titres de son répertoire riche de centaines de chansons, tubes et autres curiosités. Richman se promène sans compromis, allongeant ou écourtant le set en fonction de l’atmosphère qui règne dans la salle. Il se produit quasi exclusivement dans de petites salles et ne dédaigne pas improviser un showcase, guitare en main, dans un dinner adjacent avant ou après le concert. Chanteur atypique, il s’est débarrassé dans ses enregistrements de tout ce qu’il considère superflu et met en avant une approche purement émotionnelle et instinctive du métier. Ses chansons sont animées, ce qui fait peut-être sa véritable singularité, d’une énergie positive revendiquée et qui dénote avec la noirceur de la plupart des artistes qu’on suit. Les deux titres mis en ligne ne font pas exception : le premier morceau, I Was Just A Piece of Frozen Sky Anyway, parle avec justesse de transition/changement (de genre?) sur un accompagnement de percussions discrètes et de flutiau (?). C’est évidemment, par delà le thème développé de manière poétique et très simple autour d’une adresse à la mère, le jeu de guitare de Richman qui domine ici, souple, élégant et virtuose. Pas étonnant dès lors que le deuxième morceau, O Guitar, soit une simple ode à la magie de l’instrument. Richman rend hommage aux vertus d’éloquence et d’expression de son instrument favori, celui avec lequel il se balade en permanence partout où il va. L’homme est un véritable barde moderne qui est capable de lâcher quelques accords et vers de circonstance partout où il va. Le titre est dépouillé simple et selon la règle que s’est fixée Richman, repose sur une expression honnête et non modifiée. “I learn the way things are when i sit with my guitar.”, chante Jonathan vers la fin, exprimant avec ce vers tout le sens de sa démarche et plus certainement le sens de sa vie.
Le nouveau disque de l’homme-guitare comprendra douze titres.
Pour illustrer cette note, on a exceptionnellement partagé la vidéo d’un concert récent. Richman n’est jamais favorable à ce genre de diffusions et d’enregistrements qui dénaturent la saveur/valeur de l’instant. Le concert est néanmoins remarquable et donne un aperçu de ce à quoi il faut s’attendre désormais avec l’artiste. On a franchi le pas.
