Maud Geffray, Femme Astrale (interview millésimée #1)

Maud Geffray par Alexia Cayre

En relisant l’an dernier des interviews réalisées quatre ou cinq années en arrière, on s’est dit qu’il en était peut-être des paroles données comme des vins, qu’elles pouvaient se bonifier avec le temps ou produire d’autres effets que délivrées au moment de la promotion ou au service de l’actualité. On s’est dit aussi que l’expérimentation valait le coup d’être tentée et que Maud Geffray, auteure en 2022 d’un des plus beaux disques de l’année, Ad Astra, était la personne idéale pour initier cette nouvelle série.

L’interview millésimée a été découplée de sa réalisation (ici, le printemps 2022, indéterminé et parisien) et conservée en fût digital un peu plus de six mois. Les questions et les réponses ont (in)existé durant ces longs mois et poursuivi un étrange mouvement d’invalidation/confortation qui leur donne, un semestre après la sortie du disque, une résonance différente. Certaines questions ne se posent plus. Certaines réponses ont changé. La poésie d’Ad Astra a fait son chemin. Les concerts se sont tenus et les corps ont dansé. Les titres ont reposé avec les mois qui passent. Les tubes aussi. Ceux dont on s’émouvait alors ont parfois été chassés dans nos écoutes par d’autres. Les disques vivent et ceux de Maud Geffray s’appuient tout particulièrement sur ces effets d’impression, de surimposition et de hantise.

Ad Astra est un disque de fantômes et de souvenirs que l’on peut aborder le jour de sa sortie comme des mois après avec la même fraîcheur spirite. L’enfant Roméo dont la présence illumine l’échange a probablement grandi lui aussi et va vers ses deux ans. Le temps est tout autour de Maud Geffray, la femme astrale, qui  entre le Los Angeles de Scrach Massive, Paris et St Nazaire retrouvé, dessine un territoire géographique, temporel et mental infiniment moderne et féminin. Partout et partout ailleurs. Quelles sont les nouvelles ? 

Maud Geffray : J’avais deux choix. Soit je partais pour faire quelque chose de pop, de très calme, de lent. Mais j’avais envie de proposer un disque qui puisse aussi être joué sur scène, dans les clubs, avec plus d’électro, et aussi avec des réminiscences de l’album dedans. J’ai aussi voulu respecter un équilibre avec les voix, les ornements. Mine de rien, il y a de la voix sur tous les titres. Si je transpose cela à l’identique sur scène, hé bien je me transforme en chanteuse exclusive, et ce n’est pas ce que je veux faire ! Je suis en train de repenser Ad Astra.

Il vient de sortir et vous le réécrivez ? Une réplique… un écho de ce qu’il est ? Une reproduction. 

Une image. Je ne sais pas comment ça s’appelle.

Cela veut dire que sur scène, certaines chansons seront moins chantées, voire muettes? 

Non, pas totalement, mais je fais moins de textes.  Way Out par exemple. C’est une chanson très chantée… je dis chanson d’ailleurs, car j’aime bien ce mot.

Chanson ou track alors ? 

Chanson sans hésitation. Sur Way Out, par exemple, cela devient sur scène un morceau dance-floor mais dans les breaks, il y a des réminiscences de voix qui sont des boucles de voix mais qui ne sont pas chantées en direct. Par contre, dans le 2ème break, il y a une partie du chant en entier.

L’œuvre d’art à l’épreuve de sa reproductibilité 

Vous réorchestrez tout l’album du coup. Comme s’il y avait deux disques différents, l’un comme l’écran ou la trace de l’autre ? Il va falloir sortir cette version là aussi. 

Oui. C’est ce qu’on avait envie de faire. J’ai travaillé avec un producteur qui s’appelle Amour Océan qui m’aide dans le travail de re-création. L’idée était que sur scène cela rejoigne un travail entre le DJ Set et l’album. Je veux être très autonome pour tourner. Cela veut dire voyager avec juste un ingé son et un set-up ultra léger. Une boîte d’effets, les platines, les vocaux. J’ai donné le premier concert à la Villette. Les gens sont très pro et carrés là-bas, c’était bien pour démarrer. La seule limite, c’était les 90 décibels. On va soigner les lumières, la matière. J’ai travaillé avec une lighteuse en résidence. Le but c’est quand même d’habiller tout ça et de proposer des tableaux soignés. J’ai du repousser quelques offres sur des festivals car je n’étais pas certaine d’être prête et j’ai un travail pour Netflix en cours dont je n’ai pas trop le droit de parler et qui va me demander pas mal de temps.

Une série ?

Je ne peux pas parler du sujet. C’est un beau projet. J’ai parlé aux deux journalistes, deux nanas. Ce sera une série documentaire montée par l’agence Capa. Je dois illustrer quatre épisodes avec des montages en parallèle. Assez sportif. Je vais démarrer cela début juillet (2022) et cela risque d’être intense.

Comment vous bossez sur ce genre de travail ? 

Les réalisatrices sont assez ouvertes à ce stade. Je compose, j’amène de la matière pré-existante. J’aurai probablement des consignes plus précises plus tard, pas forcément de la part des journalistes d’ailleurs. Il y a une grammaire qui est connue : du suspense, de l’émotion, etc. C’est codifié mais je veux préparer des choses avant de démarrer vraiment. Je vais partir à la campagne pour bosser là-dessus, près d’Angers. Sébastien a une maison-studio là-bas qui appartient à ses parents. Le studio est super. Et je vais pouvoir travailler sur tout ça.

Vous faites le nouveau Scratch Massive en même temps ? 

Il va me laisser le studio pour quelques temps. La BO en priorité et puis c’est vrai qu’on a démarré de nouvelles tracks pour Scratch. On va se retrouver là-bas tous les deux. Sébastien vient passer l’été avec sa femme. On se verra bien sûr.

Sébastien (Chenut, compère de Scratch Massive) sort un album solo en octobre/novembre, c’est ça ? 

Oui. Newem. L’album s’appelle Moonpark. Et c’est très bien.

Choses sérieuses 

Parlons de choses vraiment sérieuses, ah, ah. Vous avez eu un enfant l’an dernier ? 

Oui. Un petit garçon. Le 23 mars 2021. Il a quinze mois. C’est génial. Il rentre ce mercredi de chez mes parents. J’ai fait une petite semaine de pause parce que j’avais pas mal de choses à gérer. Mais j’ai hâte qu’il soit là de nouveau.

Comment est-ce qu’il s’appelle ? Ca se passe bien ? 

Roméo. Le premier hiver est passé avec toutes les otites. Mais ce n’était pas une mauvaise période pour avoir un enfant. C’était un moment presque parfait. Entre les confinements, etc, le temps s’est arrêté et a filé à toute vitesse.

Est-ce que la maternité a eu une influence sur l’album ? 

J’avais commencé avant et j’ai fini après. J’ai travaillé à peu près normalement jusqu’au bout. Non, pas tant que ça, je dirais. Pas dans ce que les chansons expriment en tout cas.

L’organisation ? 

On se débrouille plutôt bien. Le papa a un agenda un peu plus fixe que le mien mais avec la sortie du disque et les projets qui arrivent, ça va peut-être se compliquer. Mes parents qui sont à Saint Nazaire sont ravis. Je suis assez cool comme mère pour le moment. Le bébé est déjà obsédé par les objects techno, le téléphone mais aussi par les platines et par les claviers. C’est de la folie, les claviers. C’est une terre de jeu pour lui. Il adore la techno, la musique. Il singe ce qu’on fait et il m’imite en train de mixer en mettant un casque. Je ne sais pas trop ce que je dois faire !

Enregistrer des vocaux et sortir un single ! Ca peut rapporter gros !!! 

Non. Je crois que je vais lui acheter un petit clavier, plutôt. C’est amusant.

Je suis curieux mais comment est venu ce désir d’enfant ? 

Je n’en parlais pas tant que ça. Je considérais que ce n’était pas une obligation d’avoir des enfants et puis j’ai vu le temps passer. Je me suis imaginée vieillir sans enfant et puis je me suis dit que je serais sûrement triste plus tard d’avoir pris cette décision. Peut-être que j’ai flippé un peu. Je n’en ai pas parlé à ce moment là au cas où ça ne marcherait pas. Et puis voilà.

C’est une IMMENSE responsabilité ! 

A ce stade, j’ai l’impression d’avoir reçu un cadeau, qui me donne une vision de la vie que je n’avais pas avant ça. C’est convenu peut-être mais pas tant que ça. Je pense que la suite va être fun. J’adore sortir avec lui, voir comment il regarde les choses et les considère. Cela change pas mal de trucs. Le sens est un peu différent…

Qu’est-ce qui est intime dans Ad Astra ? On a toujours le sentiment à l’écoute de votre musique que c’est une musique très personnelle mais qui n’est pas non plus réaliste. Est-ce que vous parlez de votre vie, de vous? 

Oui et non. Ce que je chante et ce que j’écris ne renvoie pas à des choses précises de ma vie. On ne peut pas relier les chansons à des événements ou à des personnes. Ça n’a rien d’autobiographique. C’est plus des états d’esprit, des émotions, des humeurs qui eux, oui, correspondent à des choses que j’ai vécues ou ressenties. J’essaie de recomposer des états, de les réinterpréter.

Vous écrivez cette fois-ci sur Saint Nazaire. C’est de vous que ça parle non ? C’est chez vous…  

C’est Rebeka qui a écrit le texte. J’ai écrit la musique. Je ne savais pas du tout qu’elle allait parler de ça, écrire sur nos origines. Elle doutait un peu de ce que j’allais en penser. Elle m’a envoyé le résultat et j’ai trouvé cela très bien, très pudique et en même temps de tout à fait vrai et juste sur d’où on venait, sur nos parcours. On s’est connues à Paris mais en sachant aussi qu’on venait de là-bas. Ca tombait bien parce que Alexia Cayre, la photographe qui a fait la couverture et les photos pour l’album, voulait travailler là-bas, parce que c’est une ville qui s’y prête. Pour faire des clichés un peu brutalistes comme ça. On n’avait pas prévu ça au départ. La chanson nous y a ramenées.

C’est une chanson singulière sur le disque. Chantée en français. Très contextualisée par rapport au reste. 

J’avais deux chansons françaises que j’avais envie de mettre sur le disque et puis je ne les ai pas toutes gardées. Je me suis dit qu’une seule, c’était suffisant. Et j’ai gardé celle-ci !

Le travail avec Krampf ? Comment ça s’est passé ? Vous vous connaissiez déjà ? Il est super vieux maintenant, il doit avoir au moins 23-24. 

25 ans ! C’est une personne assez brillante, avec un côté geek. Il aime chercher, divaguer. Il peut passer beaucoup de temps à chercher des choses, des matières, pour le son. Et en même temps, on est très précis pour le travail, avec des horaires fixes. Il a aussi un côté carré, sérieux. Ce n’est pas le type de 25 ans désinvolte. Ce genre de mecs de 25 ans !

C’est différent de produire avec quelqu’un. Vous étiez seule sur Polar

Oui. Je voulais tout simplement un meilleur son. Il y a des choses que je ne sais pas faire. Je voulais d’autres choses sur le plan technique.

C’est une plus-value qui est d’abord technologique ? Technique ? 

Pas seulement mais oui. Cela relève de la maîtrise technique pas mal. Un travail sur les rythmiques, les sons des synthés, des voix. Amener de la matière vocale. Je sais faire des choses mais il y a une façon de rendre l’équilibre de tout ça qui est différente.

Intuitivement, on sent que le son est mis en perspective, qu’il vit différemment. 

C’est ça. J’avais tout maquetté chez moi. On passe tout dans son ordi et on peaufine tout pas à pas. C’est vraiment un travail très technique. On souligne. On surligne. C’est un travail de titan et c’est aussi intéressant de ne pas le faire toute seule parce que c’est lourd et difficile. Et long aussi.

Vous disiez que vous aviez parfois du mal à terminer, à arrêter… Ca vous a aidé ? 

Seule tu dois tout faire : penser les voix, le son, les textes, tout. C’est parfois un peu trop. J’avais envie de quelqu’un cette fois pour partager ça.

Est-ce que Krampf a un rapport différent de Sébastien à la technique ?

Oui. Ils ne sont pas de la même génération. Il travaille d’avantage avec des plugs in, ce genre de choses, même si Sébastien s’y est mis mais on est plus dans le hardware, nous les anciens.

J’avais le souvenir que les productions de Krampf étaient plus brutales. Ce n’est pas vraiment le cas ici. 

Oui. C’était volontaire de sa part. Il voulait garder quelque chose de pop. On a essayé de trouver un équilibre entre le son techno et cet appel de la pop.

Est-ce que le fait qu’une partie du travail ait été fait pendant la période de confinement a contribué à renforcer le côté électro ? Vous rêviez de boîtes de nuit et de pistes pleines ?

Non, ce n’était pas tant que ça qu’une volonté de penser le disque pour la manière dont je le présenterais sur scène. Je sortais d’un travail beaucoup plus calme avec la harpiste, avec des présentations plus paisibles dans des cadres particuliers, à 20H, des concerts assis. Et je me disais que si on ne jouait pas cette musique à cette heure-là, mais plus tard dans la soirée, voire la nuit, hé bien, ce ne serait pas du tout la même chose, que les sons seraient différents. C’est cette énergie là que je voulais aller chercher. J’ai pas mal tourné dans des salles classiques, dans des environnements feutrés. Je voulais autre chose.

Le Grand Bleu, Sébastien et les autres  

Polar était déterminé par son contexte de production, le documentaire, le froid. Là, j’ai l’impression qu’on est aussi proche de votre ADN électro, de vous… 

Oui. Pour Polar, il y avait tout ça et un thème. Ce n’était pas le cas ici. Ce n’est pas moins moi ou plus moi ici. Je suis vraiment très concentrée sur les lives, sur ce qui va se passer. La question de savoir si c’est plus électro ou pop, elle ne se pose que par rapport à l’endroit où l’on joue. De l’heure. Du public. On va sortir le track avec Koudlam. Et j’ai passé un peu de temps pour réfléchir aux clips, aux images. Sauf pour Royal Bellies. L’histoire est amusante. C’est un gars qui m’a envoyé des images qu’il avait tournées dans un parc en hommage à un photographe japonais, la nuit, en noir et blanc. Cela allait tellement bien qu’on a monté ça pour illustrer la chanson. C’est rare que ça se passe comme ça. Le clip va sortir en septembre 2022. Cela ne me prend pas forcément un temps fou à moi mais mon équipe et moi sommes très attentifs à l’image, à tout ça. Maud est là-dessus entièrement.

Vous allez sur les tournages ? 

Non, pas forcément. Mais je valide l’idée, à peu près tout en fait ! Et je regarde quand c’est fait pour voir comment on associe ça à la musique. Souvent on a trois ou quatre versions et on retravaille.

Le papillon sur Fallin, je suis moins sûr par contre. Ce n’est pas mon préféré sur le plan esthétique.  

Moi non plus ! On avait un budget pour trois clips et on n’avait pas forcément d’argent pour celui-ci. On est partis là-dessus avec Louise de la 3D et on s’y est tenus parce qu’on trouvait ça intéressant aussi.

L’illustration n’est pas incohérente avec la chanson… 

On a créé une boucle avec. On arrive à mener les choses de manière tout à fait efficace avec Pan European Recording, en mode indépendant comme ça. C’était le modèle du rap. Tu fabriques ton master et tu montes un label autour comme ça en trois jours. C’est pas plus compliqué que ça. Il faut juste savoir ce que tu veux et ce que tu ne peux pas avoir. J’ai un modèle assez simple comme ça. J’aime m’appuyer sur les gens. Avec un tourneur, un label. Je n’ai pas de manageur. Avec le temps, tu sais ce qu’il te faut. J’ai besoin d’avoir un peu d’aide car je fais des tas de choses différentes et il y a des questions pratiques d’organisation.

Vous arrivez à refuser des choses ? 

Oui. Régulièrement. J’ai reçu pas mal de sollicitations pour des BOs, etc. C’est souvent pour des raisons de temps, de choses qui me semblent mal définies. J’aime bien travailler sérieusement sur des projets, comprendre ce qu’on me demande et qu’il y ait un échange véritable, que les projets me causent un minimum. Je me suis toujours débrouillée comme ça, sans avoir à travailler sur des projets que je ne sentais qu’à moitié. Économiquement, je n’en ai jamais eu besoin. J’ai eu l’occasion de placer des tracks toutes faites qui m’ont été achetées. Ce genre de choses. Mais je n’ai pas envie de faire de la musique pour « gagner ma croûte ». Ce qui m’intéresse, c’est de rentrer dans une histoire, de rencontrer les gens et de faire autre chose autour. Je ne crois pas que j’arriverais à faire autre chose.

Avec votre bébé, est-ce qu’il y a des choses que vous n’avez plus le temps de faire ? 

Me lever tard. Regarder un film en entier. C’est un challenge… Sortir le soir, aussi. Je déclare forfait assez vite. Il va à la crèche et je travaille donc la journée. Avant, j’aimais bien travailler le soir. La journée, je culpabilisais parce que tu avais beaucoup de temps pour procastiner et parfois tu en ressortais avec l’impression de ne pas avancer. J’avais le sentiment d’être plus productive le soir. Maintenant, j’ai appris à appréhender le temps pour faire les choses. Mon emploi du temps a changé. Le soir, je n’accepte plus rien du tout !

Cela relève de la reprogrammation… 

Oui. On sort beaucoup avec lui le weekend. On le trimballe partout mais le soir, je suis devenue hyper casanière. J’ai envie de faire mes propres trucs : de regarder des films, de me poser. J’ai pas forcément envie d’aller à un dîner, de boire de l’alcool. J’ai tendance maintenant à organiser des goûters ! C’est pas chiant. Avec Krampf/Lucien, on se fait des goûters. Il a 25 ans mais il trouve ça cool aussi.

Vous participez à la mort des nuits parisiennes !

Pas du tout. Il y a plein de choses qui se passent, des festivals. La musique électronique est foisonnante. Il y a probablement des choses assez dark aussi qui ont lassé des gens, un peu glauques mais je crois que chacun peut y trouver son compte en fonction de son âge et de son mode de vie !

Etait-ce une volonté d’ouvrir le disque à des collabs, des featurings ? 

J’avais envie de ça. Et puis, il y a eu des occasions qui se sont concrétisées comme avec Rebeka. J’y avais pensé sur le premier album mais je n’avais pas trouvé la place.

Je voulais revenir sur le remix du Grand Bleu. Comment ça s’était fait ? 

L’idée était de synchroniser la ressortie du DVD et une grosse tournée avec une relecture sur scène avec des musiciens électro et un orchestre. Et puis la tournée a été reportée une fois, deux fois je crois. J’avais été contactée par le manageur avant ça.

Vous avez dû revoir le film trois fois ?

Une fois, une fois. Le générique du début est énorme. Ca reste un film impressionnant à bien des égards. Le manageur m’a contacté. Il n’était pas très précis sur ce qu’ils avaient fait ou pas encore fait. J’ai démarré le boulot sans trop savoir où j’allais mais avec l’idée que je ne voulais pas travailler pour rien, ce dont je n’avais pas la garantie du tout. J’ai commencé à découper les séquences en essayant de garder les étapes : le silence, l’attraction des profondeurs. C’était une BO ancienne donc rien n’était étalonné pour les machines d’aujourd’hui. Mais c’est beau aussi. C’est un film sur la mort, sur l’enfance. J’ai tout recalé à la main pour intégrer les séquences. Ca a été un travail très long, très artisanal. J’ai envoyé ce que j’avais fait, sans vraiment savoir si j’avais fait ça pour rien, s’il n’allait pas tout simplement le jeter. Et puis dix minutes après le manageur m’a appelé en me disant : c’est bon, c’est très bien. Vous ne consultez pas Eric (Serra) avant ? Non, non, je vais lui envoyer, mais c’est bon. Il m’a raconté l’histoire après : ils avaient demandé à plein de gros producteurs de travailler sur le sujet année après année, mais ils avaient toujours refusé le résultat. Sauf cette fois-ci. Mais ma grande déception, c’est que je n’ai pas pu assister à un seul concert de recréation du Grand Bleu. Ceux que j’avais visés ont été annulés. Il y en a eu un ou deux autres où je n’étais pas dispo. C’est ça qui m’a frustrée un peu. Je n’aurais pas pu passer autant de temps sur d’autres projets si ce n’avait pas été le Grand Bleu tout de même !

Vous allez tourner beaucoup avec l’album ?

J’aimerais. Le problème c’est que pas mal de festivals ou de salles demandent des exclus autour de leur événement. Cela bloque les possibilités de trouver des dates autour, mais on va proposer des trucs très vite sur l’automne et l’hiver 2022/2023.

Vous avez un agenda pour le nouveau Scratch Massive ? 

J’ai regardé ce qu’on avait. Ce qui est bien c’est qu’on est d’accord sur l’orientation qu’on veut donner aux nouveaux titres. C’est toujours rassurant. On déjà quelques tracks maquettées. 2 ou 3 vraiment bien. Il y a de quoi faire mais on doit se poser un peu pour donner corps à tout ça. On se parle tous les jours avec Sébastien. En cela, cela n’a pas changé. On s’échange des sons, des petits mots. On est vraiment partenaires. Sur nos projets solo comme évidemment sur ce qu’on veut faire ensemble, on discute de tout tout le temps, on se conseille. J’aime bien l’idée d’aller bosser sur Scratch Massive à l’hiver à Los Angeles mais avec Roméo, je n’ai pas encore décidé comment j’allais faire. Il est encore petit. Cela voudrait dire travailler le matin ou le soir aussi. C’est un rythme à trouver.

La relation avec Sébastien est quand même incroyable. Après tout ce temps. 

Je suis si étonnée que je ne m’en étonne plus.

Je n’ai pas de question finale. C’est une interview sans chute, je le crains. 

La prochaine fois alors…

Et pendant ce temps là, du côté de Los Angeles, le présent se réalisait… 

Scratch Massive

Photographie de Maud Geffray par Alexia Cayre
Photographie de Scratch Massive – source publication Facebook du groupe (10 janvier 2023)

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