Michel Cloup Duo / Ici Et Là-Bas
[Ici D’Ailleurs / L’Autre Distribution]

Michel Cloup Duo - Ici Et Là-Bas« Qui je suis ? D’où je viens ?… Où Je Vais ?« . Ainsi commence Ici Et Là-Bas, le troisième album de Michel Cloup en duo.

Et ces onze nouvelles chansons ne permettront probablement pas de répondre à ces questions qui transpirent la crise d’identité personnelle et identitaire (les prémices de la cinquantaine qui approche ?). Le mystère reste car faut-il y voir l’album le plus personnel du Toulousain, celui qui clôturera un chapitre, ou celui qui exprime une posture distanciée, un point de vue politique et social et marque ainsi une nouvelle inflexion artistique ? A quel degré faut-il comprendre l’usage du « je » dans chacune de ces chansons bavardes et vindicatives ?

Le propos, souvent intelligent et toujours parfaitement intelligible même dans les moments les plus incandescents interpelle (le mixage de la chanson-titre est révélateur de ce parti pris : la voix de Cloup se détache du maelström instrumental). Pour avoir suivi la carrière de l’ancien Diabologum – voire même depuis Peter Parker Experience et en suivant les étapes Experience et Binary Audio Misfits -, on s’interroge. Michel Cloup adopte aujourd’hui une dialectique et un ton qui sied parfaitement à Mendelson, mais qu’on ne sait comment appréhender ici, toujours entre la confidence très personnelle (les quatorze minutes bouleversantes de Une Adresse En Italie) et des textes forcément très contextualisés, en plein traumatisme terroriste et exode massif de population (Nouveau En Ville, Étranger, Nous Qui N’arrivons Plus A Dire Nous, Ici Et Là-Bas). Le discours n’est pas trouble (il n’y a ici rien qui prête à débat idéologique) mais forcément troublant : jamais aura-t-on entendu dans la bouche de Cloup les thèmes de la patrie, des origines, de l’identité… Certainement avait-il besoin de mettre en mots toutes ces interrogations et ces convictions devenues si compliquées à exprimer, au risque de se couper d’une partie de son public historique – et d’en séduire un autre qui comprendrait mal le propos.

On pourrait vite être las d’écouter tout ceci… d’autant que le nouveau duo formé avec Julien Rufié (batterie, en lieu et place de Patrice Cartier) ferraille durement, sans retenue. C’est du brut et du brutal. Alors, on pourrait s’interroger sur la nature profonde de Michel Cloup : est-ce le gars sympa qu’on a pu croiser jadis au bar, forcément seul, un peu largué mais venu écouter le concert d’autres par affinités, une gloire déchue qu’on pouvait aborder, ou celui qui harangue la foule pendant le concert de ces anciens compagnons de Lithium – à deux doigts de l’insupportable arrogance ?

Dès lors, de deux choses l’une  : certains concluront que Michel Cloup n’intéresse pas dans ce registre et que s’il veut se détacher définitivement des nombreux suiveurs qui ont pris le sillage de Diabologum, il n’a pas pour autant la plume d’un Bouaziz. D’autres arrêteront de s’interroger et se prendront ces chansons en pleine face, courbant l’échine sous ces coups de butoirs, cette batterie qui bastonne, ces riffs au hachoir comme sur La Classe Ouvrière S’est Enfuie… Dans l’incertitude, face aux doutes que ne manque pas de soulever cet album écrit par un type qui doute de tout, y compris de lui-même, on a poussé le volume à un niveau indécent jusqu’à cette fin en forme de mantra « Ce n’est pas le moment de s’enfuir » (lourde de sens après avoir caressé l’idée d’une fuite vers un ailleurs idéalisé). Quand on repose le casque, au milieu de la nuit, l’acouphène guette et on continue longtemps à scander ces phrases définitives.

Tracklist
01. Qui Je Suis
02. La Classe Ouvrière S’est Enfuie
03. Ici Et Là-Bas
04. Deux Minutes Vingt-Cinq
05. Nous Qui N’arrivons Plus A Dire Nous
06. Animal Blessé
07. D32W
08. Séparer
09. Nouveau En Ville
10. Etranger
11. Une Adresse En Italie
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