On continue si souvent d’écouter les albums passés de The Antlers qu’on en aurait presque oublié qu’ils sont partis depuis si longtemps. Leur dernier album véritable, Familiars, est sorti il y a sept ans et même s’il y a eu pas mal de choses entre deux (dont, Impermanence, un beau disque du chanteur qu’on avait interviewé pour l’occasion), retrouver le groupe composé de Peter Silberman et de son compagnon de route Michael Lerner, est l’une des meilleures nouvelles de ce début d’année.
Le nouvel album s’intitule Green To Gold et sortira seulement fin mars 2021 chez Anti-. Le groupe a, pour finaliser l’annonce de son retour, révélé un troisième morceau, Solstice, aux deux précédents, les beaux Wheels Roll Home et It is What It is (en écoute ci-dessous). On y retrouve des arrangements splendides et bien évidemment la voix incroyable de Silberman qui semble, cette fois, délaisser un peu la plainte et la peine en général pour s’étonner des choses de la vie, du destin, de la roue qui tourne et autres manifestations temporelles d’une vie qui va. C’est d’ailleurs autour de ce thème, le changement, le temps qui passe, que s’organise le disque, presque bucolique par moment à l’image de l’étrange clip qui illustre Solstice, et attentif à la marche du monde. Il est toujours difficile avec The Antlers d’entrer dans l’album par quelques portes dérobées. Les disques de Silberman ne prennent véritablement leur pleine mesure émotionnelle que lorsqu’on en découvre le tableau en intégralité. Il faut toutefois avoir les oreilles bouchées ou peu sensibles pour ne pas être touché par la délicatesse raffinée, la simplicité honnête et fragile qui se dégage de Wheels Roll Home. Silberman fait l’éloge des moments simples (une rencontre amoureuse, un regard) et nous en fait saisir (la période s’y prête) toute la grâce et l’infinie magie. Dans un registre faussement folk, rendu plus chaleureux encore par l’addition (généreuse mais proportionnée) de cuivres, The Antlers choisit de ne jamais faire décoller It Is What It Is comme s’il s’agissait simplement de suggérer le souffle tendre de la vie qui va.
Des trois morceaux, Solstice, est finalement le plus uptempo et « spectaculaire » avec ses guitares ouvertes et son appel à l’espérance. Les New Yorkais semblent toutefois résolus à réduire les effets de manche au maximum et à proposer des miniatures qui mettent la discrétion, le silence et l’écoute de l’autre au cœur du jeu. On peut trouver cela déplacé, démodé et presque surréaliste, mais aussi considérer que cette extrême attention, cette extrême douceur font du groupe et de Silberman l’un des plus beaux compositeurs de musique de chambre de la planète. On a hâte d’être au printemps pour renaître avec eux.
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The Antlers / Green To Gold