Population 5 / Population : 5
[Muzak]

8.1 Note de l'auteur
8.1

Population 5Sans doute n’aurait-on pas croisé la musique de Population 5, si leur guitariste n’avait été l’élégantissime et merveilleux Philip King, ancien (bassiste) de plusieurs franchises indé que les amateurs du genre vénèrent comme Felt, Lush ou encore (sur scène), le Jesus and Mary Chain. King a d’ailleurs récemment signé un documentaire sur le groupe Lush dont on reparlera sûrement. Il joue un rôle central dans le son et la musique de ce nouveau groupe, Population 5, qui mêle anglais expatriés au Portugal comme King et sans doute Mark Shaw/Julian Hayr (basse) et citoyens du cru, comme Francisco Afonso « Xico », au chant, Fernando Barderdo « Pio » à la guitare ou encore Pedro Jervell à la batterie.

Le résultat est l’un des disques les plus cools et sexy de la période, dans un registre garage ou surf rock un peu rétro mais qui est animé par une belle énergie, des compositions enthousiasmantes et une combinaison chant/guitares redoutable. Francisco Afonso a une voix un peu brute et éraillée qui fait penser tantôt à celle de Mark E. Smith, de Jowe Head ou plus sûrement du rocker et countryman hillbilly Billy Childish. Le premier morceau When The Sun Comes Up At Night est une tuerie. La vie est rude, chante Xico. La vie est courte. Je ne sais pas où je vais mais je devrais savoir où j’ai traîné… Mais quand le soleil pointe le bout du nez. Tout ira bien. Ces desperados anglo-portugais assurent dans la pure tradition du western (spaghetti/tortilla),  dérivative et à la gloire des cowboys solitaires, romantiques et errants dans la plaine. On se laisse prendre par le faux rythme d’un I Don’t Share qui dit à peu près la même chose que la chanson précédente (où vais-je ? qui suis-je ?) mais fonctionne tout aussi bien. Le disque, à l’image de sa pochette, est un petit condensé d’héroïsme au grand cœur, mêlant des images rétro-futuristes, des chansons un peu plus sentimentales et des récits d’aventures désespérées. Runaway est magnifique, Caravan of Satellites punk à souhait. « Tesla, Google, amazon : soon there will be no stars to look upon. » C’est dans le registre rentre-dedans et direct dans ta face que Population : 5 est le plus efficace. Le groupe ne perd pas de temps à introduire les titres et déroule son programme qui semble emprunté aux Stooges de la belle époque. Les douze titres sont exécutés en une trentaine de minutes avec quelques jolis moments de bravoure comme les terribles Jet Liner ou Episode of Violence.

On pense évidemment à nos amis de La Luz… en garçons sur le bringuebalant Midnight Surfer, avec ses chœurs (presque grecs) et sa basse si caractéristique, mais on aime tout autant le foutraque et détraqué I’m Lost. Population : 5 raconte la vie des anti-héros, des losers magnifiques, de ces personnages un peu déphasés et qui semblent pris entre les époques. A l’image de leur son (un brin anachronique tout de même… et sans une once d’électro), ce disque navigue dans des eaux baignées de nostalgie, d’humour aussi, où la figure masculine erre sans boussole, ni repères. Faut-il y avoir un portrait « en creux » de la masculinité en berne ? Un dernier témoignage d’un rock qui n’existera bientôt plus où des types chevelus et entre deux âges se réunissent pour jouer dans un garage, boire des bières et séduire des filles ? On retient surtout ici la technicité des musiciens et la joie de jouer et de faire les choses bien qui émane de chaque titre. Le disque de Population : 5 ne va absolument rien changer à la face du monde, ni même à celle de la musique mais il offre un plaisir infini et un brin régressif à ceux qui croiseront sa route. Rien que pour ça, on peut et on doit faire le déplacement. Phil King est autant un maître guitariste qu’un musicien qui ne commet jamais de fautes de goût. Ce disque est à son image, amical, instruit et redoutablement efficace.

Tracklist
01. When The Sun Comes Up At Night
02. I Don’t Share
03. Runaway
04. Caravan of Satellites
05. Episode of Violence
06. Midnight Surfer
07. Dance Floor
08. Candy
09. Peter Prank
10. Stars on Mars
11. Jet Liner
12. I’m Lost
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