Toujours gratifiant de ressentir un gros coup de cœur pour un premier EP, puis de partir dans la pleine extase lorsqu’un album vient ensuite confirmer tous nos espoirs, tous nos paris. Les filles de SheWolf nous avaient particulièrement bluffés au moment de dégoupiller une grenade initiale (Red Moon Slave), et encore plus terrassés lorsque les sept titres de leur Debut EP hurlèrent dans nos enceintes.
Avec Sorry, Not Sorry, album commando, ce n’est même pas à une confirmation que nous invite SheWolf, mais à une propulsion immédiate vers des territoires brûlants, organiques, volcaniques. Douze morceaux, aucun temps mort, absence d’accalmie. Du rock pur, direct, qui refuse d’endosser le masque de la référence ou de l’hommage, qui refuse même de se protéger derrière les lunettes noires de la fiction. Tout dire, tout révéler, tout montrer, avec une rage non feinte, limite parfois psychiatrique : et de Courtney Love à PJ Harvey en passant par Nirvana ou les Sex Pistols, on connaît bien cette colère impudique, cette expiation vitale qui consiste à fustiger l’époque tout en prenant soin de partir de l’intime, d’un vécu personnel.
Souvent, depuis quelques années, le rock cherche à revendiquer son intelligence. Comme si cracher ses tripes ne suffisait pas, comme si une quelconque caution théorique pardonnait ce besoin d’envoyer du lourd. Or, d’Iggy aux Pistols, la pensée vient ensuite, elle se dévoile, en soubresauts, parce que la violence accapare le premier plan. Parce que cette violence nous parle. Les filles de SheWolf se rangent dans cette catégorie. Raison simple qui vaut de l’or : le cœur, les tripes et la sueur déterminent les compositions du groupe. Il y a encore, ici, la colère du bruit et de la destruction. Principe vital : faire du rock (du vrai), c’est partir en transe, s’échapper de soi-même. Sorry, not Sorry : disque possédé. Grand disque de possédées.