Beach Youth / Second
[WeWant2Wecord / Beau Travail]

8.6 Note de l'auteur
8.6

Beach Youth - SecondAprès le chouette Singles dont on avait rendu compte assez tardivement, les Beach Youth sont de retour avec un mini-album ou un deuxième ep intitulé simplement Second. On l’avait dit déjà fin 2015 en découvrant leurs premiers morceaux, les Caennais sont l’un des groupes français à suivre de près. On ne les suit plus cette fois, on les adore et on peut saluer, à travers ces sept morceaux impeccables, le chemin parcouru en quelques années.

Il y a en effet une vraie différence entre pondre quelques titres qui attirent l’attention et aligner sept morceaux du calibre de ceux qui constituent Second. On se demande d’ailleurs s’il n’était pas temps ici d’aller chercher, avec quelques morceaux de plus, un premier album qui leur tendait les bras. Cela aurait été peut-être l’occasion de réussir un joli coup et de poser sur la platine, dans ce genre-là, rien moins que le disque français le plus intéressant et le plus réussi de tous les temps. On aurait voulu que ce Second étendu ressemble au premier album de The Thrills, ces irlandais qui jouaient au rock californien et lançaient des étincelles avec leurs guitares. Tout le monde continue de comparer Beach Youth aux Drums ou aux Beach Fossils, et c’est évidemment la vérité : le mélange de pop gracile, d’indie rock et de voix angéliques y est pour beaucoup. Il y a de la fraîcheur et un sens aigu des mélodies qui font mouche. Classroom, le single mis en avant pour la promotion du disque, est épatant et a tout pour lui : un riff canon, une voix qui fait chavirer et un texte tendrement nostalgique. C’est aussi parfait qu’une guimauve, le genre de chansons qu’on a envie d’écouter pour se souvenir de son premier amour et de sa 6ème. Qu’est-ce qu’on était bien bon sang !

You’re Gone est encore mieux, plus pompier avec ses chœurs et son chant splendide en escalier. On n’a toujours pas identifié (à la troisième chronique) qui est qui  mais les prénoms des membres du groupe nous font penser à un film de Rohmer : Étienne, Louis-Antonin, Simon et Gautier. Beach Youth est le genre de groupes qu’on ferait jouer sur la scène du Club Mickey alors que les personnages se baladent sur le front de mer en se tenant la main et en évoquant leurs amours compliquées. Un peu comme dans Mary à Tout Prix mais en moins rigolo et en plus triste. Les morceaux sont parfaits, ciselés la grande majorité du temps pour tomber sous les trois minutes. Il n’y a pas de notes en trop, pas de solos qui s’allongent et trahiraient la complaisance. La musique de Beach Youth est jeune, énergique et n’en fait jamais trop. On pourra se plaindre du manque de variété mais cela va si vite que ce serait pêché que d’aller chercher des noises sur ce terrain-là. Bicycles est aérien et magnifique. Everything en est une sorte de version ralentie. La mélodie est comme étirée, allongée. Il faut un peu d’audace pour jouer à cette vitesse et s’en remettre à la paix et au tempo lent. Beach Youth fait ça à merveille. On pense à des tas de gens biens qui ont fait ça avant mais ce n’est pas même la peine de les citer. Beach Youth évolue dans un genre où on ne réussit pas sans donner à l’auditeur l’idée que c’est la première fois que tout ça arrive. La musique donne accès à des souvenirs enfouis. On revisite des émotions, on se souvient, en même temps que le narrateur de trucs, qui ne nous sont pas vraiment arrivés mais dont on a retenu la sensation à l’intérieur de nous.

Sur Tenderly, le groupe s’offre un interlude qui ferait saliver New Order. Il faut absolument écouter ces deux minutes qui n’ont rien à faire là. C’est un miracle. Un plagiat peut-être (tout y est, comme si Peter Hook avait pris le ferry-boat au lieu de vendre son matos) ou un prodige plus sûrement. Il fallait évidemment terminer avec ce morceau mais le groupe pousse Apnea juste après, qui est le seul morceau maniériste des 7. C’est le risque avec ce genre de disques parfaits : pousser son avantage et donner le sentiment qu’il y a de la technique alors qu’on pensait qu’il n’y avait que le cœur. Il faudra se défier de la répétition sur la prochaine sortie.

Second est l’un des disques les plus amicaux et décisifs de ce premier trimestre. On va déjà l’écouter jusqu’à l’été et puis sans redescendre sur septembre et octobre en sa compagnie. C’est ce qu’on appelle une réussite, un disque-compagnon qui n’a que des qualités et qui remplace le bonheur. Qu’est-ce que vous voulez de plus ?


Tracklist
01. Classroom
02. You’re Gone
03. Bicycles
04. Everything
05. For Us
06. Tenderly (Interlude)
07. Apnea
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