Holy Esque / At Hope’s Ravine
[Beyond The Frequency]

Holy Esque - At Hope’s Ravine Étrange impression face à Prism, ouverture du premier album des Écossais Holy Esque : celle d’entendre une voix entre Springsteen et Rod Stewart s’égosiller sur une rythmique aussi martiale que du Joy Division. Gageons par ailleurs que le chant cassé, chevrotant, du leader Pat Hynes en rebutera beaucoup. Cependant, une fois passée l’acclimatation, At Hope’s Ravine divulgue quelques motifs à enthousiasme, voire même une façon plutôt personnelle d’envisager le rock de stade.

Si certains fantômes cold wave entraînent parfois les compos d’Holy Esque vers la marche militaire, ce sont bien les prémices de U2 et Simple Minds qui servent de carburant à cette curieuse affaire. Car à l’instar d’albums (que l’on défend) tels que Boy ou Reel To Real Cacophony, At Hope’s Ravine s’endort en Technicolor mais se réveille dans une banlieue industrielle, triste et paumée. Un contraste permettant à Holy Esque de jouer avec ampleur et héroïsme, mais la testostérone est encore réservée aux premiers de la classe. Ici, les morceaux gardent les mains dans le cambouis, les pensées fricotent toujours avec une saine frustration. Holy Esque enregistre des hymnes fédérateurs dans un 30m², des chansons grandiloquentes conçues entre deux pizzas surgelées et une bière tiède, de la bravoure prolétaire. Mais comme chez les jeunes Bono et Jim Kerr, il y a déjà une soif d’en découdre et d’imposer au monde entier ce lyrisme claudiquant, estropié et malade.

Pour Holy Esque, le risque est donc grand : avec du succès et un gros label, ce groupe y perdrait de sa candeur pour éventuellement rejoindre le peloton des moralisateurs (un piège qui finit par engloutir la fougue U2 et l’halluciné Simple Minds). Et peut-être, finalement, les Écossais n’attendent-ils que cela ? D’où l’impossibilité de faire notre Madame Irma et de miser nos dernières économies sur eux : à Pat Hynes et à sa bande d’éviter la case Muse / Coldplay afin d’éternellement conserver la fraîcheur (certes maladroite, mais il s’agit là d’une touchante qualité) de ce At Hope’s Ravine placée sous échelle humaine.

Tracklist
01. Prism
02. Rose
03. Hexx
04. Covenant (III)
05. Silences
06. Strange
07. Doll House
08. Tear
09. My Wilderness
10. St.
11. At Hope’s Ravine
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