Il y a ceux qui ne sont jamais partis mais qui reviennent quand même (The Cure). Ceux qui sont partis, sont déjà revenus mais rereviennent encore (Outkast). Ceux qui sont partis et sont revenus et engagent les grandes manœuvres en vue d’une nouvelle relance (Ride, Grandaddy). Ou ceux encore qui sont partis, revenus, repartis et qui reviennent pour un second retour qu’ils présentent comme le vrai premier retour de la revanche sur le départ (Pixies). A quelques années de distance, le mouvement des reformations, déformations reste la grande affaire du show business indépendant réunifié. Quel spectacle ! La musique est un cimetière où des groupes se séparent, pourrissent en terre ou en terreau, fleurissent, mangent les pissenlits par la racine et puis s’élèvent de nouveau comme des morts vivants pour renaître comme aux beaux jours mais avec une odeur de mort sourde lorsqu’on passe le doigt derrière l’oreille. Nous, les fans, nous agitons comme des amateurs de films de genre, série Z ou série A, selon les humeurs, la date du retour et le moment où on le reçoit. Nous voyons, revoyons les groupes qui vivent et meurent, se lèvent et se couchent. Quelle différence y a-t-il entre un groupe dont on se souvient et un groupe qu’on revoit 20 ans après ? Plus rapide, plus beau. Est-ce nous qui changeons ou le groupe qui décroît ? Y a-t-il un progrès dans la mort et la résurrection ? Vaut-il mieux revenir ou n’être jamais parti ? Placebo fait son double CD best-of. The Modern English a sorti cette semaine son meilleur album depuis… l’album de ses débuts. The Wedding Present qui a enquillé les tournées théma sur ses albums passés, ressuscité Cinerama avant de rejouer son dernier album, Valentina, avec son side-groupe… (vous me suivez) a sorti lui aussi la semaine dernière Going Going (un nom de pièce de boulevard) et aussi son album le plus réussi et le plus ambitieux depuis El Rey en 2008. On en reparlera de l’un comme de l’autre. The show must go on… mais en marche arrière.
The Cure a bouclé l’enregistrement de son nouvel album. Et The Housemartins ont déclaré ce weekend qu’ils s’étaient réunis dans un bar pour tenir conseil. Selon Norman Cook (qui n’a pas dissout officiellement Fat Boy Slim !), le verdict est clair : il n’y aura pas de reformation si The Smiths ne se reforment pas avant. De toute façon, Andy Rourke joue avec Dolores O’Riordan des Cranberries. Cela ne risque pas d’arriver. Et Ride dans tout ça ? Ils ont tenu l’affiche du Bestival annuel et introduit le concert de The Cure. Mark Gardener a tweeté depuis backstage qu’il avait kiffé comme pas possible le show de Robert Smith. Le groupe d’Oxford aurait déjà quelques morceaux en stock mais il n’est pas dit que l’album soit pour tout de suite. Même chose pour Outkast. Si Andre 3000 et Big Boi ont rejoué pendant 15 minutes pour la première fois ensemble ce weekend dans un festival à Atlanta, on ne sait pas encore exactement où ils en sont. Leur reformation de 2014 avait laissé de marbre pas mal de monde. Et puis il faut avouer que Andre 3000 boudant son Hey Ya, ça sentait un peu le gars qui revient sans vouloir revenir. Après tout ça, il vous reste la possibilité d’aller voir les Beach Boys en tournée ou alors d’écouter les Rolling Stones à la maison de retraite. Quelles perspectives rassurantes.
Selon notre humeur, on peut taxer certaines reformations de formations nobles ou éthiques. C’est à peu près ce qu’on pense du retour de Grandaddy dont les premiers morceaux tiennent la route. Il y a un petit côté Dinosaur Jr là-dedans. Il faut dépasser les anciennes inimitiés, dépasser le temps qui passe. On lave les chemises bûcheron en famille et on repart 100% nature et tradition. Y a-t-il des bonnes et des mauvaises reformations ? Des gens qui le font pour de l’argent et d’autres qui le feraient pour l’amour de la musique ? Par intérêt ou par envie ? Qui n’a jamais eu envie de recoucher avec une ancienne petite amie ? Qui n’a jamais eu envie de revivre sa propre jeunesse ? Devant ou à l’intérieur de la platine, nous sommes tous des momies. On se demande comment nos oreilles tiennent encore en place. Il faut juste choisir la couleur des bandelettes. La musique n’a jamais été qu’une histoire de nostalgie.
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