Roulette memory #27 : Ténèbres de Goblin

Ténèbres de GoblinTénèbres de Goblin (capture d’écran)

Another Roulette Memory… Cette fois, afin de varier et faire plaisir à Benjamin Berton, allons fouiner dans les bandes originales vinyles… En ressort Ténèbres des Goblin (alias Claudio Simonetti, Fabio Pignatelli et Massimo Morante). Guère surprenant car cette BOF, avec celle de Police Fédérale Los Angeles, parade fièrement dans mon recoin vinyles (entre une VHS de Possession et une « K7 » audio de Furyo). Inutile de réécouter cet album, je le connais par cœur – sans doute car je revois le film de Dario Argento au moins une fois par an, tel un rituel obsessionnel.

Acheté à la fin des années 80, au marché aux puces de la petite ville méditerranéenne où je vivais alors (pour 30F), ce disque est selon moi la BO idéale pour les futurs assassins, névrosés au rasoir et potentiels artistes frustrés. Tout y est criard, exagéré, lourd mais inquiétant. D’ailleurs, lors de la sortie française du film en 83, nombreux fans de Dario avaient fustigé ce recours aux synthétiseurs qui contrastait trop avec les messes noires entendues sur le score de Suspiria. Or, l’aspect dansant de la partition, presque incongru face à la crudité blanchâtre d’une œuvre qui aligne douze meurtres en 1h40 (rasoir, hache, couteau), souligne l’absolue jouissance avec laquelle Argento visualise la quintessence du giallo postmoderne. Car c’est peu dire que Dario s’identifie à l’assassin du film (un écrivain), jusqu’à redoubler d’inventivité afin de transformer en cérémonie orgiaque l’amputation de Veronica Lario (ex Madame Berlusconi) ou l’égorgement d’Ania Pieroni (la sorcière au chat d’Inferno). La musique des Goblin accentue le côté fête païenne du film, sa joyeuse dégénérescence, son extase à sublimer les pires déviances. Ténèbres : ça éclabousse, ça tache !

La BOF des Goblin me paraît indissociable des rêveries macabres d’Argento (et ne me renverra jamais à l’utilisation du sample qu’en fit Justice en 2007) : la voix off en introduction (celle de Dario himself) qui associe homicide et plaisir, les hurlements de Daria Nicolodi, ces gros plans insistants sur le scintillement des lames de rasoir et leurs sous-entendus phalliques… Et donc ce contraste entre boites à rythmes cheap et intemporalité clinique d’une Rome désertée, en souffrance, rongée par sa perversion. En rouge et blanc.

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