En 2012, lorsque Dive (devenu depuis DIIV) fait paraître Oshin (Captured Tracks, un label auquel le groupe est resté fidèle), personne ne pouvait imaginer à quel point Zachary Cole Smith enclenchait alors un tourbillon à remonter le temps.
Le guitariste de Beach Fossils avait tout du gentil rêveur qui donnait vie dans cette échappée solo à ses aspirations dream-pop. Ça sonnait comme une version américaine (donc plus musclée et plus grasse) et modernisée (donc mieux produite et plus explicite) de l’anorak pop de la fin des 80’s. Depuis, outre le changement de patronyme, la récréation est devenue un véritable groupe avec le renfort de Andrew Bailey (guitare) et Ben Newman (batterie). Is The Is Are (2016) marquait déjà une nette inflexion indie-rock, DIIV bandant les muscles et livrant une rengaine cold-wave imparable (Healthy Moon) au milieu d’un album roboratif – 17 titres !
Après divers changements de personnel et après avoir sillonné les routes, c’est désormais Colin Caulfield qui, quittant la console de mixage, tient la basse (on attend néanmoins la suite de ces aventures sous le nom de Young Man), contribuant à la nouvelle mue du groupe. Derrière une vilaine peinture primitive et sinistre, se cache l’un des grands albums de la scène noisy-rock actuelle. Incontestablement, la maternité de Deceiver est à chercher entre Loveless (1991) de My Bloody Valentine et Raise (1991 également) de Swervedriver. La paternité relève quant à elle d’une probable saillie post-punk plus difficile à identifier clairement, mais très certainement nichée au milieu des 80’s. Bienvenue dans le passé du futur (à moins que ce ne soit l’inverse). On considérera donc que c’est très contemporain, même si strictement aucun élément de vocabulaire n’est nouveau. DIIV en arrive là où d’autres comme Amusement Parks On Fire ou Film School, voire même Curve ou Catherine Wheel, sont arrivés à un moment avant de ranger les guitares dans leurs étuis et de tout laisser en plan.
DIIV perd ici sa virginité qui troublait, la sensibilité de Cole Smith se retrouvant jugulée par de gros riffs de guitares et une section rythmique imparable. Probablement l’effet de la déception ici mise en exergue et fil rouge de Deceiver après les espoirs d’Oshin et l’amertume des premières déconvenues de Is The Is Are. Les dix titres tiennent presque de l’exercice de style, parfaitement calibré (moins de 45 minutes cette fois-ci) et dénué de morceaux superflus, sans folie ni excès. Deceiver serait-il en quelque sorte le chef d’œuvre de Compagnons du Devoir ès shoegaze, de ceux qui croient au slogan « Soyez de ceux qui construisent l’avenir ! » ?
02. Like Before You Were Born
03. Skin Game
04. Between Tides
05. Taker
06. For the Guilty
07. The Spark
08. Lorelei
09. Blankenship
10. Acheron
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Ride or let DIIV
DIIV / Is The Is Are